Envoyer [A A]

La lutte contre l’islam radical en France provoque des conflits diplomatiques

French.china.org.cn | Mis à jour le 30. 10. 2020 | Mots clés : France,islam radical

Des attaques au couteau ont eu lieu dans la basilique Notre-Dame de Nice jeudi 29 octobre, faisant au moins trois morts et plusieurs blessés. Selon l’Agence France-Presse, l’agresseur, un jeune Tunisien, a été appréhendé par la police. Il y a 13 jours à peine, un enseignant avait été décapité près de Paris, une attaque qui avait choqué tout le pays. Le gouvernement français a annoncé une série de mesures fortes pour combattre l’extrémisme islamiste rampant. Une décision qui a suscité un fort mécontentement dans les pays islamiques, la Turquie en tête, provoquant un grave conflit diplomatique entre les deux pays. 

Le président français Emmanuel Macron a souligné après la tragédie du 16 octobre que le gouvernement intensifierait ses opérations de lutte contre l’extrémisme islamiste. Le pays a pris des mesures appropriées. Ainsi, le 19, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a annoncé que 231 étrangers en France fichés S seront expulsés et que la Grande mosquée de Pantin sera temporairement fermée pendant six mois. Le 20, le premier ministre Jean Castex a déclaré à l’Assemblée nationale qu’il renforcerait la surveillance de l’extrémisme islamiste sur les réseaux sociaux. Après la tragédie de jeudi, le gouvernement français a relevé le niveau d’alerte antiterroriste au maximum. Le président Macron a déclaré qu’il déploierait immédiatement des soldats supplémentaires pour protéger écoles et sites religieux, faisant passer les effectifs actuels de 3 000 à 7 000.

Hormis les doutes soulevés par certaines personnalités islamiques, les mesures du gouvernement français ont été généralement bien accueillies par la population et l’opinion publique. Les responsables turcs ont néanmoins vivement réagi, le président turc Recep Tayyip Erdoğan ayant publiquement condamné le 24 octobre le traitement réservé par Macron aux musulmans et a mis en doute la santé mentale du président français. M. Macron n’a montré aucune faiblesse devant ce manque d’étiquette diplomatique et a immédiatement rappelé l’ambassadeur de France en Turquie en guise de protestation. En réponse, M. Erdoğan a appelé les Turcs au boycott des produits français.

L’approche de M. Macron a également suscité le mécontentement dans d’autres pays islamiques. Des dizaines de milliers de personnes ont violemment manifesté au Bangladesh le 2 octobre, affirmant que « M. Macron est l’ennemi des musulmans ». La Syrie, le Pakistan, l’Irak, l’Iran, l’Arabie saoudite, le Maroc ont publiquement exprimé leur mécontentement à l’égard de la France et proposé de boycotter les produits français. En réponse, le ministère français des Affaires étrangères a publié un communiqué disant  que « les appels au boycott sont sans aucun objet et doivent cesser immédiatement, de même que toutes les attaques dirigées contre notre pays, instrumentalisées par une minorité radicale ».

C’est en fait le discours de M. Macron lors de sa visite en Lettonie le 2 octobre qui a provoqué le mécontentement de ces pays à l’égard de la France. Il y avait souligné que le séparatisme islamiste « est un projet conscient, théorisé, politico-religieux, qui se concrétise par des écarts répétés avec les valeurs de la République ». Le « séparatisme religieux » veut établir une « société parallèle » en France, remplacer la loi française par la loi religieuse et finalement « contrôler complètement » la société française. Il a annoncé que le gouvernement soumettrait un projet de loi en décembre pour renforcer la laïcité française et s’opposer au « séparatisme islamiste ». M. Macron a clairement indiqué que si la loi permet aux gens de choisir les croyances de leur choix, les écoles et les services publics interdiront leur affichage. Ce discours était considéré comme une « déclaration de guerre » contre le séparatisme islamiste. 

Trois points dans cette tourmente diplomatique déclenchée par la décapitation d’un enseignant méritent l’attention.

