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Rencontre Macron-Poutine : premiers pas vers un nouveau départ pour les relations franco-russes

French.china.org.cn | Mis à jour le 30. 05. 2017 | Mots clés : Paris ,Moscou
Crédit photo : VCG

La réunion de travail très symbolique des présidents français et russe lundi marque, au-delà de réels désaccords persistants, la réouverture d'un dialogue ferme et pragmatique entre Paris et Moscou après une ère de défiance.

Crimée, Ukraine, Syrie... Autant de dossiers sensibles qui planaient sur le rendez-vous entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine. La rencontre au château de Versailles aura malgré tout permis aux présidents français et russe de poser les jalons d'une nouvelle relation entre leurs deux pays, fortement mise à mal ces dernières années.

En octobre dernier, Vladimir Poutine avait en effet annulé sa visite en France après que l'Elysée a fait comprendre qu'il n'était pas le bienvenu suite à un nouveau veto russe au Conseil de sécurité de l'ONU et à la poursuite des bombardements de l'est de la ville syrienne d'Alep.

Si le prétexte était culturel, la visite du chef de l'Etat russe, qui signe ainsi son retour sur la scène européenne, était incontestablement chargée d'une forte signification politique. Les deux hommes avaient rendez-vous à Versailles, au Grand Trianon, pour inaugurer l'exposition "Pierre le Grand, un tsar en France, 1717" qui marque le 300e anniversaire de l'ouverture de l'ambassade de la Russie à Paris. Tout un symbole: en 1717, Pierre le Grand, tsar de Russie puis empereur, était venu chercher en ces lieux auprès du jeune roi Louis XV, âgé de seulement sept ans, l'amitié de la France pour contrecarrer les influences de la Suède et de l'Autriche.

Il s'agissait d'abord "de répondre à la défiance par du symbolique", résume Thomas Gomart, directeur de l'Institut français des relations internationales. Pour Hadrien Desuin, spécialiste des questions internationales et de défense, Emmanuel Macron, en recevant Vladimir Poutine, a envoyé "un signal diplomatique très fort au reste du monde". "Une belle occasion de rappeler à notre allié américain que la France n'est pas alignée", juge-t-il.

"Le nouveau président de la République est en train de réamorcer une relation entre Paris et Moscou qui avait été interrompue", estime de son côté l'historienne spécialiste de la Russie, Hélène Carrère d'Encausse, qui qualifie cette rencontre "d'extrêmement importante".

L'écrivain et ancien diplomate russe Vladimir Fédorovski partage ce point de vue. "On peut dire que cette journée marque un basculement majeur pour les relations franco-russes", estime-t-il. "Le président français et son homologue russe ont choisi de répondre fermement, mais calmement à tous les sujets polémiques, et affiché une posture pragmatique, mettant la cordialité et l'entente nécessaire au règlement du problème terroriste, par exemple, au-dessus des divergences idéologiques ou éthiques souvent sensibles", argumente-t-il.

Tout en fixant des "lignes rouges", M. Macron a promis de coopérer avec Moscou. Lors d'une conférence de presse commune avec M. Poutine, il a notamment plaidé pour un renforcement du "partenariat avec la Russie" en Syrie. La préservation d'un Etat syrien a été actée, en évitant de prononcer le nom du président Bachar el-Assad, dont le maintien au pouvoir divise les Occidentaux. "Une ligne rouge très claire existe de notre côté, l'utilisation d'armes chimiques, par qui que ce soit", a averti le chef de l'Etat français. "Toute utilisation d'armes chimiques fera l'objet de représailles et d'une riposte immédiate, en tout cas de la part des Français", a-t-il asséné.

"Le départ de Bachar el-Assad n'est plus une priorité pour Paris, qui privilégie désormais une analyse pragmatique de la situation sur le terrain", considère le directeur du Centre européen d'analyses stratégiques, Philippe Migault, selon qui "l'attitude ferme mais courtoise d'Emmanuel Macron plaît aux Russes". "On note une nette évolution par rapport au président Hollande", relève-t-il.

Concernant le dossier ukrainien, une prochaine rencontre à quatre (Allemagne, France, Russie, Ukraine) a été confirmée. A la fermeté de Vladimir Poutine, pour qui "les sanctions" contre la Russie ne contribuent "aucunement" à régler la crise ukrainienne, le président français a répondu en rappelant qu'il y aurait "une discussion" au format Normandie pour éviter "une escalade" des tensions. Jusqu'ici, les sanctions occidentales, qui ont entraîné des mesures de rétorsion russes, ont divisé nombre de pays de l'Union européenne et n'ont pas facilité le respect des accords de Minsk.

M. Macron a par ailleurs affirmé que son homologue russe lui avait assuré que "des mesures" avaient été prises pour déterminer ce qu'il en était véritablement de la campagne de répression d'homosexuels qui a été signalée en Tchétchénie, prévenant qu'il serait "constamment vigilant" sur la question.

Il a également une nouvelle fois défendu l'exclusion des médias russes Sputnik et Russia Today, qu'il avait accusés d'avoir propagé de fausses informations et des calomnies durant la campagne. "Ils ne se sont pas comportés comme des organes de presse, mais comme des organes d'influence", a-t-il asséné.

"Si l'élection d'Emmanuel Macron ne correspondait pas au vœu de Moscou au départ, elle peut néanmoins permettre un renouveau dans les relations franco-russes et les replacer dans la durée. Après le G7 en Sicile, et la réunion de l'OTAN à Bruxelles, il y a une fenêtre d'opportunité. D'autant que les liens économiques sont structurants", estime l'ancien ambassadeur Eugène Berg, auteur d'un ouvrage sur la Russie.

L'ancien diplomate souligne notamment l'importance du projet du groupe français Total, qui construit avec des partenaires russes et chinois une usine gigantesque de gaz liquéfié sur la presqu'île de Yamal, dans le Grand Nord russe.

De nombreux grands groupes français (pharmacie, grande distribution, produits chimiques, banques, énergies, transports...) sont présents en Russie, qui est l'une des trois premières destinataires des investissements français à l'étranger.

La moitié du commerce extérieur russe se fait avec l'Europe et un grand nombre d'Etats européens dépendent du gaz russe. Des liens d'interdépendance qui pourraient faciliter un réchauffement des relations.


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Source: Agence de presse Xinhua

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