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Les relations sino-françaises en plein changement en 2021 (Tribune)

French.china.org.cn | Mis à jour le 15. 12. 2021 | Mots clés : relations sino-françaises

Par Zheng Ruolin, chercheur supérieur à l’Institut Taihe

Les relations sino-françaises s’inscrivent aujourd’hui dans un schéma international en profonde mutation. Le « changement » est devenu le mot clé des relations bilatérales sino-françaises. Les changements dans le domaine des relations internationales sont clairs, les changements dans les relations entre la Chine et la France sont moins évidents. Ce n'est qu'en comprenant le mot « changement » que l'on peut essayer d’appréhender les tendances de développement des relations sino-françaises.

L’attitude changeante envers la Chine existe dans de nombreux gouvernements occidentaux, ce qui est lié évidemment avec la conjoncture internationale elle-même en mutation. Pour la France, la Chine deviendra la plus grande économie du monde vers 2050, et elle sera la plus grande bénéficiaire du nouvel ordre économique mondial, avec le sous-entendu suivant : la Chine pèsera énormément dans les relations diplomatiques de la France. Le « changement » des relations sino-françaises repose précisément sur ce contexte. 

En France, certains prônent qu’il serait dans l’intérêt de la France de renforcer le cadre officiel des relations de coopération stratégique entre les deux pays. Le président américain Joe Biden a lui déclaré après son élection que « les États-Unis sont de retour » et a exhorté l'Occident à établir un « front uni » contre la Chine. Les États-Unis et la Chine, autrefois concurrents, sont devenus des adversaires. Face à cette situation, la France n'a pas encore fait de déclaration claire sur sa position. Il est pourtant à noter que François Lecointre, chef d'état-major des armées françaises, a déclaré dans une interview accordée au journal Le Figaro que la France ne devait pas se laisser entraîner dans une éventuelle confrontation entre les États-Unis et la Chine. Le président français Emmanuel Macron a également indiqué à la veille du sommet de l'OTAN que la Chine n'était pas un « ennemi » de l'OTAN.

Les relations entre pays occidentaux sont aussi « en train de changer ». La relation entre les États-Unis et la France s'est détériorée en raison de l'incident des sous-marins australiens. Le président Macron a insisté, depuis le mandat de Donald Trump, sur le renforcement de la puissance militaire de l'Union européenne (UE). On est ainsi tenté de se demander si le gouvernement français, en particulier le président français, considérera la politique nationale envers la Chine d'une manière plus positive. En effet, les chefs d'État chinois et français ont maintenu des échanges continus cette année. Lors de leur conversation téléphonique qui a eu lieu le 26 octobre, MM. Xi et Macron ont convenu de renforcer la coopération dans des domaines tels que le changement climatique, la lutte contre le COVID-19 ainsi que le commerce.

L’on constate également des changements au sein du gouvernement français. En mars, l'ambassadeur de Chine en France, Lu Shaye, a critiqué sur le compte Twitter de l'ambassade un chercheur français à l’égard de ses propos sur Taïwan. Jean-Yves Le Drian a annoncé le 22 mars qu'il souhaitait convoquer l’ambassadeur chinois, une démarche qui ne représente pas nécessairement l’intérêt de l’Élysée. À cette convocation, l'ambassade chinois a apporté une réponse directe le même jour : « En raison de son calendrier, l'ambassadeur Lu Shaye ne se rendra pas au ministère français des Affaires étrangères aujourd'hui (le 22 mars) ». 

Ce genre de changements se retrouve également dans le milieu militaire. Le Japon a organisé en mai un exercice militaire conjoint avec des forces américaines et françaises dans le sud-ouest du pays. Des navires de guerre français ont croisé à cette occasion en mer de Chine méridionale. Autre exemple : l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (IRSEM) a publié en septembre un rapport décrivant la Chine comme une « menace » pour l’Occident. 

La position de certains parlementaires français a également changé. Le président du « groupe d’amitié France-Taïwan » du Sénat, Alain Richard, a conduit en octobre une délégation à Taïwan, et ce malgré les protestations répétées de la partie continentale de Chine, faisant écho aux intentions américaines visant à soutenir les forces séparatistes taïwanaises. Une conduite plutôt rare par le passé. 

Il en va de même dans les milieux médiatique et académique, où l’on ressent une ambiance de « quasi-Guerre froide ». L'opinion publique française a aujourd’hui une perception de la Chine qui est négative, peut-être la pire de l’histoire. Critiquer la Chine est aujourd’hui « politiquement correct ». Il y a de moins en moins de journalistes et d'universitaires qui osent faire l’éloge de la Chine. Le Figaro, autrefois considéré comme un média de droite, affichait une position relativement positive envers la Chine, mais a publié en octobre un article de Sébastien Falletti affirmant que si la Chine prenait le contrôle de Taïwan, ce serait la « victoire de l'autocratie sur la démocratie » et un « événement majeur » de la géopolitique mondiale, ajoutant que cela déclencherait la « troisième Guerre mondiale ». Selon ce journaliste, la France doit rester dans le camp luttant contre « l'agression de Taïwan » par la Chine. 

Heureusement, un certain nombre d’intellectuels, dont notamment l'écrivain Maxime Vivas, se battent actuellement pour le droit de discuter objectivement de la Chine. Leurs voix contribueront à diversifier les opinons. Maxime Vivas a récemment lancé une pétition en ligne, appelant à une vision objective de la Chine. Plus de 2000 personnes de différents domaines à travers le monde, dont des professeurs, des écrivains et des journalistes, ont signé la pétition, bien que le lien pour la pétition était plus tard indisponible. 

En réalité, un certain nombre de politiciens ont toujours le courage de défendre la Chine sur divers dossiers. Par exemple, le candidat français à la présidentielle de 2022 Jean-Luc Mélenchon, qui a voté contre la résolution de Taïwan à l'Assemblée nationale, a souligné que Taïwan n'était pas un pays mais une partie de la Chine. En 2008, lors des Jeux olympiques de Beijing, il avait également écrit un article critiquant les revendications du dalaï lama appelant à l'indépendance du Tibet.

Les relations sino-françaises se trouvent dans un état de changement parce que, d'une part, la situation politique et économique intérieure de la France est elle-même en mutation, d’où le changement de politique envers la Chine. D'autre part, la Chine et la France font partie d’un monde qui connaît actuellement des changements majeurs. Le « changement » est par conséquent devenu le mot clé des relations mutuelles de nos deux pays.

Malgré des difficultés, les relations sino-françaises ont conservé un ton relativement positif dans certains aspects. Les élections présidentielles françaises auront lieu l’an prochain. De nombreux facteurs, notamment les relations sino-américaines, les relations sino-européennes et les relations américano-européennes, impacteront l’avenir de la France. Une chose est sûre, peu importe qui est élu, les changements dans les relations sino-françaises se poursuivront pendant encore longtemps.

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Source:french.china.org.cn