Premièrement, la position de la France dans la lutte contre l’extrémisme islamiste s’est raffermie. La tragédie du 16 octobre faisait suite aux attentats meurtriers de Charlie Hebdo à Paris début 2015, ce magazine satirique ayant publié à plusieurs reprises des caricatures du Prophète. Les deux assaillants avaient été abattus, mais les forces extrémistes islamistes dans l’ombre ont continué à agir et à se développer grâce à un lavage de cerveau et à la radicalisation sur Internet. Les attaques et la décapitation survenues après l’ouverture du procès des attentats de Charlie Hebdo en septembre en sont la preuve. Depuis 2015, la France est devenue la principale cible des groupes terroristes internationaux et les attentats terroristes s’enchaînent les uns après les autres. À en juger par la tendance actuelle, la source des attaques terroristes est interne, c’est-à-dire que des jeunes en France sont attirés par l’extrémisme islamiste et lancent des attaques terroristes, devenant la principale menace. Les mesures répressives proposées par le gouvernement français le prouvent également. M. Macron a proposé une législation visant à éradiquer le séparatisme religieux et empêcher l’islam de remplacer la loi française, ce qui est une tentative d’éradiquer l’extrémisme islamiste. 

Deuxièmement, la Turquie tente de contenir la France sous ce prétexte. La Turquie est un grand pays du Moyen-Orient et la plupart de ses habitants sont musulmans. Le pays a manifestement l’intention de rivaliser avec l’Iran et l’Arabie saoudite pour la domination régionale. Avec l’assentiment des Etats-Unis, la Turquie a réussi à combattre les forces armées kurdes en Syrie. Récemment, le pays a soutenu unilatéralement le gouvernement d’entente nationale libyen dans la guerre civile, affronté la Grèce et Chypre en Méditerranée orientale pour des questions de ressources souterraines, et soutenu l’Azerbaïdjan dans le conflit du Haut-Karabakh. Selon les médias, la Turquie agit sur plusieurs fronts simultanément, montrant son « ambition » de concourir pour l’hégémonie régionale. La France reste opposée à la Turquie : elle s’oppose toujours à l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne, condamne les actions de la Turquie en Syrie, s’oppose au soutien militaire de la Turquie au gouvernement d’entente nationale libyen, et fournit même à la Grèce des chasseurs Rafale dans le conflit turco-grec... La France est devenue le plus grand obstacle de la Turquie pour qu’elle puisse asseoir sa puissance dans cette région.

La France a été frappée par le terrorisme et il faut lire entre les lignes dans le fait que M. Erdoğan se réjouisse de ce malheur, faisant des attaques terroristes un moyen de contenir la France. Bien que la détermination de M. Macron de combattre le séparatisme islamiste soit largement comprise de tous les pays, les pays arabes du Moyen-Orient et d’autres pays islamiques se méfient secrètement de la France. M. Erdoğan y a vu une autre opportunité : de nombreux gouvernements islamiques ont des doutes et sont mécontents des mesures de la France, mais il n’est pas commode de le dire clairement. Le président turc est donc monté directement sur scène et a publiquement accusé la France, se faisant le porte-parole du monde islamique. 

Troisièmement, la France fait face à la pression du monde islamique. Après l’attentat de Charlie Hebdo à Paris en 2015, des dirigeants de différents pays avaient assisté aux cérémonies de recueillement dans les rues de la capitale, reflétant la condamnation unanime du terrorisme et le soutien à la France par tous les pays du monde. Aujourd’hui, cinq ans plus tard, la décapitation a déclenché des manifestations contre la France et un boycott des produits français dans les pays islamiques. Outre le conflit diplomatique entre la Turquie et la France, le gouvernement iranien a également engagé des négociations diplomatiques avec la France. La France est une victime du terrorisme. C’est la première fois que ce pays subit une énorme pression internationale dans ses efforts pour combattre les forces terroristes et assurer la sécurité nationale.

La France promeut une diplomatie globale pour sauvegarder ses intérêts stratégiques et le Moyen-Orient est précisément au centre de la diplomatie française. M. Macron a intensifié ses efforts pour lutter contre l’extrémisme islamiste afin de lutter contre le terrorisme, suscitant mécontentement et appréhension dans les pays arabes, et déclenchant même des conflits diplomatiques, ce qui complique encore plus la lutte contre le terrorisme. 


Par Shen Xiaoquan, chercheur au Centre de recherche des questions mondiales de l’Agence de presse Xinhua.


Suivez China.org.cn sur Twitter et Facebook pour rejoindre la conversation.
Source:french.china.org.cn