Zheng He (1371-1434) dirigea par sept fois une flotte chinoise pour voyager dans l'« océan de l'Ouest ». Depuis longtemps, un certain nombre d'érudits étrangers affirment, en se basant sur les quatre caractères contenus dans « la Biographie de Zheng He » de « l'Histoire de la dynastie des Ming », que ses voyages maritimes avaient une intention agressive, ces quatre caractères signifiant « faire étalage de la force des armes (des Ming) aux pays étrangers ». Cependant, la récente découverte à la Bibliothèque de Nanjing de la copie du manuscrit écrit par Wan Sitong, historien du début de la dynastie des Qing, vient infirmer la base bibliographique de ces savants étrangers. Dans le manuscrit, il est écrit : « faire étalage de la puissance (des Ming) aux pays étrangers ».
Les manuscrits de l'« Histoire de la dynastie des Ming », conservés dans la Section des manuscrits de la Bibliothèque de Nanjing, chef-lieu de la province du Jiangsu et ancienne capitale de la dynastie des Ming avant le règne de Zhu Di, ont toujours servi de base à la rédaction de l'« Histoire de la dynastie des Ming ». Le professeur Pan Jun de l'Université de Nanjing, spécialiste de l'histoire des Ming, est le premier savant chinois à avoir utilisé ces manuscrits.
Selon M. Pan, le gouvernement Qing a mis un siècle, soit de 1645 à 1739, pour rédiger et publier l' « Histoire de la dynastie des Ming ». Etant donné que l'autocratie culturelle était des plus redoutables sous les Qing, tout ce qui leur était défavorable dans les manuscrits de l'« Histoire de la dynastie des Ming » fut supprimé. Par conséquent, l'« Histoire de la dynastie des Ming » n'a pas de grande valeur aux yeux des historiens, au contraire les manuscrits revêtent une grande valeur.
Le manuscrit de Wan Sitong, en 12 volumes, fut écrit sur de grands bouts de soie. On y voit des rangs serrés de petits caractères tracés au pinceau en noir ou en rouge. On peut distinguer des rajouts, des rayures et des corrections par différents styles d'écriture, ce qui montre que plusieurs historiens l'avaient lu. Il s'agit des biographies des personnalités célèbres de la dynastie des Ming. Dans la biographie de Zheng He, au volume 6, on peut lire que Zheng He effectua ces voyages maritimes dans le but de « faire étalage de la puissance (des Ming) aux pays étrangers ». Ces mots étaient accompagnés d'une note disant « propager la culture et les enseignements de la Chine afin de faire entendre la voix du Fils du ciel ». Cela correspond parfaitement au texte écrit par l'empereur Chengzu (qui régna de 1403-1424 ) de la dynastie des Ming et gravé sur une stèle conservée au temple de la Mer tranquille (Jinghai si). Dans ce texte, il est écrit que les voyages maritimes de Zheng He dans l'« océan de l'Ouest » visaient à « envoyer un émissaire à des pays étrangers afin de leur faire connaître notre culture et nos enseignements, leur apprendre nos cérémonies et faire changer leurs usages ».
Mais, comment le mot « puissance » du manuscrit a été remplacé par le mot « force des armes » dans l'« Histoire de la dynastie des Ming » ?
Après des recherches, le professeur Pan a conclu qu'il s'agissait d'une modification mal placée au cours de la rédaction. En se mettant à rédiger l'histoire de la dynastie des Ming, en l'an 2 du règne Shunzhi (1645), le gouvernement Qing réquisitionna la participation de Huang Zongxi, célèbre érudit à la charnière des deux dynasties. Bien qu'il ne voulût pas collaborer avec la nouvelle dynastie, cet ancien haut fonctionnaire de la dynastie des Ming ne put pas refuser l'édit impérial. Il trouva finalement un expédient, en envoyant son élève Wan Sitong travailler à sa place. Conformément aux instructions de son maître, Wan rédigea ses textes en se basant sur les documents secrets de la cour intérieure des Ming et les notifications. Ses manuscrits comportent quantité d'archives de l'époque Ming. Ils sont d'une grande valeur et d'une authenticité historique indéniable.
Wang Hongshu corrigea ces manuscrits pour compiler 20 volumes des « Biographies de l'histoire de la dynastie des Ming » et les signa par son nom en les offrant à l'empereur Kangxi (règne :1662-1723 ). Pour se soustraire à la mauvaise réputation de « copieur », il remplaça « faire étalage de la puissance (des Ming) aux pays étrangers » par « faire étalage de la force des armes (des Ming) aux pays étrangers » et supprima la note : « propager la culture et les enseignements de la Chine afin de faire entendre la voix du Fils du ciel ». Sous le règne de l'empereur Qianlong, Zhang Tingyu, chargé des textes définitifs de l' « Histoire de la dynastie des Ming », ne s'aperçut pas de l'erreur de Wang et ne la corrigea donc pas.
Après avoir terminé ses manuscrits, Wan Sitong ramena en secret l'ébauche chez lui, au Zhejiang. Au début de la République de Chine, M. Zhou en fit l'acquisition. Il alla à Nanjing pour demander au gouvernement national d'acheter l'ébauche. Celui-ci confia à Zheng Hesheng, spécialiste des recherches sur Zheng He et fonctionnaire du ministère de l'Education, la tâche d'en vérifier l'authenticité. Sachant qu'il n'était pas à la hauteur de la tâche, Zheng se rendit à la Bibliothèque de Nanjing pour demander l'aide à son président Liu Yizhen, un historien de renom. Celui-ci eut une vive joie de constater qu'il s'agissait du manuscrit de Wan Sitong. Il rassembla immédiatement ses collègues pour le copier. Ainsi la Bibliothèque de Nanjing en conserve une copie. Le gouvernement national qui n'avait pas un budget suffisant ne l'avait pas acheté. Le professeur Pan a dit qu'il avait entendu parler d'un manuscrit conservé à la Bibliothèque Tianyige de Ningbo, au Zhejiang. Mais il ne l'a pas vu…
China.org.cn
2005/04/14
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