Le TGV Fuxing redonne confiance dans la technologie chinoise

26 juin, province du Jiangsu : à Nanjing, des passagers attendent de monter à bord du TGV Fuxing. [Crédit photo : CFP]

Des passagers du nouveau TGV Fuxing, dont le nom signifie littéralement « renaissance » et qui a commencé à circuler entre Beijing et Shanghai, ont fait l'éloge de leur expérience sur les réseaux sociaux.

Le Fuxing est le dernier TGV « de norme chinoise », conçu et produit entièrement en Chine. Il est capable de circuler à 400 km/h, mais sa vitesse est cependant limitée à 300 km/h, comme pour les trains plus anciens sur la ligne, ce qui en a déçu plus d'un.

Ces restrictions ont été mises en œuvre en 2011, à la suite d'un accident de TGV à Wenzhou qui a coûté la vie à 40 personnes et en a blessé près de 200 autres. Celui-ci avait engendré de nombreuses préoccupations liées à la sécurité à travers tout le pays.

« Je suis sûr que la vitesse limite de la ligne ferroviaire à grande vitesse entre Beijing et Shanghai sera bientôt relevée à 350 km/h, indique pour sa part Sun Zhang, un expert ferroviaire et professeur à l'Université Tongji de Shanghai. La série Fuxing va progressivement remplacer les TGV Hexie (« harmonie »), lorsqu'ils seront retirés au bout de 30 ans de services. »

Cependant, l'importance majeure des Fuxing ne réside pas dans leur vitesse, mais dans leur standardisation, note Sun Zhang.

Ji Jialun, un professeur de la Faculté des transports de l'Université Jiaotong, partage cet avis et estime que le Fuxing - de fabrication purement chinoise - marque une étape clé dans l'exportation de la technologie des lignes ferroviaires à grande vitesse (LGV) de Chine.

« C'est un jalon dans la transition d'une fabrication partiellement chinoise à une fabrication purement chinoise. Il n'y aura plus de controverse à l'exportation par la Chine de ses technologies », commente-t-il.

Une fierté nationale retrouvée

Le changement des hauts dirigeants de la Chine en 2012 a inversé la tendance. Les nouveaux dirigeants ont soutenu le ferroviaire à grande vitesse au niveau national et en ont fait la promotion à l'étranger.

En juillet 2015, le président chinois Xi Jinping a inspecté l'entreprise Changchun Railway Vehicles Corporation - une filiale du plus grand fabricant de trains en Chine, la CRRC - et remarqué que les trains à grande vitesse constituaient une « carte de visite » pour la Chine.

Le Premier ministre Li Keqiang a même été surnommé « le VRP du TGV chinois » pour ses efforts continus dans sa promotion lors d'événements internationaux et de ses visites à l'étranger.

Sous le slogan « apporter une technologie avancée et créer une marque de Chine », les chercheurs et les concepteurs ont créé le Fuxing, une rame automotrice électrique (EMU pour electricity multiple unit) de norme chinoise.

Sur les 254 normes clés utilisées dans le train, 84 % sont chinoises. Ses technologies fondamentales, notamment son alimentation électrique, sa gestion des opérations et son système de surveillance, ont toutes été conçues en Chine.

Cela marque un changement depuis la série Hexie, qui utilisait un ensemble de normes différentes dans différents trains sous le nom Hexie, car les technologies utilisées dans leur construction étaient empruntées à différents pays.

Par le passé, lorsque des groupes chinois répondaient à des appels d'offres pour des projets de LGV avec d'autres acteurs majeurs de ce secteur, les brevets et les questions de sécurité étaient toujours problématiques dans les négociations.

Cependant, la question des brevets ne sera désormais plus un point de blocage, car la série Fuxing est conçue et produite quasiment entièrement en Chine.

« Nous avons invité de grands cabinets juridiques américains pour réaliser une évaluation en matière de propriété intellectuelle de nos EMU et ils ont conclu que notre technologie n'aurait pas de conflits afférents à la propriété intellectuelle lors de son exportation vers d'autres pays », explique Sun Zhang.

En dix ans, la Chine, qui était une nouvelle venue dans ce secteur, est devenue le pays abritant le système ferroviaire à grande vitesse le plus grand et le plus fréquenté au monde. A la fin de l'année dernière, il y avait 22 000 km de LGV en Chine, soit plus de 60 % du total mondial.

Le pays prévoit de doubler la longueur des LGV en service d'ici 2030 et de relier la quasi-totalité des villes ayant une population dépassant les 500 000 habitants.

La montée en confiance au niveau national se reflète par un essor à l'étranger, alors que la Chine renforce ses efforts pour partager ses accomplissements dans le domaine des LGV.

En 2015, la China North Railway et la China South Railway - les deux entreprises les plus importantes en Chine du rail à grande vitesse - ont fusionné pour former la CRRC, afin d'être plus à même de concurrencer les poids lourds comme Siemens en Allemagne, Alstom en France et Bombardier au Canada.

Sun Zhang pense que les troubles politiques de certains pays destinataires, ainsi que la suspicion politique, a également entravé les exportations des LGV chinoises : « Certains pensent que Beijing essaie de s'étendre et de s'infiltrer en construisant des LGV à l'étranger. Certains s'imaginent même que les trains seraient utilisés pour livrer des armes, ce qui est absolument sans fondement ».

Le réseau ferroviaire panasiatique proposé par l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN), qui relierait la province chinoise du Yunnan avec Singapour par le Laos, la Thaïlande et la Malaisie au centre, le Vietnam et le Cambodge à l'est, et le Myanmar à l'ouest, a fait un pas de plus en direction de sa réalisation la semaine dernière, lorsque le Conseil des ministres thaïlandais a approuvé le projet de LGV construite par la Chine entre Bangkok et Nakhon Ratchasima.

Il y a un besoin stratégique pour la Chine d'exporter son TGV, explique Ji Jialun : « La force motrice, que le développement du TGV a sur le secteur de la production manufacturière, est remarquable. Les exportations du TGV permettront d'ouvrir la voie aux autres secteurs sur le marché mondial. »