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Le plan de relance de l’UE, une avancée importante pour l’intégration européenne

French.china.org.cn | Mis à jour le 11. 06. 2020 | Mots clés : intégration européenne 


La Commission européenne a récemment proposé un plan de relance économique de 750 milliards d’euros pour soutenir les pays européens durement touchés par l’épidémie de COVID-19. Ce plan de financement – le plus important à ce jour – démontre la volonté de l’Union européenne (UE) de « s’unir et de lutter ensemble », d’éviter un effondrement, et constitue une étape historique dans l’intégration européenne.

La Commission européenne lèvera 750 milliards d’euros sur les marchés financiers, les deux tiers transférés sous forme de subventions et un tiers sous forme de prêts afin d’atténuer la récession économique sans précédent que connaissent les Etats membres en raison de l’épidémie. On estime que la majeure partie des fonds sera attribuée à l’Italie et à l’Espagne, les deux pays les plus durement touchés économiquement.

Cet énorme plan de relance a été élaboré par la Commission européenne sur la base du plan récemment proposé par la France et l’Allemagne de 500 milliards d’euros. Commentant la proposition franco-allemande, l’Agence France-Presse a remarqué qu’il s’agissait d’une approche sans précédent dans le processus de construction européenne : la France et l’Allemagne ont proposé conjointement que la Commission européenne emprunte de l’argent sur les marchés « au nom de l’UE » pour financer ce fonds. Les commentateurs ont également souligné que ce plan était une étape sans précédent vers la mutualisation de la dette européenne.

Eviter la dissolution de l’Union européenne

Le plan de 750 milliards d’euros a été proposé dans un contexte d’affaiblissement général de l’économie du bloc. L’UE reconnaît que si elle ne prend pas de mesures importantes pour sauver les pays dont l’économie est en « chute libre » en raison de la gravité de l’épidémie, cela peut conduire à sa dissolution. L’économie européenne était déjà en crise bien avant le début de l’épidémie. En 2018, les taux de croissance du PIB des 28 pays de l’UE et des 19 pays de la zone euro n’étaient que de 1,9 % et 1,8 % respectivement, tandis qu’2019, ils sont tombés à 1,2 % et 1,4 %, respectivement.

L’épidémie a causé des dégâts économiques importants. Selon les dernières données publiées par Eurostat, au premier trimestre 2020, le PIB des 27 pays de l’UE et des 19 pays de la zone euro a baissé de 3,5 % et 3,8 % par rapport au trimestre précédent, et de 2,7 % et 3,3 % respectivement par rapport à la même période de l’an passé, la baisse la plus importante depuis 1995. Parmi ces pays, le PIB de la France a baissé de 5,8 %, la plus forte baisse en un seul trimestre depuis 1949 ; celui de l’Allemagne, de 6,3 %, plus qu’il y a plus de 10 ans lors de la crise financière ; et celui de l’Italie et de l’Espagne, respectivement de 4,7 % et 5,2 %.

La tendance économique de l’UE n’est guère favorable. Selon les Perspectives de l’économie mondiale publiées par le Fonds monétaire international en avril 2020, l’économie de la zone euro reculerait de 7,5 % en 2020, dont -7,0 % pour l’Allemagne, -7,2 % pour la France, -9,1 % pour l’Italie, et -8,0 % pour l’Espagne. Les prévisions de Goldman Sachs en avril étaient encore plus pessimistes : en 2020, l’économie de la zone euro pourrait se contracter de 9 %, notamment l’Italie de 11,6 %, l’Allemagne de 8,9 % et la France de 7,4 %. Le ministre espagnol de l’Economie a déclaré fin avril que le PIB espagnol diminuerait de 9,2% en 2020.

La France et l’Allemagne ont mis en œuvre séparément des plans d’urgence. Après le début de la crise épidémique, le gouvernement français a d’abord dépensé 110 milliards d’euros pour lancer un plan d’urgence, puis 300 milliards d’euros pour garantir les prêts aux entreprises. Après la phase d’urgence, le gouvernement entame maintenant une phase de revitalisation pour soutenir notamment les secteurs de l’automobile, du tourisme et de l’aéronautique qui ont été particulièrement touchés par l’épidémie. Dans le nouveau plan de revitalisation, l’Etat investira 40 milliards d’euros, une partie des fonds étant utilisée pour mettre en œuvre les mesures spécifiées dans le budget, et une autre pour soutenir la trésorerie des entreprises. En mars de cette année, l’Allemagne a de son côté formulé un plan de sauvetage de mille milliards d’euros, comprenant l’octroi de garanties de prêts, de subventions et d’un soutien pour réduire les heures de travail afin d’éviter les licenciements. Le 3 juin, la chancelière allemande Angela Merkel a annoncé un autre plan de relance économique pour 2020 et 2021. Ce plan a atteint 130 milliards d’euros, dont 120 milliards à la charge du gouvernement fédéral.

