La Chine et la France en Afrique: rivalité, coopération et partenariat multipartite gagnant-gagnant (COMMENTAIRE)

Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi s'entretiendra mercredi à Paris avec son homologue français Laurent Fabius, à l'occasion de son premier déplacement en Europe depuis sa prise de fonctions. Mis à part les axes de renforcement du partenariat franco-chinois dans tous les domaines et la préparation du 50ème anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques, les deux ministres aborderont diverses questions internationales, dont la situation au Mali et en République centrafricaine, ce qui pourrait constituer un point de départ de la coopération sino-française sur un continent d'intérêt commun.

Aux yeux de certains analystes, si la France, ancienne puissance coloniale, conserve des liens privilégiés avec de nombreux pays africains, elle est de plus en plus concurrencée par la multiplication des investissements des entreprises chinoises. "Il est évident que la Chine est de plus en plus présente en Afrique. Les entreprises françaises qui en ont les moyens doivent passer à l'offensive", a estimé le ministre français des Finances, Pierre Moscovici, lors d'une visite en Côte d'Ivoire en décembre 2012.

Certes, le commerce bilatéral entre la Chine et l'Afrique a connu une croissance assez rapide ces dernières années, notamment après l'établissement du Forum de coopération Chine-Afrique en 2000, la Chine ayant dépassé la France en Afrique en 2007 en matière d'échanges commerciaux, et étant devenue le premier partenaire commercial de l'Afrique en 2009.

Cependant, selon Kong Quan, ancien ambassadeur de Chine en France, l'envergure de la coopération Chine-Afrique n'est pas du tout comparable à celle observée entre l'Afrique et l'Europe. Le commerce franco-africain à lui seul a surpassé celui entre la Chine et l'Afrique pendant une longue période. Il s'agit d'ailleurs de deux modèles tout à fait différents, à savoir Nord-Sud et Sud-Sud; les liens entre l'Afrique et des pays européens ont connu des mutations depuis la période de colonisation, mais les relations sino-africaines sont continues et stables, dans le cadre d'une amitié entre pays frères en développement.

Le gouvernement chinois, sous une nouvelle direction qui accorde une attention particulière aux relations avec l'Afrique, est ouvert et coopératif sur la question de l'Afrique. Il appelle à une coopération multipartite devant répondre à l'aspiration des Africains et contribuer au développement du continent africain de manière à améliorer le bien-être de son peuple.

Et cette coopération multipartite est hautement complémentaire, considérant que la Chine et la France ont besoin de l'Afrique dans un contexte de crise économique internationale sur fond de mondialisation croissante, d'une part; et d'autre part, que l'Afrique ne peut se développer adéquatement sans l'aide et l'investissement de la communauté internationale, notamment la Chine et la France, deux grandes économies mondiales.

La France, qui considère la Chine comme un concurrent en Afrique, est appelée à changer de cap pour prendre la Chine pour partenaire, non seulement pour ses propres intérêts mais également en faveur d'un partenariat multipartite gagnant-gagnant.

Il s'agit également d'une coopération tous azimuts, qui s'étend de l'économie à la culture, en passant par la sécurité et la paix. La Chine et la France, toutes deux membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, ont bien contribué aux opérations de maintien de la paix en Afrique, où sévit encore le terrorisme et les conflits. Au Mali comme en République centrafricaine ou en République démocratique du Congo, la Chine et la France ont une responsabilité internationale à assumer et c'est là une occasion de coopération importante pour les deux pays.

Il est à rappeler que la coopération aboutit à une victoire commune et la confrontation entraîne des pertes pour tous. Objectif ultime: le développement commun.