Le ministère des Affaires étrangères de Chine a enjoint le président élu américain Donald Trump lundi d'agir avec prudence sur la question de Taïwan pour éviter de « nuire sérieusement à la relation sino–américaine », après sa nouvelle provocation publique.

Beijing pourrait réagir en prenant des contre–mesures dans les domaines commerciaux et régionaux si M. Trump continuait de défier la politique d' « Une seule Chine » qui a fait ses preuves dans le temps, et qui est la pierre angulaire diplomatique des relations entre les deux plus grandes économies mondiales, selon des experts chinois.

Dans une déclaration diffusée sur Fox News dimanche, M. Trump a fait savoir que les Etats–Unis ne devaient pas nécessairement s'en tenir à leur position de longue date, à savoir que Taïwan fait partie d' « Une Chine », mettant en cause le consensus que les deux pays ont respecté pendant près de 40 ans.

Le porte–parole du ministère des Affaires étrangères de Chine Geng Shuang a déclaré lundi que la politique d' « Une seule Chine » était le fondement politique de la relation sino–américaine, et que si cette fondation s'effondrait, la coopération sino-américaine dans des domaines clés n'aurait plus d'assise. « Nous demandons à la nouvelle administration américaine et à son dirigeant de bien comprendre la sensibilité de la question de Taïwan », a déclaré M. Geng lors d'une conférence de presse régulière. Il a ajouté que la question de Taïwan devait être adressée de manière correcte et prudente pour éviter de nuire sérieusement aux liens sino–américains.

M. Geng a aussi fait savoir que le conseiller d'Etat Yang Jiechi, un diplomate de haut niveau, avait rencontré à New Yorkl'équipe de transition de M. Trump quand il a effectué une récente visite en Amérique latine. M. Yang avaitnotamment discuté avec le général de corps d'armée Michael T. Flynn, qui a été nommé conseiller à la sécurité nationale. Selon M. Geng, ils ont échangé des points de vue sur des « questions importantes qui concernent les deux parties ».

Les remarques de M. Trump interviennent après les objections fortes de la Chine suite àsa décision d'accepter un appel téléphonique de la dirigeante de Taïwan Tsai Ing–Wen le 2 décembre. C'est la première fois qu'un président ou un président élu américain parle publiquement à un dirigeant de Taïwan en près de quatre décennies.

D'après zaobao.com, un site basé à Singapour, Joseph Wu, un haut conseiller à la sécurité de Taïwan, et David Lee, diplomate de haut rang de Taïwan, se rendront aux Etats–Unis dans un contexte de communications accrues entre les Etats–Unis et l'île.

Shi Yinhong, professeur de relations internationales à l'Université Renmin de Chine, estime que la Chine pourrait envoyer une « réponse forte » et « au moins rétrograder son niveau diplomatique face les Etats–Unis » si le gouvernement de M. Trump continue de remettre en question la politique d' « Une seule Chine ». Si le gouvernement américain sous la direction de M. Trump continue de provoquer la Chine sur la question de la souveraineté territoriale, les Etats–Unis ne devraient pas s'attendre à obtenir la coopération de la Chine dans les questions internationales majeures, a–t–il indiqué. Selon lui, la Chine pourrait adopter une position plus agressive à l'égard des patrouilles maritimes américaines en mer de Chine méridionale, où elle s'est contentée jusqu'à présent d'envoyer des avertissements verbaux et de faire preuve de retenue dans ses actions.

La Chine détient aussi une créance substantielle à l'égard des Etats–Unis et le pays est le premier marché d'exportation pour les produits agricoles américains. Si M. Trump prend des initiatives irrationnelles, la Chine pourrait adopter des contre–mesures dans les secteurs économiques et commerciaux, estime Li Ruogu, ancien président de la Banque d'import–export de Chine. Selon lui, le gouvernement chinois doit se préparer car la Chine ne doit pas nourrir d'espoir quant à savoir ce que M. Trump pourrait faire ou non.

Dong Chunling, chercheur en études américaines aux Instituts des relations internationales de Chine, pense qu'en usant de la provocation sur la question de Taïwan, M. Trump veut bénéficier d'un levier plus puissant pour sa politique étrangère quand il sera en fonction le mois prochain. « Si les fondations de la relation sino–américaine sont sapées, la coopération économique et commerciale entre les deux pays sera affectée, ce qui aura un impact sur l'économie et l'emploi aux Etats–Unis », a–t–il fait savoir.