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Des musées pour protéger la culture traditionnelle

French.china.org.cn | Mis à jour le 16. 08. 2019 | Mots clés : hutong,Beijing

ZHANG PENGYU*

Les hutong sont les quartiers les plus authentiques de Beijing. Ils renferment des traditions chères aux habitants, et les touristes désireux de découvrir le vieux Beijing s’y promènent volontiers. Malheureusement, les siheyuan (maisons à cour carrée) ne sont pas ouvertes au public, et les demeures royales telles que la Cité interdite ou le palais d’Été ne sont pas représentatives des conditions de vie du peuple. Les différents musées du hutong entendent résoudre ce paradoxe en proposant au grand public de découvrir les anciens modes de vie et les habitations traditionnelles de Beijing dans un espace d’exposition dédié à cet effet.

Le Musée du hutong Shijia, premier musée consacré aux hutong à Beijing, a ouvert ses portes au public le 19 octobre 2013. Il est situé dans l’arrondissement Dongcheng, dans l’ancienne résidence de l’écrivaine Ling Shuhua (1900-1990). Occupant une superficie de plus de 1 000 m2, le musée possède huit salles d’expositions.

Le 18 octobre 2018, un deuxième musée consacré aux hutong, le Musée du hutong Dongsi, a ouvert ses portes dans la capitale chinoise. Également situé dans l’arrondissement Dongcheng, il occupe une superficie de 1 023 m2 et renferme cinq salles d’exposition. Il s’agit d’un siheyuan typique à trois cours, dont le bâtiment principal a été construit vers 1940.

Un espace culturel

À l’intérieur du Musée du hutong Shijiang, des objets de toutes sortes sont exposés. Dans un coin, une bicyclette de la marque Flying Pigeon attire l’attention. Un dénommé Chen Ziyu a fait don de cette bicyclette au musée en 2016. Appartenant à la génération « post-1990 », Chen Ziyu est un passionné de l’histoire de Beijing.

« Je n’habite pas dans ce hutong, mais j’aime beaucoup ce musée. Un jour, j’ai constaté que parmi les objets de la vie quotidienne exposés dans le musée, on trouvait de nombreux vêtements, ustensiles et meubles, mais que les moyens de transport étaient peu représentés. J’ai donc pensé à la bicyclette que j’avais chez moi », nous confie Chen Ziyu.

Selon lui, ce vélo a été fabriqué en 1966 et représentait ce que l’on vendait de mieux sur le marché chinois de la bicyclette à cette époque-là. « Il coûtait 193 yuans, un prix prohibitif pour n’importe quelle famille de classe moyenne. En plus, on ne pouvait l’acheter que par le biais de tickets de rationnement, qui, à l’époque étaient difficiles à obtenir », ajoute Chen Ziyu.

Le Musée du hutong Shijia renferme un atelier de sons des hutong des années 1980, où l’on peut entendre des enregistrements de stridulations de cigales, de chants d’oiseaux et de cris de marchands. Il a été créé à l’initiative de l’artiste Qin Siyuan, petit-fils de Ling Shuhua.

« Dès sa création, le Musée du hutong Shijia a eu à cœur d’apporter quelque chose aux habitants, indique Wang Hongguang, planificateur du Beijing Municipal Institute of City Planning and Design. Nous espérions susciter l’enthousiasme des habitants du quartier afin qu’ils deviennent acteurs de ce lieu, au même titre que les employés du musée ou les touristes. L’idée était de faire de ce lieu une espace culturel public vivant. »

Le Musée du hutong Dongsi présente lui aussi une collection d’objets qui ont été donnés par des habitants de Beijing, entre autres, une bassine, un wadang (morceau de tuile généralement décoré de caractères chinois ou de dessins) et un pot à grillons. Liu Qiuqin, qui vit depuis son enfance dans les hutong, a fait don au musée d’un bassin à poissons qui date de l’époque de la République de Chine (1912-1949). « En voyant une publicité pour le Musée du hutong Dongsi sur laquelle il y avait un bassin à poissons, j’ai immédiatement pensé à cet objet ancien que j’avais chez moi. En effet, le bassin à poissons est un objet traditionnel des siheyuan. Ainsi, cela permet d’avoir une idée plus précise de la vie des habitants du vieux Beijing », explique Mme Liu.

