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Les « 600 jours » de M. Macron : des réformes à la gouvernance d’ensemble

French.china.org.cn | Mis à jour le 21. 07. 2020 | Mots clés : Macron

En quelques semaines à peine, de la fin juin à aujourd’hui, l’arène politique française a subi des turbulences considérables. Elles ont débuté lors des élections municipales nationales, qui se déroulent tous les six ans. Qu’on l’admette ou non, ce scrutin a été un tournant dans le quinquennat de M. Macron.

Le 28 juin, la France a organisé le deuxième tour des élections municipales. Ce vote avait été reporté de trois mois en raison de l’épidémie. Également en raison de l’épidémie, la population n’a pas été autorisée à sortir, ce qui s’est traduit par un taux d’abstention record, qui a atteint 60 %. Cela a eu un impact considérable sur les résultats de cette élection.

Le parti au pouvoir de M. Macron, LREM, est un nouveau parti qui existe depuis plus de trois ans. Il nourrissait de grandes attentes pour cette élection et y voyait une opportunité pour « s’enraciner » à l’échelon local et étendre son pouvoir. LREM a cependant subi un revers majeur, et à l’exception de l’élection du Premier ministre Edouard Philippe à la mairie du Havre, il n’a obtenu aucune grande ville. L’échec aux élections municipales a contraint M. Macron à remplacer le Premier ministre et à former un nouveau cabinet.

Le 3 juillet, M. Macron a accepté la démission de M. Philippe et a décidé quelques heures plus tard de le remplacer par Jean Castex, qui appartenait à LR. Un nouveau gouvernement a été rapidement formé. La transition s’est déroulée en bon ordre et semble avoir été bien préparée. Il n’est pas surprenant que M. Philippe ait démissionné : sa cote de popularité avait grimpé en flèche, dépassant largement celle du président. M. Macron a choisi M. Castex, le maire d’une ville inconnue des Pyrénées-Orientales, pour remplacer M. Philippe, et ses intentions se passent de toute explication. 

La fête du 14-juillet a subi le contrecoup de l’épidémie de COVID-19. Le moment fort de la célébration de cette année n’était pas le défilé militaire, mais l’interview télévisée que M. Macron a accordée à l’Elysée. De toute évidence, en cette grande occasion, il devait s’adresser aux Français. Le lendemain, le Premier ministre a prononcé sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale, expliquant le programme politique du gouvernement pour la seconde moitié du mandat du président.

Dans son discours télévisé le 14 juillet, M. Macron a principalement expliqué ce qu’il allait faire pour ses « 600 jours restants au pouvoir ». Il a évité de dire s’il se présenterait en 2022 et ne s’est concentré que sur les 600 jours qui lui restaient, ce qui reflète à la fois son état d’esprit actuel et son attitude pragmatique.

Il s’agit d’un revirement complet par rapport au Macron d’il y a trois ans. En mai 2017, il avait participé à l’élection présidentielle en brandissant la bannière de la « révolution ». Il avait vaincu successivement la droite traditionnelle du LR, la gauche du Parti socialiste et le Front national (aujourd’hui Rassemblement nationale), sa force de caractère le faisant entrer à l’Élysée.

Dans la première moitié de son quinquennat, les réformes de M. Macron avaient obtenu deux résultats majeurs, mais elles ont également laissé deux « malédictions ». Le résultat est que, grâce à son impulsion forte et à sa persévérance, la France a procédé à des révisions majeures de la Loi du travail et réformé la SNCF. Les deux réformes ne sont pas anodines et sont essentielles pour revitaliser l’économie française et d’une grande importance pour renforcer la compétitivité des entreprises. Les présidents précédents n’avaient pas réussi à les mener. M. Macron les réalisées sans qu’il y ait eu de grands chocs sociaux, ce qui n’est pas rien ! 

Les deux « malédictions » ont été le mouvement des Gilets jaunes qui a éclaté fin 2017 et les grèves nationales déclenchées par la réforme du système de retraite l’année dernière. Le mouvement des Gilets jaunes existe toujours et la réforme du système de retraite a été suspendue en raison de l’épidémie de COVID-19. Cela explique l’échec de LREM lors des élections municipales, et M. Macron a payé un lourd tribut !

