70 ans après la Seconde Guerre mondiale, les "femmes de réconfort" poursuivent leur lutte pour la dignité
French.china.org.cn | Mis à jour le 25-04-2015
Alors que la communauté internationale s'apprête cette année à commémorer le 70e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, un groupe de femmes dont l'honneur a été sauvagement piétiné par l'armée japonaise il y a 70 ans continue de lutter pour recouvrer leur dignité, sans savoir si elles y parviendront avant la fin de leur vie.
Ces femmes sont connues sous le nom de "femmes de réconfort", un euphémisme utiliser pour désigner celles qui ont été recrutées de force pour servir d'esclaves sexuelles par l'Armée impériale japonaise avant et pendant la guerre, et qui ont travaillé dans des bordels militaires mis en place dans les zones occupées par le Japon.
Les historiens estiment que quelque 200 000 femmes, dont la majorité étaient originaires de la péninsule coréenne, de Chine et d'autres pays d'Asie du Sud-Est occupés par le Japon pendant la Seconde Guerre mondiale, ont été victimes de ce système inhumain. A présent, seules 53 d'entre elles vivent encore en Corée du Sud.
Kim Bok-dong, l'une des 53 "femmes de réconfort" sud-coréennes survivantes, a rappelé sa douleur incommensurable lors d'une conférence de presse tenue vendredi au Club japonais des correspondants étrangers, exhortant le gouvernement japonais du Premier ministre Shinzo Abe à admettre les méfaits commis par le Japon au cours de la guerre, à offrir des excuses officielles aux victimes et à assumer la responsabilité de résoudre la question des "femmes de réconfort".
Mme Kim, âgée de 89 ans, a été amadouée pour quitter sa famille alors qu'elle était âgée de 14 ans. Elle a été emmenée à une "station de réconfort", soit un bordel militaire, dans la province du Guangdong, dans le sud de la Chine, et avant d'être "déplacée" dans plusieurs endroits de l'Asie du Sud-Est, à savoir Singapour, les îles indonésiennes de Sumatra et de Java, la Malaisie, jusqu'à la fin de la guerre.
"On m'a dit que j'allais dans une usine pour confectionner des vêtements pour les soldats japonais", s'est rappelée Mme Kim, "et le refus de partir n'était pas une option, car dans ce cas-là, ma famille aurait été considérée comme traître. Je devais y aller." Elle a dit que trois hommes sont venus la chercher le jour où elle est arrivée dans la province du Guangdong, y compris un homme japonais en uniforme militaire.
Racontant ses expériences horribles, elle a dit qu'elle croyait qu'elle serait envoyée vers une usine, même quand elle est arrivée dans le Guangdong, mais elle s'est finalement rendu compte que cela n'arriverait jamais, après avoir subi un examen de dépistage de maladies vénériennes et été assignée à un poste de réconfort.
Mme Kim a fait savoir que les "femmes de réconfort" comme elle étaient déplacées d'un endroit à l'autre comme des bagages. "Comment pourrais-je dire que ma vie fut celle d'un être humain", a dénoncé Mme Kim en colère et manifestement traumatisée, ajoutant que parfois, en particulier le week-end, il y avait de longues files d'hommes attendant devant sa chambre.
Mme Kim a comparé la douleur qu'elle a éprouvée pendant cette époque à "une mort atroce quotidienne", mais l'extrême-droite japonaise tente de démentir ou de se blanchir de ce qu'elle a enduré, et prétend que "les femmes de réconfort" étaient des prostituées en temps de guerre et qu'elles étaient bien rémunérées ou étaient des volontaires disposées à offrir des services sexuels aux soldats japonais.
Ces propos absurdes et bouleversants tenus par certains hommes politiques japonais ont été fermement condamnés et ont constitué un obstacle majeur pour le Japon dans ses efforts de réconciliation avec le pays voisin.
Toutefois, le Japon tente de dissimuler ce fait historique depuis 70 ans. Lorsque le Japon a finalement perdu la guerre, les soldats japonais, dans le but de cacher les atrocités faites aux "femmes de réconfort", ont transféré Mme Kim et d'autres femmes dans un hôpital militaire à Singapour pour leur faire suivre une formation en soins infirmiers, afin de les faire passer pour des infirmières, a confié Mme Kim.
Il est à craindre que ces survivantes vivent maintenant sur du temps emprunté et auront peu de chances de raconter leur histoire. Leurs voix s'affaiblissent à l'approche de la mort. Dans le cas de Mme Kim, en ce moment, elle dépend de médicaments pour survivre. Elle est cliniquement aveugle d'un oeil, alors que l'autre oeil nécessite des soins médicaux quotidiens.
En plus des infirmités physiques, elles ont également subi des blessures psychologiques. "Je ne peux pas trouver les mots pour décrire ce que je ressens à propos de ma vie. J'ai presque 90 ans. Je ne sais pas ce qu'est l'amour. Je me suis mariée, mais je ne pouvais pas avoir d'enfant. On ne m'a jamais appelée 'maman'", a déploré Mme Kim.
"Ce que nous voulons, c'est quelque chose de très simple. Nous voulons des excuses et des indemnités officielles. J'ai sacrifié tout mon corps qui est maintenant couvert de blessures de ces hommes. Et j'exige aussi du Japon qu'il raconte la vérité devant les médias", a déclaré Mme Kim, ajoutant que "je ne peux pas mourir maintenant, j'ai encore un objectif, je veux retrouver ma dignité et mon honneur".
Yoon Mee-Hyang, représentante du Conseil sud-coréen pour les femmes victimes de l'esclavage sexuel militaire japonais, a déclaré que les "femmes de réconfort" ont été victimes d'injustices pendant des décennies, alors que la guerre a pris fin il y a 70 ans et que la résolution de cette question demeure en suspens depuis 25 ans.
"Ce que le gouvernement japonais doit faire à l'heure actuelle, c'est écouter les voix des victimes et de répondre à nos demandes", a déclaré Mme Yoon lors la même conférence de presse.
Mme Kim n'est pas la seule à demander des excuses du Japon. Lee Yong-soo, une autre "femme de réconfort" sud-coréenne âgée de 86 ans, a également formulé la même demande jeudi aux États-Unis.
Mmes Kim et Lee ont toutes deux exhorté M. Abe, qui va bientôt effectuer une visite aux États-Unis et prononcer un discours au Congrès américain, à présenter ses excuses pour les atrocités de guerre commises par le Japon.
"Ce n'est pas M. Abe qui a commis ces actes répréhensibles, mais la responsabilité de l'administration nationale lui incombe. Par conséquent, il est carrément responsable de reconnaître ce que le Japon a fait dans le passé et de gérer correctement la question", a déclaré Mme Kim. F
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