La quatrième version de la Constitution de la République populaire de Chine depuis 1949 sera révisée pour la quatrième fois au cours de la prochaine session de l'Assemblée populaire nationale (APN) dont le Comité permanent proposera l'amendement et le soumettra à la discussion de la deuxième session de la Xe APN en mars. La révision concerne 14 articles de la Constitution.
En décembre 2003, le Comité permanent de l'APN a reçu la proposition du Comité central du Parti communiste de Chine (PCC) de réviser certaines parties de la Constitution. Selon la procédure officielle, le Comité permanent de l'APN proposera un amendement constitutionnel qu'il soumettra aux délibérations en mars. Ce sera la quatrième révision de la version de 1982 de la Constitution.
Des points importants
Le Pr Xu Xianming de l'université de Sciences politiques et de Droit de Chine a dit qu'avec des concepts comme la « triple représentativité », la civilisation politique et les droits humains s'ajoutant à la Constitution, les valeurs nationales vont changer.
Avec l'importante pensée de la « triple représentativité » dans la Constitution, les exigences pour le PCC deviennent plus précises, a dit Xu, et le PCC peut affermir sa position comme parti dirigeant ; un manquement à l'une des trois « représentativités » pourrait le mener à la perte du pouvoir. Aussi, le peuple a-t-il ainsi de nouveaux critères pour juger le Parti.
La « triple représentativité » avancée par Jiang Zemin, ex-secrétaire général du CC du PCC, en février 2000, déclare que « le PCC doit toujours représenter les exigences du développement des forces productives progressistes, l'orientation du progrès de la culture chinoise avancée et les intérêts fondamentaux de l'écrasante majorité de la population de la Chine. »
En même temps, l'ajout du concept des « droits humains » à la Constitution indique que ces droits sont devenus une valeur d'État. Ce changement est considéré comme historique et deviendra le critère fondamental du travail des institutions gouvernementales. Parallèlement, les concepts populaires et les systèmes d'État concernés, y compris les directives de la législation, changeront, et ce changement clarifiera les objectifs de l'administration du parti au pouvoir.
Selon Xu Chongde, professeur de Constitution à l'université Renmin, il y a cinq points remarquables dans la révision de la Constitution.
- L'importante pensée de la « triple représentativité » est l'héritage du marxisme-léninisme, de la pensée de Mao Zedong et de la théorie de Deng Xiaoping. Par conséquent, il est nécessaire de l'insérer dans la Constitution comme principe guide auquel l'État doit adhérer pour un développement à long terme.
- Le rapport du XVIe Congrès du PCC tenu en novembre 2002 stipule explicitement que les nouvelles strates émergeant de l'évolution sociale sont aussi des constructeurs du socialisme aux caractéristiques chinoises. L'ajout de cet esprit à la Constitution indique que le pouvoir d'État est plus solide et que la coalition de la dictature démocratique du peuple est plus large.
- Les trois « civilisations », notamment matérielle, spirituelle et politique, s'ajoutent à la Constitution, indiquant que pousser de l'avant les trois « civilisations » en coordination constitue une tâche majeure de l'État.
- La révision clarifie la protection de la propriété privée sous l'angle des droits de la personne, du droit de propriété privée et de la propriété individuelle.
- Le concept des « droits humains » inclus dans la Constitution est sans précédent.
Pourquoi l'amendement ?
Wang Zhaoguo, membre du Bureau politique du CC du PCC, a expliqué la proposition de révision constitutionnelle du CC du PCC, disant que le principe général résidait dans l'insertion dans la Constitution des importantes théories et lignes de conduite déterminées au XVIe Congrès national du PCC et à la lumière du marxisme-léninisme, de la pensée de Mao Zedong, la théorie de Deng Xiaoping et l'importante pensée de la « triple représentativité » et dans un effort d'application de l'esprit du XVIe Congrès du PCC et de démonstration de l'expérience acquise depuis la IVe Session plénière du XIIIe CC du PCC en juin 1989. Basée sur ce principe, la révision est partielle. Seuls les points mûrs et dont la nécessité est évidente sont ajoutés, tandis que ceux qui peuvent être interprétés à travers le texte actuel demeurent inchangés.
Wang a dit que la révision est très significative dans la vie politique du pays et le CC du PCC y a attaché une grande importance. Le 27 mars 2003, le Comité permanent du Bureau politique du CC du PCC a tenu une rencontre pour discuter et assigner le travail concernant la révision. Il a aussi déterminé le principe général de la révision et établi une équipe spéciale pour s'en charger. Il a fallu plus de six mois pour formuler la proposition, après avoir entendu les opinions de tous les milieux afin de faire jouer pleinement son rôle à la démocratie sous le leadership direct de ce Comité permanent.
