La prostitution et la consommation
de drogues sont interdites en Chine, mais un nouveau plan national
controversé du ministère chinois de la Santé prévoit une
intervention gouvernementale pour aider les prostituées et les
drogués à éviter la contamination par le virus du HIV.
"L'intervention auprès des groupes
de population à haut risque est aujourd'hui cruciale et urgente
pour la lutte et la prévention contre le sida. Ce plan du ministère
de la Santé est instructif pour le travail des gouvernements locaux
à tous les niveaux", a indiqué Li Chaoliang, directeur adjoint du
Bureau du contrôle et de la prévention du sida de la province du
Yunnan (sud-ouest de la Chine).
Selon ce plan, les autorités locales
de la santé devront éduquer les prostituées et promouvoir l'usage
des préservatifs. Les patients souffrant de maladies sexuellement
transmissibles devront recevoir un traitement médical adéquat et
des perservatifs gratuits.
En outre, les informations sur le
VIH/SIDA doivent être diffusées dans les endroits fréquentés par
les homosexuels, tandis que les usagers de drogue par intraveneuse
doivent être encouragés à avoir des rapports sexuels protégés.
A l'heure actuelle, la Chine compte
quelque 840 000 porteurs du virus HIV, y compris 80 000 sidéens.
L'épidémie s'est répandue à l'ensemble du pays, et se déplace
actuellement des groupes à haut risque, tels que les prostituées,
les drogués, les homosexuels et travailleurs migrants, à la
population en général.
Cependant, certains disent qu'il est
hypocrite de prendre soin des prostituées et des drogués, alors que
les départements chargés de la sécurité publique luttent contre la
prostitition et la consommation de drogues.
"Les départements de la sécurité
publique exigent des consommateurs de drogues de se faire
enregistrer aux bureaux de sécurité publique locaux, et encouragent
le public à dénoncer les drogués non enregistrés", a dit Guo Yaqi,
qui est volontaire dans la prévention contre le sida depuis
plusieurs années.
"Or, aujourd'hui les départements de
la santé vont leur fournir des préservatifs en même temps qu'une
éducation. Comment ces deux départements vont-t-ils coopérer entre
eux? Vont-ils coopérer les uns avec les autres?" a questionné
Guo.
Ce dernier a émis des doutes quant à
la responsabilité des départements de la santé à élaborer des
rapports destinés aux départements de sécurité publique une fois
qu'ils ont obtenu des informations sur les prostituées et les
drogués. "Que vont-ils faire s'ils ont trouvé des drogués non
enregistrés?" a-t-il demandé.
Le plan est un "signe positif" de
l'attention grandissante du gouvernement chinois à l'égard de la
propagation du sida, mais sa faisabilité n'est pas suffisamment
claire", a indiqué Meng Lin, un porteur du virus HIV.
"Cette approche n'aura pas de force
légale, tant que le ministère de la Santé et le ministère de la
Sécurité publique n'auront pas rendu public conjointement un plan
d'action détaillé pour son application", a-t-il dit.
Sans un plan de coopération
détaillé, des cas comme celui qui a eu lieu récemment dans une
ville du sud de la Chine, où des policiers ont fait une descente
pour arrêter des drogués au moment même de l'intervention des
travailleurs de la santé, seront fréquents.
"Il y a là un vide juridique, parce
que le fait d'accepter l'intervention des travailleurs de la santé
signifie d'être identifié par la police, ce qui préoccupe les
groupes de population à haut risque", a ajouté Meng.
Face à ces doutes, Li du Yunnan a
souligné que l'intervention auprès des groupes à haut risque
nécessitait le soutien et la coopération des départements de la
sécurité publique. L'intervention doit permettre de réaliser un
équilibre entre les besoins des groupes de population à haut risque
et la lutte du gouvernement contre les crimes concernés.
"Nous devons insister sur
l'importance du caractère secret de l'intervention et faire de
notre mieux pour limiter l'utilisation des informations recueillies
uniquement pour l'intervention", a-t-il dit.
Des officiels du ministère de la
Sécurité publique ont refusé de commenter le plan du ministère de
la Santé, affirmant qu'ils n'étaient pas au courant du détail de ce
plan.
"L'intervention auprès des groupes à
haut risque doit être menée par des organisations non
gouvernementales, comme ce qui se fait dans d'autres pays", a
ajouté Gao, "sinon, différents départements du gouvernement doivent
coopérer davantage dans leur planification".
2005/06/24
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