Les cerfs-volants

Ce n’est qu’après avoir lu le merveilleux roman de Khaled Hosseini,Les cerfs-volants de Kaboul, que j’ai commencé à m’intéresser aux cerfs-volants. C’est donc dire à un âge assez avancé, et sans relation avec la Chine où je vivais déjà.

La Chinepeut être considérée comme le berceau du cerf-volant, et en particulier les provinces du Henan et du Shandong. Pourquoi ces provinces? Parce que dans la culture religieuse antique des lieux, on vénérait les oiseaux et le soleil.

À Kaifeng (Henan) subsiste le modèle « original » du cerf-volant, dit-on. Le nom pour désigner cet objet était hao. Le caractère 昊 est en effet constitué du « soleil » (ri日) au plus haut point du « ciel » (tian天). Lespremiers cerfs-volants étaient généralement blancs, sans dessins ni couleurs. Le 3 du Troisième mois lunaire, le hao s’envolait vers le ciel; c’était autour du Qingming, une fête toujours importante où l’on honore les âmes des défunts. On croyait donc que faire voler un cerf-volant au moment où la terre commence à se réchauffer, au printemps, invite la lumière du soleil.

Des tribus de ces deux provinces – adoratrices du ciel et du soleil, avaient pour emblème soit une hirondelle à double queue, soit un corbeau d’or ou « oiseau du soleil ». C’est pourquoi les cerfs-volants prenaient le plus souvent la forme d’oiseaux, réalistes ou stylisés comme le maguaen forme de T,qui représente la longévité pour les vivants et l’éternité pour les défunts.

Cependant, le cerf-volant – d’abord passé d’objet de culte à jouet – a traversé des frontières ettenu d’autres rôles aussi. Il a contribué à la science et à l’industrie. D’abord, les premiers avions furent inspirés par le cerf-volant; puis,Benjamin Franklin étudié la foudre et le tonnerre à l’aide d’un cerf-volant; de plus, certains pêcheurs recourent encore au cerf-volant pour lancer des appâts dans la mer.

Au Ve s. avant notre ère, le cerf-volant était fabriqué de bois – muyuan. Après l’invention du papier, on fabriqua le zhiyuan.Le rôle du cerf-volant passa à des fins militaires. Certains étaient assez gros et solides pour transporter des hommes afin d’observer les manœuvres ennemies, ou pour distribuer des feuilles de propagande en territoire ennemi.

Sous les Tang (618-907), on commença à fabriquer des cerfs-volants faits de languettes de bambou. Une fois dans les airs, ces languettes vibraient, ce qui produisait une « musique » semblable au son du zheng, d’où le nom de fengzheng ou zheng à vent.

Sous les Qing, la dernière dynastie en Chine, on lançait des cerfs-volants auxquels on confiait la mission d’emporter au loin la malchance et la maladie. Donc, il ne fallait surtout pas ramasser un cerf-volant tombé ou perdu.

Les cerfs-volants d’aujourd’hui comptent 300 variétés de motifs, et ils peuvent mesurer de 30 centimètres à 300 mètres. « Il n’y a aucune limite à l’imagination », me disait cet artisan lors de l’Exposition nationale d’artisanat de 2009, à Beijing.

Pour produire un cerf-volant de qualité, il faut choisir du bambou capable d’endurer la pression du vent. Une fois réalisée l’armature, on la couvre de soie ou de papier, que l’on peint de couleurs diverses, à la main, et l’on inclut des souhaits et des symboles comme le pin ou la grue pour la longévité, la pêche ou la chauvesouris pour la bonne fortune. Dans la production de masse, on utilise du papier préimprimé.

Depuis 27 ans que je vis en Chine, je ne suis pas encore allée au Shandongen avril assister au championnat mondial des Cerfs-volants de Weifang. C’est pourquoi je n’ai de photos personnelles à ajouter à cet article. La photo du vol d’hirondelles multicolores vient de la revue La Chine au Présent, avril 2007. L'artisan qu’on voit ici exposait ses œuvres lors d’une foire nationale d’artisanat.

Le festival international des cerfs-volants est une démonstration et compétition d’habileté à laquelle participent des centaines d’amateurs du monde entier. On y trouve des créations des plus inattendues comme des pandas volants présentés par la Nouvelle-Zélande.