La censure d'Internet et des réseaux sociaux en Chine

TANG SHUBIAO, rédacteur en chef de La Chine au présent

Jean Cavalaire, un créateur de sites internet de 35 ans, est en train de voyager en Chine et nous demande pourquoi des sites comme Facebook, Twitter, YouTube ou Le Monde sont bloqués en Chine, et pourquoi même Google et Gmail sont inaccessibles de temps à autres.

Je suppose que ce lecteur est sûrement un peu déçu que ces sites dont il doit être un habitué soient inaccessibles pendant son voyage et qu'il ne peut pas partager facilement ses expériences en Chine avec sa famille et ses amis. Néanmoins, la question posée n'est pas tout à fait exacte. Au moment où j'écris cet article, ma collègue m'informe que Gmail est accessible sur son iPhone. D'ailleurs, même si Google a refusé de continuer à honorer son engagement à respecter la loi chinoise et a transféré son moteur de recherche de Beijing vers Hong Kong il y a quelques années, il reste toujours consultable sur la partie continentale de la Chine.

Il est reconnu qu'Internet est sous le contrôle de la loi et de la morale, et que ce n'est pas un « monde indépendant ». Chaque État souverain exerce un contrôle nécessaire sur Internet pour des raisons politiques, juridiques, sociales, culturelles, linguistiques ou de sécurité.

Prenons la France comme exemple. Malgré sa vénération de la liberté d'opinion et d'expression, le gouvernement français ne laisse pas le champ complètement libre aux informations sur Internet. À ma connaissance, une loi à cet égard a été élaborée en France pour co-réguler Internet. Le gouvernement, les développeurs de technologies informatiques, les opérateurs et les internautes sont tous des co-régulateurs. Durant ses échanges avec les internautes chinois, il y a quelques années, Michel Gentot, l'ancien président de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), a indiqué qu'en France, les opinions des internautes ne peuvent pas violer la loi ; les internautes ne peuvent pas tenir des propos racistes et contester certains faits relatifs aux crimes contre l'humanité, notamment ceux ayant été perpétrés pendant la Seconde Guerre mondiale.

Donc, il est normal que la Chine prenne des mesures appropriées pour bien gérer Internet.

La Chine suit de près les pays les plus avancés au monde sur le plan du développement d'Internet. Concernant les moteurs de recherche, Google a été fondé en 1998 et Baidu a été fondé en 2000 en Chine. Concernant les réseaux sociaux, Facebook a vu le jour en 2004, alors qu'en Chine, Xiaonei est né en 2005 avant de changer son nom en Renren en 2009. Comme la plupart des internautes chinois ne maîtrisent que le chinois, les développeurs et les opérateurs chinois de l'Internet mettent l'accent sur le développement des réseaux sociaux et des nouveaux médias qui s'adaptent aux Chinois. Parmi eux se trouvent le site Renren, le site Sina Weibo et le site Tudou, ce sont les versions chinoises de Facebook, Twitter et YouTube.

Sina a lancé Weibo en 2009 en prenant les fonctions et la forme de Twitter et Facebook pour référence. Weibo est une plate-forme permettant de partager, de diffuser et d'obtenir des informations, entre une communauté d'utilisateurs étant reliés entre eux par des « liens ». Parmi les micro-blogs chinois, Sina Weibo est le plus connu. Il comptait déjà plus de 500 millions d'utilisateurs à la fin décembre 2012. Le 23 juillet 2013, Sina Weibo a mis en place une connexion avec Facebook : les utilisateurs étrangers peuvent se connecter à Sina Weibo avec un compte Facebook. Le site est ainsi devenu le premier grand réseau social en Chine ayant une connexion avec Facebook. Le 27 mars 2014, Sina Weibo a changé son nom en Weibo et a dévoilé un nouveau logo. L'empreinte de Sina a progressivement disparu.

Il existe un autre réseau social en Chine appelé Weixin (Wechat en anglais) qui est assez populaire parmi les étrangers. Wechat a été lancé par la société Tencent en 2011 avec pour fonction de transmettre rapidement des messages, des photos, des vidéos et des messages vocaux par téléphone portable, tablette et ordinateur. On peut aussi s'en servir comme moyen de paiement. Avec plus de 600 millions d'utilisateurs enregistrés en novembre 2013, Wechat est le logiciel de messagerie instantanée le plus utilisé d'Asie.

Ma collègue allemande, Verena Menzel, fait partie des nombreux utilisateurs étrangers de Wechat en Chine. D'après elle, il est rare de trouver des reportages sur le développement et sur les applications des réseaux sociaux chinois, et encore moins sur les logiciels de messagerie instantanée comme Wechat, dans les médias occidentaux y compris les médias allemands. L'innovation de ces nouveaux médias et de la technologie de ceux-ci représente une excellente opportunité pour le développement de la communication interpersonnelle et interculturelle, ainsi que pour le dialogue entre les médias chinois et étrangers. L'immense potentiel qui existe dans ce domaine reste encore à explorer.