Wuhan et ses multiples visages

Par : Yann |  Mots clés : Wuhan, Yangtzé, tour de la Grue jaune
French.china.org.cn | Mis à jour le 12-02-2014

Panorama de Wuhan sur lequel on peut voir le pont du Yangtzé, la tour de la Grue jaune et la tour de télévision, des sites emblématiques de la ville.

Au regard des étrangers, Wuhan (capitale du Hubei) n'est pas la ville chinoise de prédilection pour découvrir les merveilles de la Chine. Cette métropole de 10 millions d'habitants au cœur de la Chine est d'abord vu comme l'usine du pays, sans une once de charme. Certes, il est difficile de nier que les centres de production et buildings y abondent, et que la pollution y est préoccupante, mais derrière cet aspect industriel prédominant et le chaos urbain ambiant, des endroits pétris de culture valent le coup d'œil.

Petit détour historique

Commençons notre visite de Wuhan par l'un des symboles historiques de cette ville : la tour de la Grue jaune. Elle est considérée comme l'une des quatre plus belles de Chine. Selon la légende, un immortel dénommé Wang Zi'an est monté sur une grue jaune pour s'envoler vers la montagne du Serpent. Pour commémorer l'évènement, y fut érigé un imposant pavillon. Construite pour la première fois en 223, cette tour de la Grue jaune a de nombreuses fois changé de face, car elle fut détruite (par le feu ou la guerre) et reconstruite au fil du temps. Des reconstitutions miniatures sont exposées au sein du site, révélant l'évolution de son architecture au fil des dynasties.

Et bien que cette tour sur quatre étages date de 1985 seulement, elle conserve toute la beauté des pavillons d'antan. L'intérieur de la tour est orné de mosaïques, de calligraphies, peintures, et autres décorations. Une fois arrivé en haut, par temps clair, on peut avoir une belle vue sur tout Wuhan. Autrefois, la tour de la Grue jaune avait inspiré les plus grands poètes et calligraphes, en particulier Cui Hao, Li Bai et Mi Fu. Et aujourd'hui encore, une atmosphère particulière semble se dégager de ce site, où la vie s'écoule lentement, où résonne de temps à autre la grosse cloche en bronze à proximité, où les végétaux environnant diffusent leurs agréables parfums.

Il suffit de traverser la route pour se retrouver dans un tout autre décor. Là, trône fièrement une statue de Sun Yat-sen, gardien de ce que les Chinois surnomment « le bâtiment rouge ». Il s'agit en fait du mémorial du soulèvement de Wuchang pendant la Révolution chinoise de 1911. La révolte des sociétés secrètes républicaines à Wuhan ont conduit à la chute du pouvoir impérial de la dynastie Qing, remplacé par la République de Chine. Le solide bâtiment en briques rouges hébergeait officiellement l'armée révolutionnaire à l'origine de ce soulèvement. À l'intérieur, les visiteurs peuvent observer la composition des bureaux anciens. Les férus d'histoire trouveront leur bonheur dans les photos et reliques relatant la Révolution de 1911.

Dans la partie Hankou, le long du fleuve Bleu – Wuhan est né de l'association de trois anciennes villes : Hankou, Wuchang et Hanyang – on observe également ce même type de bâtiment construit en briques rouges au début du XXe siècle. Ils faisaient partie des anciennes concessions étrangères (britannique, française, russe, allemande, japonaise). Ces constructions centenaires, qui mêlent architectures européenne et chinoise, sont pour la plupart préservées par la ville et ont été rénovées. L'ancien consulat américain fait partie des plus beaux, avec ses formes arrondies qui se marient aux ouvertures arquées. Une ancienne succursale de la Banque d'Indochine, plus carrée, avait également été érigée selon ce même style baroque. Le gouvernement municipal de Wuhan, quant à lui, a trouvé logis dans l'ancien consulat allemand, qui affiche une architecture tout à fait différente, avec des murs blancs irréguliers et surplombés de tuiles rouges.

Anciens consulats et banques mais aussi quartiers résidentiels, poste de police, association navale... de nombreux trésors architecturaux sont restés sur pied. Beaucoup ont même trouvé une seconde vie. Ce quartier des anciennes concessions est devenu un quartier très prisé pour ses cafés le jour et pour ses bars la nuit. L'ancienne banque russo-chinoise a été réaménagée en musée sur Soong Ching Ling, présidente honoraire de la République populaire de Chine et fondatrice de notre revue, qui avait vécue et travaillée là pendant sept mois en 1926. Au premier étage, on peut observer des portraits de Sun Yat-sen et son ascension au pouvoir ; le deuxième étage est consacré à sa femme, dont la vie est retracée au travers de photos anciennes, de son mobilier et d'objets de la vie courante lui ayant appartenu.

