Histoire
 

 

Selon les registres les plus anciens, les populations qui vivaient dans les Plaines centrales du bassin du fleuve Jaune étaient appelés les Xia. Dans la région qui s'étendait du fleuve Huaihe au mont Taishan, dans l'est, vivaient les Dongyi; dans la vallée du Yangtsé, au sud, les Sanmiao; dans les régions au-delà du fleuve Jaune vers le fleuve Huangshui au nord-ouest, les Qiang; et dans la région entourant les déserts septentrionaux, les Hunzhou (dont les Shanrong et les Xianyun). Les Xia établirent des liens avec les populations d'autres nationalités qui vivaient dans le voisinage.

Des dynasties des Shang et des Zhou de l'Ouest jusqu'aux périodes des Printemps et Automnes et des Royaumes combattants (XVIe s- 221 av. J.-C.), des contacts plus étroits se développèrent au sein de ces groupes ethniques. Des alliances se forgèrent entre les groupes des Shang et des Zhou et ceux des Dongyi et des Daoyi, dans l'est, des Sushen, dans le nord-est, des Nanman, dans le sud, des Di, des Rong et des Kunyi, dans l'ouest et le nord, ce qui provoqua des influences réciproques et une fusion ultérieure. Au cours de cette période, la nation Huaxia vit le jour grâce à la fusion des Xia, des Zhou et des Shang avec les Qiang, les Rong, les Kunyi, les Miao et les man.

Les périodes des Printemps et Automnes (770-476 av.J.-C.) et des Royaumes combattants (475-221 av. J.-C.) furent les témoins de la transition de l'esclavage vers le féodalisme des divers États des Plaines centrales. L'on rapporte que, pendant la dynastie des Zhou (XIe siècle - 771 av. J.-C.), il y avait 1 800 « États », mais qu'à cause des guerres et des intégrations, ce nombre chuta à 100 pendant les Printemps et Automnes. Parmi ces cent États, seuls sept existaient toujours en Chine du Centre durant les Royaumes combattants. Suite à l'unification du pays en 221 av. J.-C., le premier empereur des Qin centralisa l'État multiethnique sous une autocratie féodale. Les Dongyi qui vivaient le long du fleuve Huaihe, les Nanman du bassin du Yangtsé, les Baiyue qui habitaient le territoire occupé actuellement par le Guangdong, le Guangxi, le Fujian et le Zhejiang, les Zhurong de la partie occidentale du pays et des groupes ethniques aussi divers que les Ze, les Bu et les Yanlang vécurent sous la férule de l'empereur des Qin. Dans son domaine, ce dernier mit en place des préfectures et des districts relevant directement de l'autorité centrale, et il établit pour la première fois en Chine un pouvoir d'État centralisé et féodal. Toutefois, dans certains endroits, subsistèrent des puissances rivales qui provoquèrent des conflits graves et de longue durée. Sous le bref régime des Qin, certains petits États se développèrent parmi les Xiongnu (Huns) qui vivaient dans le nord et parmi les Wusun, dans le nord-ouest, de même que parmi les Qiang qui habitaient la partie occidentale du pays et les Donghu, les Xianbei, les Wuhuan et les Yufu qui vivaient dans le nord-est.

Pendant la dynastie des Han (206 av. J.-C.- 220 ap.J.-C.) le pays connut une unification encore plus poussée, alors que les Huaxia absorbèrent de nombreuses autres tribus pour devenir la nation que l'on connaît sous le nom de Han.

À la fin du deuxième siècle avant Jésus-Christ, la dynastie des Han contrôlait les Qiang du Nord-Ouest; en 119 av.J.-C., les Wusun firent leur entrée dans l'empire, suivis en 110 av. J.-C. par les Man sur l'île de Hainan, dans le sud, et en 91 av. J.-C, par les Xiongnu du Sud. Parallèlement, les Xiongnu du Nord commencèrent à émigrer vers l'Europe, mouvement qui se terminera par de nombreuses guerres entre la tribu dirigée par Attila et les puissances locales.

En 60 av. J.-C., la dynastie des Han institua un gouvernement régional dans le territoire occupé actuellement par le Xinjiang, étape qui mena à la fusion de plus de 30 petits cités-États. Pour un temps, les Xianbei, qui avaient pris le territoire abandonné par les Xiongnu du Nord, constituèrent une menace pour la dynastie; après une période de guerres destructives pour les uns comme pour les autres, Budugeng, chef des Xianbei, incita la plupart de ses membres à conclure une alliance avec les Han de l'Est.