S’il n’y avait pas eu le COVID-19, M. Macron aurait pu faire avancer d’autres projets de réforme qu’il murissait, comme la réforme du système d’assurance-chômage et la révision du système de retraite, le plus dur à faire avaler. S’il avait insisté, il aurait pu obtenir des résultats substantiels. Cependant, la destinée n’écoute pas les hommes, et M. Macron n’a maintenant d’autre choix que de soupirer d’impuissance et de prendre son mal en patience. 

M. Macron est désormais moins agressif et plus rationnel, et a proposé son plan pour faire face aux « 600 jours restants au pouvoir ». Même s’il ne se résigne pas, il est encore impuissant. 

Les élections municipales sont devenues le tournant de son quinquennat. En un sens, il s’agit d’une transition, passant des réformes fortes à une gouvernance d’ensemble. M. Macron doit suivre la tendance pour assumer et parachever cette transition.

Pour résumer, les discours de MM. Macron et Castex mettent en avant trois grandes priorités de gouvernance nationale : la première est de continuer à contrôler l’épidémie, la seconde est de stimuler la reprise économique et la troisième est de développer l’emploi. Il n’y a rien de très ambitieux, il suffit de simplement de profiter de la tendance.

L’épidémie en France est actuellement presque sous contrôle, et le pays a procédé à la levée du confinement à des degrés divers, mais il y a un risque d’une seconde vague épidémique. Un contrôle efficace entraînera inévitablement une augmentation des coûts de gestion sociale. Avec l’augmentation rapide des dépenses publiques et la baisse des recettes fiscales, les problèmes d’endettement sont devenus un danger latent. On s’attend à ce que la dette publique atteigne 120,9 % du PIB en 2020 et le déficit budgétaire 11,4 % du PIB. La situation n’incite guère à l’optimisme !

De 2017 à 2019, l’économie française a crû respectivement de 2,3 %, 1,7 % et 1,3 %, ce qui était supérieur à la moyenne de la zone euro. Cependant, l’épidémie soudaine a gravement perturbé la dynamique du développement économique français. L’Institut national de la recherche économique et des statistiques (INSEE) a publié un rapport le 8 juillet, prévoyant une baisse du PIB de 9 % en 2020. Le gouvernement français avait précédemment prédit une contraction de l’économie française d’environ 11 % cette année. M. Macron a annoncé que la France investirait au moins 100 milliards d’euros supplémentaires sur la base des 460 milliards d’euros successivement investis depuis le début de l’épidémie de COVID-19 pour stimuler la reprise de l’économie.

Le taux de chômage en France pourrait passer de 8,1 % à 11 % d’ici un an en raison de l’épidémie. En réponse au problème de l’emploi qui préoccupe généralement la population, M. Macron a déclaré que l’emploi des jeunes était la clé de la reprise économique. À cette fin, un mécanisme spécial de réduction de la fiscalité et des coûts pour l’emploi des jeunes a été mis en place pour générer un grand nombre d’emplois. M. Castex a également souligné que le gouvernement en fera sa priorité absolue.

Les médias ont constaté que dans l’opération « 600 jours » de M. Macron, les réformes avait disparu et la reprise économique était devenue un mot clé. En un mot, les priorités de son travail ont changé d’orientation. 

Les trois tâches mentionnées ci-dessus ne sont évidemment pas l’objectif : celui-ci est plutôt de gagner le cœur des Français. Faire avancer les réformes peut gagner les cœurs, et la gouvernance économique peut également raffermir l’opinion publique. M. Macron, qui est président depuis trois ans, comprend parfaitement cela.  

En outre, M. Macron a récemment promu la Conférence citoyenne pour le climat. M. Castex a proposé que le gouvernement investisse 20 milliards d’euros dans le domaine de la protection de l’environnement, développe vigoureusement l’économie durable au niveau local et soutienne les technologies vertes. Ces mesures sont de toute évidence le reflet de l’opinion publique suite aux victoires d’EELV lors des élections municipales. 

M. Macron a parlé des « 600 jours » dans son discours de la fête nationale, mais il a évité d’évoquer ses projets au terme de ces 600 jours. Si les médias ont été frustrés, il s’agit de sagesse politique. C’est de plus une période charnière pour M. Macron : garder profil bas et agir de manière discrète est peut-être l’option la plus sage. 


Par Shen Xiaoquan, chercheur au Centre de recherche des questions mondiales de l’Agence de presse Xinhua.


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Source:french.china.org.cn