Le bouddhisme, une
des trois grandes doctrines religieuses du monde, est surtout
répandue en Asie. En Chine sa terre d’élection
est le Tibet.
Le bouddhisme au Tibet
s’est développé de façon très
particulière, devenant le lamaïsme ou ‘‘bouddhisme
tibétain’’.
C’est pendant
la première moitié du VIIe siècle que Songtsan
Gambo unifia le territoire du Tibet et fonda le Royaume du Tibet.
Grâce à sa politique de ‘‘tout accepter
et absorber sans différenciation’’, le bouddhisme
put être introduit au Tibet à partir du Népal
et de la Plaine centrale chinoise, introduction qui fut vite attestée
par la construction de monastères, dont celui du Jokhang.
Avant le bouddhisme, les Tibétains pratiquaient une sorte
de chamanisme local, dit Ben ou Benbo (religion originelle). Animistes,
ses fidèles adoraient les dieux et les esprits du ciel,
de la terre, des montagnes, des forêts et des cours d’eau,
ainsi que les êtres de la nature. Ils avaient recours aux
sacrifices et à la divination pour chasser les démons
et repousser les dangers. L’introduction du bouddhisme constituait
une lourde menace pour le Ben. C’est la raison pour laquelle
des adeptes imputèrent à la nouvelle religion toutes
les épidémies, les grêles et autres calamités
naturelles qui purent s’abattre sur la région. Vers
la fin du VIIIe siècle, Padmasambhava, maître indien
d’une secte ésotérique, fut invité au
Tibet pour y enseigner sa doctrine. Le principe de la secte, qui
accordait une grande importance à l’art incantatoire,
reposait sur une combinaison des doctrines du brahmanisme et du
Grand véhicule. Cette venue porta un coup très dur
au Ben, mais il restait malgré tout très fort aussi
bien parmi les nobles que chez le peuple. Au cours de la première
moitié du IXe siècle, un ministre fidèle
au Ben tua le roi qui s’était fait bouddhiste, si
bien que son successeur Glangdama donna l’ordre de fermer
tous les monastères, de détruire ou d’enterrer
toutes les statues du Bouddha et tous les livres bouddhiques,
ainsi qu’à tous les moines de se défroquer.
Mais lui aussi fut bientôt assassiné par un moine
et ce fut la fin du Royaume du Tibet. Il avait cependant réussi
à ‘‘purger’’ le Tibet du bouddhisme
au point que la religion n’y eut plus cours pendant une centaine
d’années. La région traversa une période
de troubles et émeutes, les tribus ne cessant de guerroyer
entre elles au moindre prétexte.
Après une longue
période de flottement, le bouddhisme finit par assimiler
certains esprits du Ben en tant que défenseurs de la Loi
et même quelques uns de ses rites. Par ailleurs, le Ben
qui jusqu’alors n’avait pas à proprement parler
de doctrine emprunta à celle du bouddhisme. Les deux religions
finirent par se confondre. Vers la fin du Xe siècle, les
habitants du Tibet menaient une vie relativement stable, et le
bouddhisme se mit à refleurir.
La doctrine du bouddhisme
tibétain procède du Grand et du Petit véhicule.
Le premier est le nom collectif donné aux sectes formées
au Ier siècle et caractérisées par l’existence
simultanée des doctrines ésothérique et exotérique;
il préconise l’altruisme. Le deuxième est l’appellation
générale du bouddhisme primitif, du Sthaviravada
et du Mahasanghika, etc. Les bouddhistes ésotériques
disent tenir leur enseignement de Vairocana, les exotériques
de Sakyamuni. Nombreux sont les ouvrages canoniques du bouddhisme
tibétain, dont le Tripitaka. Il comprend deux parties,
dont l’une traite 1 008 sujets et l’autre est composée
de 3 461 dissertations. A part le Sutrapitaka, le Vinayapitaka
et l’Abhidharmapitaka, cet ouvrage traite aussi de grammaire,
poésie, beaux-arts, logique, astronomie, histoire, médecine
et artisanat.
Au Tibet, les moines,
appelés Dapa, sont moins cultivés, tandis que les
lamas très cultivés et haut placés dans l’échelle
sociale, sont capables de s’exercer à la pratique
de la perfection à la tête des moines. Une fois entrée
en religion, les adeptes doivent tout d’aborrd étudier
les ouvrages de l’école exotérique. Ayant réussi
l’examen oral, ils sont admis à poursuivre leurs études
dans des écoles ésotériques et à choisir
leur maître pour accomplir le rite Abhiseka, rite de bénédiction
par aspersion d’eau sur la tête des grands personnages
ou des fidèles qui se consacrent au Bouddha. Ils doivent
encore faire des offrandes à Mandra, moine traducteur originaire
du Funan (actuel Cambodge), lire des incantations de cent termes,
pratiquer des exercices respiratoires, etc., afin de pouvoir s’éveiller
à la connaissance parfaite de la vérité et
devenir un bouddha.