Selon des membres du Comité permanent de l'APN, au cours des deux dernières décennies, la Constitution actuelle est demeurée la même tout en s'améliorant en pratique. Elle a joué un grand rôle dans la réforme, l'ouverture et la modernisation socialiste, de même que dans le développement de la politique démocratique et socialiste, du processus de gouvernement du pays selon la loi et de l'effort de faire de la Chine un pays socialiste gouverné par la loi, et dans la sauvegarde des intérêts fondamentaux des masses populaires. Depuis le XVe Congrès national du PCC en septembre 1997, par des efforts concertés du Parti et du peuple du pays entier, la Chine a réalisé des progrès historiques de réforme, ouverture et modernisation. Durant cette période, les expériences précieuses se sont accumulées et méritent d'être consignées dans la loi de base de l'État.
La proposition longuement discutée, mûrie et documentée, intègre les aspirations du Parti et le vœu du peuple, et personnifie la sagesse collective du parti et du peuple entier de ce pays. La révision aidera à renforcer et améliorer le leadership du Parti, mettra en valeur les avantages du régime socialiste et mobilisera l'initiative des masses. Elle aidera aussi à sauvegarder l'unité nationale et ethnique et la stabilité et favorisera de développement économique et le progrès social global.
Procédure et débats
La sollicitation d'opinions en vue de la révision de la Constitution a commencé en mars 2003. Avant mars, le Bureau général du CC du PCC avait formé à cet effet une équipe de spécialistes. De plus, le Comité légal de l'APN et les départements concernés ont vu aux préliminaires, tandis que l'Académie des sciences sociales de Chine (ASSC) a demandé à des spécialistes de préparer un rapport de recherche sur la révision. L'université de Sciences politiques et de Droit, l'université Renmin et d'autres institutions de haut savoir ont aussi procédé à la recherche.
Le 6 juin 2003, le président de l'APN, Wu Bangguo, a présidé un séminaire auquel participaient des experts en droit et des économistes comme Wu Jinglian, Jiang Ping, Ying Songnian et Xu Chongde.
Un CC du PCC tenu à son siège de Zhongnanhai a suivi du 26 au 28 août. Les comités centraux de tous les partis démocratiques (partis politiques qui reconnaissent le leadership du PCC et travaillent en collaboration avec ce dernier), les dirigeants de la Fédération nationale de l'industrie et du Commerce, et des personnes sans affiliation de parti ont exprimé leurs opinions et suggestions sur la Décision du CC du PCC sur l'amélioration du système d'économie de marché socialiste et sur la Proposition de révision partielle de la Constitution.
En octobre 2003, après la troisième session plénière du XVIe CC du PCC, le travail concernant la révision a été transféré à l'APN.
Pendant la sollicitation d'opinions, les experts discutaient de la nécessité de la révision et du contenu à revoir. Certains étaient contre l'amendement, soutenant que la Constitution devait demeurer stable. La Chine avait déjà revu trois fois la Constitution adoptée en 1982.
Mais selon Xu Chongde, « la Chine a ses propres raisons de réviser sa Constitution plus souvent que les pays occidentaux. »
D'autres demandent une restructuration fondamentale, comme en 1975, 1978 et 1982, disant que la Constitution ne reflète pas la réalité de la société chinoise.
D'autres encore, comme Xu Chongde, penchent pour une révision partielle, qui réponde à la fois à la nécessité d'amendement et à la stabilité de l'ensemble. La société chinoise se développe rapidement et certains points de la Constitution, comme loi de base, n'ont pas suivi le développement social.
Les experts divergent d'opinion quant au contenu à réviser. Par exemple, certains membres de la Conférence consultative politique du peuple chinois soutiennent fortement l'idée d'insérer la propriété privée dans la Constitution, tandis que Yu Quanyu, de l'ASSC, s'y oppose avec véhémence. Pour lui, le concept d'« inviolabilité de la propriété privée » est désuet et la propriété privée n'est pas absolument inviolable.
Yu a dit : « J'ai consulté la Constitution d'une bonne dizaine de pays comme le Japon, l'Italie, l'ex-Allemagne de l'Ouest et l'Inde. Elles sont semblables sur trois points concernant les droits de propriété. D'abord, la propriété privée doit être protégée mais elle n'est pas inviolable ; ensuite, leurs Constitutions établissent des limites, avançant que la propriété privée doit être sujette aux intérêts publics ou du moins ne pas leur nuire. Enfin, en cas de besoin, le gouvernement peut, selon la loi, exproprier avec compensation. »
Certaines personnes se sont exprimées sur la protection des biens légitimes. Yang Weichang, vice-président de l'Association nationale des avocats de Chine a souligné : « Il est vrai qu'il existe des problèmes pour le moment. Par exemple, certains transfèrent leurs capitaux outre-mer, puis les rapportent en Chine comme capitaux étrangers. Cela étant, la définition de la propriété privée doit précéder la protection accordée par la loi. »
Le Pr Li Buyun de l'Institut de droit de l'ASSC a noté que le CC du PCC fait bien d'être prudent en « révisant les points d'importance majeure et laissant de côté les moins significatifs. » Il serait difficile de revoir plusieurs endroits en même temps car il faut du temps pour obtenir le consensus sur chaque sujet.
