Attentats du 13 novembre : pourquoi Paris ?

A la suite des attaques terroristes qui ont eu lieu dans la soirée du 13 novembre à Paris, le monde est en état de choc. Dans la presse internationale, on parle déjà du « vendredi noir de Paris ». Mais, pourquoi l'horreur s'est-elle produite dans la capitale française ?

Cette tragédie nous rappelle évidemment les attentats terroristes qui ont fait 17 morts entre le 7 et le 9 janvier en France, et notamment la fusillade dans les locaux de l'hebdomadaire Charlie Hebdo à Paris.

Si l'attentat contre Charlie Hebdo était de l'ordre de la vengeance, la série d'attaques de vendredi correspond elle à une action terroriste de grande envergure, perçue comme une menace, une mise au défi, voire une déclaration de guerre à l'Occident.

On peut d'ores et déjà affirmer, sans attendre les résultats des enquêtes de police, que ces attaques sont de nature terroriste et qu'elles ont été longuement préméditées et orchestrées. Le temps, le lieu, l'objectif et le mode opératoire semblent tous avoir été soigneusement étudiés. Du point de vue des terroristes, l'organisation d'attaques d'une telle envergure dans une grande ville comme Paris est déjà un succès.

Les terroristes ont en effet pris pour cibles le Stade de France, la salle de spectacle du Bataclan et un restaurant asiatique dans le 10^e arrondissement. Le Stade de France, construit à Saint-Denis pour la Coupe du monde 1998, est capable de contenir 80 000 spectateurs. Il s'agit du plus grand stade de Paris. Le Bataclan et le restaurant se trouvent quant à eux dans le centre-ville, près de la place de la République, l'un des endroits les plus populaires de Paris. Ces endroits accueillent régulièrement du monde et ne sont pas fréquentés par une catégorie précise de gens. Le quartier de la place de la République est un des endroits préférés des Parisiens, et plus particulièrement la nuit, lorsque les restaurants et autres lieux de détente sont bondés et que l'ambiance est à son comble. Vendredi soir, un match de football se jouait entre la France et l'Allemagne dans le stade parisien, auquel assistaient notamment le président François Hollande et plusieurs hauts responsables du gouvernement. Ce genre d'endroits permet aux terroristes de faire beaucoup de victimes et de maximiser leur influence.

Il est difficile de croire qu'un tel chaos, avec des terroristes armés de fusils et d'explosifs, puisse se produire dans des lieux aussi fréquentés que ceux-ci. Il est certain que ces attentats ont été soigneusement planifiés et commandités. Hier, le nombre de blessés et de morts ne cessait d'augmenter et le bilan provisoire faisait état d'au moins une centaine de morts. Il est inimaginable qu'une telle tragédie sanglante puisse se produire en Europe!

L'influence négative des ces attaques promet déjà d'être grande. Alors que Paris se prépare à accueillir la conférence mondiale sur le climat (COP21) le 30 novembre, le regard du monde se porte en ce moment sur la France. Plus de 190 pays du monde participeront en effet à la COP21, qui réunira notamment les chefs d'Etat d'environ 80 pays, quelque 3000 journalistes et 10 000 membres d'organisations non-gouvernementales. La France a décidé d'accueillir à cette occasion la communauté internationale sur le site de Paris-Le Bourget, qui se trouve à proximité du Stade de France. Il est donc certain que les attaques de vendredi vont avoir une influence sur le déroulement de la COP21.

Ce n'est pas un hasard si les terroristes ont de nouveau choisi de s'en prendre à la France. Après l'attentat contre Charlie Hebdo, le groupe Etat islamique (EI) avait justifié ses actions en proclamant qu'il s'agissait d'une vengeance contre la France, qui avait participé à des missions antiterroristes au Moyen-Orient. Selon les enquêtes de police, les responsables de l'attaque étaient en contact étroit avec l'EI, et certains étaient revenus en France après avoir été combattre en Syrie. Depuis lors, plusieurs attaques terroristes similaires ont été planifiées en France et certaines d'entre elles ont pu être stoppées à temps. La France est aujourd'hui devenue la cible principale du terrorisme mondial.

Le sort funeste de Paris est lié à la participation de la France dans les actions militaires contre l'EI. La France a en effet pris part en septembre 2014 aux frappes contre l'EI en Irak. Au début de 2015, la France a déployé le porte-avions Charles de Gaulle pour lutter contre l'EI. En septembre de cette année, la France a élargi son champ d'intervention pour y inclure la Syrie et, en novembre, elle a à nouveau déployé le porte-avions Charles de Gaulle contre l'organisation terroriste. Les attentats de Paris ressemblent donc fortement à une vengeance terroriste.

La France et les terroristes sont entrés dans un cercle vicieux.

L'autre cause du phénomène, c'est le retour en France de jihadistes partis combattre en Syrie et en Irak. Selon les autorités, chaque année, plusieurs milliers de jeunes extrémistes religieux quittent la France pour aller faire le jihad en Syrie. Leur retour en France constitue donc la plus grande menace pour la sécurité nationale. Parmi les nombreux migrants qui affluent en ce moment vers l'Europe se cachent également des terroristes potentiels, ce qui représente un grand défi pour la France et même l'Europe.

Les services français de lutte contre le terrorisme doivent tirer des leçons de ces attentats. Les terroristes qui parcouraient vendredi le centre-ville de Paris armés de fusils et d'explosifs n'ont en effet fait l'objet d'aucune opposition, puisque la police est arrivée au Bataclan une heure après la prise d'otage. Cela témoigne de certaines lacunes dans le domaine de la sécurité à Paris, et ce à seulement deux semaines de la COP21.

Moins de 24 heures après la tragédie, le bilan des victimes n'est pas encore définitif et nous manquons encore de précisions sur les événements, mais ces attentats terroristes laissent déjà transparaître un certain nombre de difficultés.

(Traduction d'un article en chinois rédigé par Shen Xiaoquan, maître de recherche au Centre de recherche sur les problématiques mondiales de l'agence de presse Xinhua.)