Après sa réapparition,
le bouddhisme a formé au Tibet de nombreuses sectes, les
plus importantes étant celles de Ningma, Sakya, Kargyut,
Ben et Gelug. Les moines de la secte de Ningma (ou secte rouge)
portent un bonnet rouge, considèrent Padmasambhava comme
leur maître fondateur et étudient la doctrine ésotérique
en vigueur avant les persécutions ordonnées par
Glangdama. Leurs monastères sont Dojechag et Minshoiling.
La secte Sakya (ou secte bigarrée) est représentée
par les grandes raies de couleurs rouge, blanche et noire peintes
sur le mur du monastère Sakya qui symbolisent Manjusri,
Avalokitesvara et Vajrapani. Ils obéissent à la
famille des Konggyelbo-le pouvoir est héréditaire-et
ont leur siège au monastère Sakya. Pagba, le 5e
maître,fut au XIIIe siècle nommé Maître
de l’emepeur par Kubilay Khan et devint le maître temporel
et spirituel du Tibet. Les moines de la secte Kargyut sont vêtus
de blanc, d’où le nom de secte blanche. Leur doctrine
est une doctrine ésotérique de tradition orale transmise
par Vajradhara. Leurs grands lamas, ayant reçu des fiefs
accordés par les empereurs Yuan et Ming, exercèrent
longtemps une autorité régionale. Digun et Papang
sont les principaux monastères de cette secte. Le Ben,
ou la secte noire, a adopté les soutras et développé
sa doctrine pour s’assimiler au bouddhisme tibétain.
Les lamas de la secte Gelug portent un bonnet jaune: c’est
la secte jaune créée par le réformateur Tsong
Khapa. Leurs deux chefs spirituels, le Dalaï et le Panchen
Lama, tous deux des réincarnations du bouddha vivant-se
virent conférer leur titres par le pouvoir Qing et finirent
par devenir les maîtres du Tibet. Les principaux monastères
de la secte sont Gandan, Sera, Drepung, Tashilumpo, Ta’er
et Blabrand.
La croyance en la réincarnation
des bouddhas vivants est une des caractéristiques du lamaïsme:
Bouddha choisit le corps d’un être vivant pour se manifester.
Les monastères tibétains et les chefs de sectes
établirent au XIIIe siècle ce système pour
résoudre le problème de la succession. La recherche
de la réincarnation du Dalaï ou du Panchen Lama est
soumise à une très stricte procédure. Préconisé
par l’empereur Qianlong des Qing, le tirage au sort par la
bouteille d’or n’entra en vigueur qu’après
été enregistré par le Bureau d’Etat
aux Affaires des ethnies minoritaires. Mais les monastèress
avaient toute liberté de chercher les candidats à
la réincarnation.
Dans les premiers temps,
le bouddhisme fut au Tibet presque exclusivement la religion des
nobles, il ne commença à se populariser qu’après
le Xe siècle, quand le rapprochement avec le Ben permit
enfin aux masses populaires d’en assimiler la doctrine sans
difficulté et que le petit peuple, longuement torturé
par les guerres, eut besoin de trouver une forme de consolation
dans l’idée de la réincarnation. D’autre
part, les lamas, qui constituent l’unique classe d’intellectuels,
étaient des érudits cultivés et respectés
de tous, qui savaient éclaircir les doutes et soigner les
maladies. Le bouddhisme est en fait une religion facile à
pratiquer. Au contraire des lamas, les fidèles n’ont
pas à lire les ouvrages canoniques, il leur suffit de s’exercer
à la pratique de la perfection, de respecter les bouddhas
et les moines, de faire l’aumône et de réciter
les ‘‘six termes efficaces’’. Le Tibet a été
dominé par le servage pendant une longue période.
Les serfs, privés de liberté, étaient soumis
soit aux aristocrates, soit dépendants des monastères.
Qui plus est, les pouvoirs temporel et spirituel étaient
confondus. Les habitants n’avaient plus d’autre choix
que le bouddhisme. Le seul moyen d’améliorer son existence
était d’entrer en religion et de se faire lama. Il
y a 40 ans, presque toutes les familles tibétaines avaient
au moins un enfant vivant dans un monastère, sauf dans
le cas d’enfant unique. Pour une population de 1,2 million
d’habitants, on comptait plus de cent mille moines ou nonnes.
L’influence du
bouddhisme tibétain se porte aux régions habitées
par les ethnies minoritaires mongole, tu, yugu et naxi, au Bhutan,
Sikkim, Népal, en Mongolie et dans certaines régions
de l’ex-U.R.S.S.
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