Suite à la 30e session du Comité du patrimoine mondial, tenue le 13 juillet à Vilnius, capitale de la Lituanie, les ruines des Yin, situées non loin de la ville d'Anyang, dans la province du Henan, ont été inscrites sur la liste du patrimoine culturel mondial grâce au consentement unanime des représentants des 21 pays membres. Les ruines des Yin ou Yinxu en chinois sont le trente-troisième site chinois inscrit sur cette liste du patrimoine mondial.
Les ruines des Yin, témoin d'une civilisation millénaire
Les ruines des Yin, sur les deux rives sud et nord de la rivière Huanhe, sont situées sur l'emplacement de la ville capitale de la dynastie des Shang lors de ses dernières décennies, près du village de Xiaotun, au nord-ouest de la ville d'Anyang. Datant de plus de 3 300 ans et couvrant 24 km2,c'est l'emplacement de la plus ancienne des villes mentionnées dans les annales de Chine. Les archéologues y ont trouvé les ruines de palais, de temples, de tombeaux de la famille royale, de résidences, de cimetières familiaux, des caves à os et carapaces de tortue et des ateliers d'artisanat comme ceux de moulage du bronze, de fabrication des jades et des objets en os. Depuis un siècle, 150 000 pièces d'os ou carapaces de tortues portant des inscriptions, 10 000 bronzes ainsi que divers types d'objets en pierre, jades, poteries et os y ont été déterrés.
Avant leur inscription sur la liste du patrimoine mondial, les ruines des Yin avaient déjà attiré l'intérêt de nombreux chercheurs chinois prestigieux. “Les inscriptions sur os ou carapaces de tortue sont les formes originaires des caractères chinois, qui sont maintenant employés par un quart de la population du monde,” a commenté le professeur Li Boqian de l'université de Beijing, “C'est le seul des quatre types de pictogrammes antiques du monde qui soit encore en usage de nos jours.”
Xu Guangde, chercheur de l'Institut d'archéologie de l'Académie des sciences sociales de Chine, a souligné que les inscriptions sur os ou carapaces de tortue étaient non seulement un symbole de culture et civilisation, mais témoignaient également de l'authenticité d'une série de documents historiques, y compris « les Mémoires historiques » de Sima Qian. Ainsi, l'histoire de la civilisation chinoise léguée par les écritures remonte à environ cinq siècles auparavant.
Les ruines des Yin prouvent que la culture chinoise était déjà assez développée sous les Shang et que les bronzes connurent un âge d'or à cette époque en Chine. “Un grand nombre de bronzes finement travaillés découverts dans les ruines des Yin sont tout à fait uniques au monde.” a dit Du Jinpeng, directeur du Bureau des dynasties des Shang et Zhou de l'Institut d'archéologie de l'Académie des sciences sociales de Chine. Les bronzes comprennent des vases rituels, des instruments musicaux, des armes et des outils. Certains ont été détruits, mais la plupart de ces objets sont conservés dans de grands musées en Chine et à l'étranger. Quelques traditions chinoises uniques tirent également leur origine des ruines des Yin, par exemple la règle de symétrie autour d'un axe central dans la planification de la ville, observée depuis 3 000 ans en Chine.
Depuis 70 ans, plus de 8 000 tombeaux ont été découverts, y compris les sépulcres de la famille royale et les cimetières des clans. On peut identifier la qualité et la position sociale de l'occupant du tombeau par la forme de ce dernier, sa taille, les matériaux utilisés lors de sa construction ainsi que le nombre et la qualité des objets funéraires. Les ruines des Yin ont été classées premières parmi les 100 grandes découvertes archéologiques de la Chine au XXe siècle par un jury composé par plus de 40 organismes archéologiques prestigieux.
Liu Qingzhu, directeur de l'Institut d'archéologie de l'Académie des sciences sociales de Chine explique que la découverte des ruines des Yin jouera un rôle important dans la poursuite des recherches sur la préhistoire et l'histoire antique chinoise. Le Conseil international des vestiges anciens estime que l'intérêt des ruines des Yin pourrait égaler celui des ruines des civilisations antiques d'Egypte, de Babylone et d'Inde.
Préservation des ruines des Yin en l'état initial
Zhang Ailan, directrice du Bureau des vestiges culturels de la province du Henan, indique : “Nous faisons sans cesse des efforts pour protéger l'intégrité et l'authenticité des ruines des Yin. Outre les villages et les chemins naturellement formés au cours de l'histoire, nous gardons seulement les champs et les espaces verts dans la zone protégée, si bien que les ruines des Yin et leurs environs ont pu conserver leurs aspects historiques.”
Il y a environ 100 ans, Wang Yirong, un lettré du troisième grade de la dynastie des Qing (1644-1911) a trouvé des inscriptions sur os ou carapaces de tortue dans le village de Xiaotun près d'Anyang. Ce fait, signalé dans les livres d'histoire, a modifié le destin de ce village semblable aux autres. A la fin du XXe siècle, Xiaotun était prospère avec cinq ou six usines dans l'ouest, une industrie d'élevage au centre et des pépinières dans l'est. En avril 2001, la candidature à l'inscription des ruines de Yin sur la liste du patrimoine mondial était déposée. Dès lors, les usines ont commencé à être déplacées, les entreprises d'élevage fermées, les deux tiers des champs loués par le gouvernement et 76 foyers ont déménagé dans une nouvelle zone à un kilomètre plus loin de Xiaotun.
Présentation innovante
Après que la mairie d'Anyang ait inscrit des ruines des Yin sur la liste des candidats à l'inscription au patrimoine mondial, le personnel du Bureau d'Etat des musées et des découvertes archéologiques, de l'Institut d'archéologie de l'Académie des sciences sociales de Chine et des Bureaux des reliques culturelles de la province du Henan et de la ville d'Anyang a commencé à reconstituer et préserver l'emplacement pour mieux présenter ce site au monde.
Ils ont reconstitué le mode de présentation original pour se conformer aux normes internationales qui exigent que la périphérie du site soit d'un aspect similaire à son état initial. Ils ont adopté sept nouvelles méthodes, dont la remise en état des vestiges, le repère des emplacements des palais, des temples, des tombeaux et des lieux de découverte des os et carapaces de tortue aux inscriptions avec des pierres, des plantes, du bois ou des panneaux de verre, de sorte que les ruines puissent être clairement vues par les visiteurs.
“Nous respectons toujours la science et les exigences techniques de diverses disciplines pendant la protection et la présentation.” indique Li Yangsheng. “Nos méthodes innovatrices de protection et de présentation de l'emplacement ont été reconnues et appréciées par les experts du Comité du patrimoine mondial.”
China Pictorial
2006/10/11 |