La France et l’Allemagne sont deux grandes puissances de l’UE qui ont une capacité de résilience alors que l’Italie et l’Espagne, qui ont été les gravement affectés par l’épidémie, dépendent principalement du tourisme et ont souffert le plus économiquement. Ces pays d’Europe du Sud ont de plus de faibles capacités de résilience. Si l’UE ne peut pas faire jouer ses avantages collectifs et l’esprit de solidarité et d’assistance mutuelle, alors les économies de ces pays s’effondreront inévitablement, et cela ne conduira qu’à un effondrement de l’UE. 

Un jalon dans l’intégration européenne

L’Italie, l’Espagne et la France ont d’abord avancé une proposition de dette commune de l’UE en émettant des « corona bonds » pour atténuer les difficultés causées par l’épidémie. Cependant, l’Allemagne, les Pays-Bas et d’autres pays d’Europe centrale et septentrionale s’y sont opposés. Ces pays aux systèmes budgétaires conservateurs refusent de partager les risques d’emprunt avec les pays d’Europe du Sud. C’est devenu une « zone interdite » au sein de l’UE, difficile à débloquer. Dès 2012, les pays très endettés d’Europe du Sud avaient proposé d’émettre des « obligations européennes » pour atténuer la crise de la dette de l’époque. Cependant, en raison de la ferme opposition de certains pays de l’UE, ce plan n’avait pas abouti et le Mécanisme de stabilité européen (MSE) avait été créé à la place. Le MSE est un outil de sauvetage mis en place par l’UE pour les pays lourdement endettés comme la Grèce lors de la crise de la dette de 2012. Il maintient la stabilité économique de la zone euro en levant des fonds et en prêtant à ceux qui connaissent de graves problèmes de financement. Le montant réel des prêts a atteint 500 milliards d’euros. Cependant, il existe des conditions strictes pour recevoir des prêts du MSE c’est-à-dire que les pays qui les acceptent doivent mettre en œuvre des politiques d’austérité budgétaire strictes et des réformes économiques en profondeur afin de garantir la stabilité globale de l’économie de la zone euro et d’éviter qu’elle ne soit entraînée par des pays lourdement endettés. Le gouvernement grec avait été contraint d’accepter de telles conditions et s’était engagé à mettre en œuvre des mesures d’austérité plus strictes, ce qui avait rendu la reprise économique grecque plus difficile, provoquant des troubles intérieurs, les partis d’opposition exigeant même le retrait de l’UE. 

Cette épidémie constitue un nouveau défi sérieux pour l’UE depuis la crise de la dette européenne il y a dix ans. Ce n’est pas seulement une crise de sécurité sanitaire sans précédent, mais aussi une énorme catastrophe qui ravage l’économie, un danger plus grave que la crise de la dette européenne. Si l’UE ne peut pas mettre en avant l’esprit de solidarité et surmonter les difficultés ensemble, alors cette crise sera probablement la dernière goutte d’eau qui fera déborder le vase, qui paralysera l’UE et conduira à l’arrêt complet du processus d’intégration européenne.

Le plan de relance de 750 milliards d’euros proposé par l’UE est essentiellement une percée dans cette « zone interdite » qui interdit à l’UE d’emprunter conjointement et la mutualisation de la dette. Commentant le plan de relance de 750 milliards d’euros de l’UE, Reuters a souligné que ce plan, une fois approuvé par tous les Etats membres, marquera une étape importante de l’intégration européenne comme jamais en 50 ans, et que pour la première fois, l’UE fera un pas dans la direction visant à faire de la dette commune un instrument de financement important. Les commentateurs estiment généralement que le changement de politique de Mme Merkel est la clé de la capacité de l’UE à prendre cette décision majeure, ce qui signifie que l’ « axe franco-allemand » redémarrera et jouera à nouveau un rôle.

L’UE subit actuellement les attaques du populisme dans différents pays et l’épidémie fournit un prétexte aux politiciens d’extrême droite. Le président français Emmanuel Macron s’est donc félicité de cette initiative majeure de 750 milliards d’euros, notant qu’elle « affaiblira l’influence des politiciens populistes et nationalistes », car les populistes veulent la scission de l’UE et la dépréciation de l’euro.

Depuis le début de l’épidémie, l’UE a successivement proposé un plan de sauvetage de 500 milliards d’euros et un plan de relance économique de 750 milliards d’euros. On peut voir que tant que l’UE aura la volonté politique, elle pourra mobiliser la force collective, jouer véritablement son rôle de communauté des Etats souverains et promouvoir l’avancée continue de l’intégration européenne.

Par Shen Xiaoquan, chercheur au Centre de recherche des questions mondiales de l’Agence de presse Xinhua.

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Source:french.china.org.cn