Mais pour admirer le vieux cœur « chinois » de Wuhan, c'est à Wuchang qu'il convient de se balader, plus exactement dans la vieille rue de Tanhualin. Nous sommes arrivés à la tombée de la nuit et avons donc manqué les détails architecturaux, mais nous avons profondément goûté au charme artistique de cette rue où la population vient se détendre. Chaque boutique semble être un musée à explorer. Qu'il s'agisse d'un café-bibliothèque ou d'un magasin d'art artisanal, à l'intérieur, le côté traditionnel est mis en valeur. Un sentiment de bien-être se dégage de ces vieilles bâtisses présentées dans leurs plus beaux apparats. Un coin incontournable !

En pleine effervescence

Tanhualin est donc un modèle de préservation et reconversion. Aujourd'hui, ce lieu chargé d'histoire est fréquenté par les touristes bien sûr, mais surtout par les jeunes artistes. Diverses expositions et galeries se cachent dans cette rue et ses embranchements. Mais l'art se manifeste jusque sur les murs ! À l'entrée, nous avons été surpris d'apercevoir de gigantesques graffitis, mais je ne parle pas des tags sans âme des délinquants, mais de magnifiques fresques réalisées par des artistes professionnels, réunis sous le nom du collectif Wubest. On peut également en observer à Hanyangzao, ce que les Chinois surnomment le « 798 de Wuhan ». Moins commercial qu'à Beijing, plus petit aussi, mais tout aussi sympathique avec ses expositions, ses cafés et son décor esthétique.

Quittons les pinceaux pour nous rendre là où la majorité des Wuhanais se rejoignent en soirée pour se détendre après le travail : la rue commerçante de Hanjie à Wuchang. C'est une rue piétonne nouvelle où sont regroupées de nombreuses marques de boutiques de vêtements, comme H&M, Zara, Bershka. Une caverne d'Alibaba pour les accros au shopping. On y trouve également une grande bibliothèque sur plusieurs étages, qui accueille diverses expositions culturelles. À proximité de Hanjie, un immense Wanda, tout recouvert de spots, avec cinéma IMAX.

Dès l'entrée, est érigée une copie du London Bridge. Et au cœur de cette artère commerçante, on sent la ferme volonté d'imiter le style européen dans l'architecture. Ce n'est pas nécessairement une réussite, car ces murs sont neufs, n'ont pas le charme des antiquités, mais qu'importe. Il est agréable de voir les Wuhanais venir profiter de la vie ici : les couples main dans la main qui déambulent lentement au son de la douce musique diffusée en fond sonore, ou encore les amis qui s'assoient autour d'un bon repas.

Une gastronomie alléchante

Effectivement, je me devais de parler des bons petits plats que j'ai eu la chance de goûter durant ma semaine à Wuhan. Si les Wuhanais aiment beaucoup manger, c'est certainement parce que leur nourriture est succulente.

La spécialité la plus connue est sans doute : le « Reganmian » (des nouilles sèches et chaudes). Il s'agit de nouilles épaisses mélangées à une sorte de sauce de sésame noire. Simple, rapide, nourrissant : je le recommande fortement. Les Wuhanais seront ravis de voir que vous aimez leur gastronomie et un peu étonnés que votre palais occidental soit satisfait par ce plat très sec. Une autre spécialité : le douhua. Il s'agit de tofu dans de la soupe assaisonné de divers haricots que l'on peut parfois choisir à son gré. Ce plat est présent dans les cuisines de Taiwan et de Wuhan.

Nous avons également expérimenté un restaurant traditionnel de brochettes, mais là, les choses se sont compliquées. Autant les aliments étaient bons, autant tout était extrêmement épicé. Mais heureusement, des petits snacks permettent de « reposer » sa langue, comme des beignets de racines de lotus, des frites de racines de lotus, des pancakes de riz.

Mais le mieux est encore d'avoir la chance de manger dans une vraie famille wuhanaise, qui vous accueillera avec une soupe de viande et de racines de lotus, du porridge aux huit haricots, de la brème (le poisson préféré de Mao Zedong) et des légumes verts appelés hong-shancaitai. Les locaux sont extrêmement accueillants et semblent craindre que vous mouriez de faim. Ils plaisantent entre eux de leur accent wuhanais quand ils essaient de parler le mandarin le plus correct possible. Un très bon moment !

Malheureusement, toutes les bonnes choses ont une fin. L'heure du départ sonne, et nous n'avons pas eu le temps de voir la rue Jiqing (réputée pour ses restaurants et ses musiciens), le temple bouddhiste Guiyuan, le musée provincial du Hubei et tant d'autres sites prometteurs de souvenirs impérissables... Alors, à la prochaine, Wuhan.

 

ANAÏS CHAILLOLEAU

 

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