Pendant les dynasties des Wei et des Jin et celles du Nord et du Sud (220-581), les diverses puissances importantes en Chine se firent une lutte de factions pendant 300 ans, période qui fut marquée par des déplacements de populations, des annexions et des assimilations de grande envergure. Vers la fin de la dynastie des Han de l'Est, des individus de nombreuses ethnies minoritaires franchirent la Grande Muraille pour se mêler aux Han dans les Plaines centrales. La population ainsi formée comprenait des Han pour une moitié et des tribus des Rong et des Kunyi pour l'autre moitié.

Les années qui suivirent la disparition des Jin de l'Ouest (265-316) furent caractérisées par une autre période de fragmentation, 23 puissances locales et sept groupes ethniques émergeant dans la partie septentrionale du pays et au Sichuan; cette période de l'histoire ancienne fut connue comme celle des « Cinq tribus et des Seize États ». À cette époque, les Fuyu et les Yilou vivaient dans le Nord-Est; les Rouran, les Tiele et les Turcs étaient actifs dans le Nord et le Nord-Ouest, et les Tuguhun et les Di vivaient sur le plateau Qinghai-Tibet. Contacts plus étroits et assimilation se produisirent au sein des diverses tribus, conséquence des déplacements de populations dans les Plaines centrales. Un grand nombre de réfugiés de guerre de nationalité han se déplacèrent vers le sud, dans les bassins du Yangtsé et de la rivière des Perles, et vers le nord, au-delà de la Grande Muraille.

À l'époque des dynasties des Sui et des Tang (581-907), la Chine fut réunifiée. On renforça et développa comme jamais auparavant les contacts politiques, économiques et culturels entre les groupes ethniques. Suite à la disparition des Sui (581-618), la dynastie des Tang conquit, en 630, les Turcs de l'Est qui vivaient au nord et au sud du désert du Gobi, et en 657, les Turcs de l'Ouest du Xinjiang actuel et de l'Asie centrale. Les armées des Tang procédèrent ensuite à la conquête des régimes des Gaochang, des Yanqi, des Guizi, des Shule et des Yutian, auparavant alliés des Turcs de l'Ouest. Plus tard, suite à la montée en puissance des Ouïgours sur l'ancien territoire des Turcs, les dirigeants locaux se virent conférer par le gouvernement des Tang les titres de

« Gouverneur de Hanghai » et de « Huairen Khan ».

En 713, le dirigeant de l'État de Zhen, mis en place dans le Nord-Est par les tribus des Sumo et des Mohe, reçut les titres de « Dashing Grand Général de la Garde de gauche » et « Prince de l'État de Bohai du gouvernement des Tang ».

Dans les bassins des fleuves Nenjiang et Heilong, la tribu des Shiwei donna très tôt son allégeance à la cour des Tang. Les Zhao du Sud, une puissance local forte établie dans le territoire de l'actuelle province du Yunnan, forgèrent une alliance avec les Wuman, les Baiman et d'autres tribus, leur chefs se voyant respectivement conférer les titres de « Inspecteur impérial », « Roi du Yunnan » et « Roi des Zhao du Sud ». Vivant dans le Sud-Ouest et le sud de la Chine du Centre, les Li, les Liao, les Wuximan, les Siyuanman et les Moyao relevaient également des préfectures, districts et circuits de la cour des Tang.

Des préfectures et sous-préfectures furent également établies dans la plupart des régions frontalières d'ethnies minoritaires. Les chefs de tribus furent nommés gouverneurs et inspecteurs impériaux, il se virent conférer des postes héréditaires et le pouvoir de diriger en tant qu'autorités locales. Sous la direction des bureaux des gouverneurs, on dressa des listes de recensement et, de manière indépendante, on collecta des taxes aux échelons de la préfecture, de la sous-préfecture et du district, bien au-delà de la juridiction du Trésor central. Un système de 856 préfectures, sous-préfectures et districts était alors en place à la grandeur de la Chine, ce qui força le gouvernement central des Tang à entretenir des liens plus étroits avec les nombreuses nationalités du pays.

Au cours de la période des Cinq Dynasties et des Dix États (907-979), la Chine connut de nouveau une ère de fragmentation qui dura 70 ans. Ces puissances rivales furent principalement mises en place par les Han; les Tang postérieurs furent la seule dynastie créée par des ethnies minoritaires, les Shatuo des Turcs. Parallèlement à ces puissances rivales coexistaient l'État de Qidan (Khitan, par la suite rebaptisé État de Liao), établi par la tribu des Qidan, l'État de Dali, formé par les Baiman et plusieurs autres petits États, ceux des Ouïgours, des Tufan, des Di et des Qiang.