Favoriser le lien social

Depuis son ouverture, le Musée du hutong Shijia s’est bien intégré à la vie de quartier. À chaque fête traditionnelle, le musée organise des activités pour les habitants, par exemple, un atelier photos pour les couples âgés à l’occasion de la Saint-Valentin chinoise (7 juillet du calendrier lunaire) ou encore une dégustation de plats traditionnels à l’occasion du festival Laba (8 décembre du calendrier lunaire).

« Nous souhaitons encourager les résidents à prendre part à la construction et l’organisation de l’espace public afin de renforcer le sentiment de communauté. Pour ce faire, il nous faut rassembler diverses forces et ressources sociales et prendre en compte les différents besoins des résidents », indique Wang Hongguang. Beaucoup d’activités du musée visent à renforcer la compréhension et la confiance mutuelle entre les habitants, afin de rendre la vie dans les hutong plus agréable et de protéger la culture de ces quartiers.

En 2014, le Beijing Municipal Institute of City Planning and Design et le Bureau de quartier de Chaoyangmen ont fondé l’Association pour la protection du patrimoine architectural du hutong Shijia, établissant une plate-forme qui réunit les résidents, les propriétaires, les experts et des bénévoles.

Ma Yuming, directeur du Musée du hutong Shijia et planificateur du Beijing Municipal Institute of City Planning and Design, explique qu’il existe une chambre du conseil chargée de traiter des questions d’aménagement du quartier, notamment les questions liées au stationnement, aux toilettes publiques et à la rénovation des cours.

En 2017, le ministère du Logement et du Développement urbain et rural a récompensé le Programme de participation du public à la protection et la rénovation du quartier historique de Dongsinan en lui remettant le Prix du meilleur environnement de vie de Chine. Ce programme a également été applaudi par Kathryn Moore, présidente de l’Association internationale des architectes paysagistes (IFLA) : « Je n’aurais jamais imaginé que le développement des musées dans les agglomérations était si dynamique en Chine ! »

Une mémoire collective

Comment faire en sorte de concilier la préservation de la culture traditionnelle et la modernisation des villes ? Ces dernières années, des musées destinés à préserver la mémoire culturelle, comme les musées du hutong à Beijing, ont été créés dans de nombreuses villes chinoises.

Le 1er janvier 2018, le musée Xiwang Huayuan, premier musée consacré aux ruelles à Shanghai, a ouvert ses portes. On y découvre une variété d’objets anciens tels qu’une machine à coudre de la marque Hudie qui était très populaire dans les années 1970, une pendule de table de la marque Sanwu, une tasse émaillée et une qipao (robe traditionnelle fendue sur les côtés), vestiges de la mémoire collective du vieux Shanghai.

Le 31 juillet 2018, le Musée de la nostalgie a été inauguré dans le quartier Wuxing de Chengdu. Les collections d’objets qui proviennent de dons retracent les changements de la vie quotidienne des habitants de Chengdu des années 1930 aux années 1990. En outre, le musée propose des cours de dialecte hakka ainsi que des cours de cuisine traditionnelle.

« Tant qu’il n’y aura pas eu une prise de conscience culturelle, il n’y aura pas de fierté culturelle. Pour les habitants de Beijing, les musées du hutong sont des lieux de mémoire et de nostalgie. Pour la ville, ce sont des lieux d’une grande valeur historique et culturelle », affirme Zhang Zhiyong, directeur du Bureau de quartier de Dongsi (dans l’arrondissement Dongcheng à Beijing).

*ZHANG PENGYU est journaliste au Quotidien du Peuple (édition d’outre-mer).


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Source:La Chine au Présent