Sur les tableaux de la Chine antique, se trouvent non seulement la dédicace et le sceau du peintre mais aussi ceux du collectionneur. Il existe, en Chine, un tableau portant d'innombrables dédicaces et sceaux, ce qui montre qu'il a été conservé par un grand nombre de collectionneurs, officiels ou non. Il s'agit de Sur la rivière Bian, le jour de Qingming, peint il y a 800 à 900 ans. Certains collectionneurs se sont sacrifiés pour sa conservation.
L'auteur du tableau s'appelle Zhang Zeduan ou Zhang Zhengdao, né à Dongwu (aujourd'hui Zhucheng) dans le Shandong sous la dynastie des Song du Nord. Il a commencé à étudier dès l'enfance puis s'est initié à la peinture. Admis par le Studio impérial, il est devenu peintre professionnel et académicien. Fort à dessiner des "foires, ponts, bateaux, véhicules, cités et voies", il a créé parmi d'autres Sur la rivière Bian, le jour de Qingming qui, considéré comme l'un des chefs-d'oeuvre de la peinture chinoise, l'a immortalisé malgré le peu de renseignements sur lui dans les documents historiques.
Ce tableau, en couleurs peint sur un rouleau de soie de 24,8 cm de large et de 528 cm de long, présente l'animation et la prospérité de Bianjing, capitale des Song du Nord, à l'occasion du jour de Qingming (Fête des morts, vers le 5 avril). A l'époque, le peuple avait la tradition d'aller se promener et commercer le jour de Qingming au bord d'une rivière. Ce grand tableau bien agencé présente trois composantes: le paysage de la banlieue, la rivière Bian, la ville.
Le tableau présente d'abord le paysage de la banlieue de Bianjing: des paysans travaillent aux champs; des riches viennent de se recueillir sur les tombes des parents; des bêtes de somme, des porteurs, des personnages à cheval ou en palanquin se dirigent vers la ville. Ensuite, c'est la rivière Bian, la partie la plus belle: une foule de gens passe par un pont en arc, par-dessous lequel des bateaux se croisent. Le dessin y est détaillé et intéressant: près du pont, un cheval a fait un écart, ce qui a terrifié un âne et provoqué l'attention des badauds. La dernière partie du tableau présente la ville de Bianjing, centre politique, économique et culturel du pays: résidences officielles, habitations populaires, ateliers, boutiques, maisons de thé, restaurants, ... animés par une circulation intense. Par rapport à la partie précédente, celle-ci donne plutôt une impression de sérénité, ce qui offre un contraste intéressant et insère une variation de rythme. Grâce à la présentation de l'architecture, du commerce, des communications et des transports, le peintre a fait revivre la prospérité de la capitale des Song du Nord.
Le tableau compte quelque 550 personnages, une soixantaine d'animaux, une vingtaine de bateaux, une trentaine de constructions et une vingtaine de véhicules et de palanquins. Il est difficile de trouver un autre tableau au contenu aussi riche et varié. Ce qui est de plus admirable, c'est que tous ces personnages et détails sont composés de manière unique grâce à la haute perspicacité de l'auteur sur la vie sociale et à son excellente maîtrise artistique.
Ce trésor artistique a aussi une précieuse valeur historique en ce qu'il est riche de renseignements concrets sur le commerce, l'artisanat, le folklore, l'architecture et les moyens de transport de la capitale des Song du Nord.
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