Durant les périodes des Song, des Liao et des Kin (960-1234), on mit un terme aux régimes séparatistes. Les Song (960-1279) prirent de la puissance dans le sud, en opposition directe avec l'État Qidan des Liao (916-1125) et l'État de Kin des Nuzhen (1115-1234) dans le nord. Pendant les Song, les Dangxiang de la tribu Qing mirent en place le régime des Daxia (Xia de l'Ouest, 1032-1227) ce qui entraîna la Chine dans une autre période de 300 ans d'un régime fragmenté.

En 1206, Genghis Khan consolida toutes les tribus mongoles. Sa conquête des États des Gaochang-Ouïgours, des Liao de l'Ouest, des Xia de l'Ouest, des Jin, des Dali et des Tufan forma un empire mongol qui fut renommé en 1271 dynastie des Yuan (1271-1368). En 1279, le pays fut soumis au régime centralisé des Yuan, suite à la chute décisive des Song du Sud (1127-1279). Sous le régime des Yuan, on mis en place des « gouvernements provinciaux » et on leur donna le pouvoir d'administrer les régions où habitaient les ethnies minoritaires: le Nord-Est, la Mongolie intérieure, le Xinjiang, le Guangdong, le Guangxi, le Yunnan et le Guizhou; on établit des départements administratifs spéciaux pour prendre en charge les affaires du Tibet, de Penghu et de Taïwan. De plus, on conféra aux chefs de tribus des postes héréditaires de dirigeants locaux, et ceux-ci furent investis de pouvoirs administratifs permettant de mobiliser les soldats, d'enrôler les travailleurs, de collecter les taxes et les tributs au nom de la cour. Ces mesures placèrent les diverses localités de nationalités minoritaires sous un contrôle du gouvernement central encore plus strict que celles-ci ne l'avaient connu pendant la période des préfectures et des sous-préfectures de l'époque des Song et des Tang.

Des gouvernements provinciaux furent mis en place, lesquels consistaient en administrations mixtes composés d'officiels locaux avec postes héréditaires et d'officiels envoyés par la cour des Yuan. Supérieur à cet échelon, on trouvait des postes remplis par des officiels de la cour, et un contrôle direct était imposé par la cour par l'entremise d'officiels qui étaient ou bien envoyés par le gouvernement central ou recrutés parmi les chefs ethniques.

Durant le règne de la dynastie des Ming (1368-1644), le contrôle centralisé éroda davantage les pouvoirs individuels des chefs de tribus. En renforçant le contrôle des régions frontalières et en pavant la voie de la croissance du commerce entre les divers groupes tribaux, les dirigeants des Ming réussirent à provoquer la chute de l'économie féodale en Chine. Toutefois, dans certaines régions habitées par les minorités, des structures économiques féodales perdurèrent jusqu'à et même au-delà de la Libération en 1949.

En 1616, Nurhachi, un chef tribal des Mandchous, annexa les divers groupes de la tribu des Nuzhen, et, en 1635, il mit en place l'État des « Kin postérieurs » qui furent renommés « Qing » en 1636. Les années qui suivirent la chute de la dynastie des Ming furent le témoin de l'unification plus poussée des diverses nationalités. Dans le nord, les Qing unifièrent les trois groupes mongols: les Mongols du Sud, les Mongols du Nord ( Khalthas) et les Mongols de l'Ouest ( Eleuts ou Qirats), lesquels vivaient respectivement au sud, au nord et à l'ouest du désert du Gobi. En matant les rébellions de la tribu mongole des Jungar, les éléments réactionnaires parmi les Hui (Ouïgours) et les classes supérieures du Tibet qui collaboraient avec les Mongols au Xinjiang et au Tibet, le gouvernement des Qing renforça son contrôle dans ces régions et maintint l'unité au pays.

En repoussant l'invasion de la Russie tsariste, le gouvernement des Qing consolida son contrôle dans le Nord-Est, particulièrement parmi les ethnies minoritaires du bassin du fleuve Heilong. Le gouvernement des Qing mit également en place un gouvernement provincial et des administrations de district sur l'île de Taiwan, établissant ainsi complètement sa souveraineté sur la Chine entière et ramenant tous les peuples formant la nation chinoise sous un régime centralisé.

Bien que le régime autocratique féodal eût apporté peu d'espoir d'éliminer complètement les divisions à l'intérieur de la Chine, la lutte pour l'unification occupa toujours la place centrale. Au cours de l'histoire du pays inscrite dans les registres, les deux tiers du temps furent consacrés à la mise en place et à la préservation de l'unité, alors que le tiers du temps, le pays fut fragmenté. À chaque nouvelle étape vers l'unification, les divers groupes ethniques, de même que leur économie et leur culture, connurent le progrès, ce qui forgea un relation plus étroite entre eux.