Il a dit qu'en Chine, le Parti au pouvoir revoit habituellement la Constitution après une réunion d'importance. Si certains se plaignent que les révisions sont trop fréquentes, il soutient qu'elles sont importantes pour deux raisons. D'abord, la Chine a ses propres caractéristiques et implante lentement la démocratie. Ensuite, en Occident, les partis au pouvoir inscrivent aussi leur programme dans la Constitution. Pendant le processus de révision de la loi, surtout la Constitution, le principe de législation démocratique doit être observé.
Actualiser la Constitution
Selon Xu Chongde, la révision de la Constitution vise à l'actualiser. Il a rappelé que le thème principal du XVIe Congrès était de « bâtir une société d'aisance générale et créer une nouvelle situation de construction du socialisme aux caractéristiques chinoises ». À travers la révision, les innovations théoriques et les directives stratégiques mises de l'avant au XVIe Congrès se reflètent dans la Constitution.
SelonYang Jingyu, expert en droit et membre du Comité permanent de l'APN, la Constitution se doit de conserver la stabilité, condition de la stabilité politique. C'est pourquoi il faut prendre des précautions dans sa révision. Ce n'est pas comme réviser les autres lois.
La Constitution stipule que les amendements soient proposés par le Comité permanent de l'APN ou par le cinquième des députés à l'APN et adoptés par vote de plus des deux tiers de tous les députés de l'APN.
Quel principe adopter ? En 1987, quand on discutait de la révision de la Constitution, deux principes ont été établis. Premièrement, la réforme doit respecter la loi et la loi doit servir la réforme ; deuxièmement, la révision se limite aux articles qui nuiraient à la réforme s'ils n'étaient pas changés et les articles moins significatifs doivent rester tels quels, et certains problèmes peuvent être résolus par l'interprétation de la Constitution. Ce faisant, on maintient la stabilité de la Constitution et du pays.
Toutes les révisions suivent le même principe et adoptent la forme de l'amendement, selon Yang. Les trois amendements antérieurs constituent 17 articles, dont 15 portent sur le Préambule et les Principes généraux. Le contenu est le suivant.
Établir la fonction de guide de la théorie de Deng Xiaoping dans la vie politique et sociale du pays ;
Déclarer clairement que la Chine demeurera encore longtemps au stade primaire du socialisme ;
Confirmer la mesure de base de réforme et d'ouverture, laquelle complète la déclaration des directives du PCC au stade primaire du socialisme dans la Constitution ;
Améliorer le système économique de base de la Chine (avec la propriété publique comme secteur dominant et diverses formes de propriété se développant côte à côte) et le système de distribution (la distribution selon le travail domine et divers modes de distribution coexistent) au stade primaire du socialisme ;
Déterminer que les organisations économiques rurales doivent adopter un système de fonctionnement double, sur la base du système de contrat familial et combinant la centralisation et la décentralisation ;
Définir le statut légal des secteurs économiques non publics ;
Déterminer que l'État adopte une économie de marché socialiste ;
Déterminer la stratégie de base qui consiste à gouverner le pays selon la loi et à faire de la Chine un pays socialiste gouverné par la loi ;
Déterminer que la coopération multipartite sous le leadership du PCC et le système consultatif politique continueront d'exister et de se développer pendant longtemps.
Tous ce amendements apportés à la Constitution portent sur des points touchant le développement du pays et la stabilité politique à long terme. Ils reflètent non seulement l'auto-amélioration et le développement du système politique socialiste de la Chine et du système économique socialiste, mais aussi une plus profonde compréhension de la part du Parti et du peuple de ce qu'est le socialisme et de comment le construire. Grâce à ces révisions, la Constitution s'est complétée et peut mieux rencontrer les exigences de la réforme et de l'ouverture, de même que de la modernisation socialiste. Ainsi, les révisions n'ont pas affecté la stabilité ni miné l'autorité et le sens sacré de la Constitution.
Le XVIe Congrès du PCC a fait une analyse étendue de la nouvelle situation et des tâches auxquelles font face la Parti et le pays, et a établi les objectifs et mesures des vingt premières années de ce siècle. Par conséquent, la proposition de réviser certains points de la Constitution est nécessaire et opportune.
China.org.cn
2004/02/26
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