Mo Yan, lauréat du prix Nobel de
littérature, a déclaré vendredi que cette récompense était une
victoire pour la littérature, mais pas une victoire du
politiquement correct.
L'écrivain, qui s'exprimait depuis
sa ville natale de Gaomi, dans la province du Shandong (est), a
indiqué aux journalistes : "mes romans dépassent le cadre
politique. Le prix que l'Académie suédoise m'a remis constitue une
victoire pour la littérature, mais pas une victoire du
politiquement correct. Ceci est un prix littéraire, et je l'ai
obtenu grâce à la littérature".
Mo Yan a été critiqué pour avoir
recopié à la main un célèbre discours sur l'art et la littérature
prononcé dans l'ancienne base révolutionnaire de Yan'an par le
président Mao Zedong. En réponse, l'écrivain affirme que le
discours fut une nécessité historique et joua un rôle positif pour
renverser un gouvernement corrompu.
"Bien sûr, en le lisant
aujourd'hui, on s'aperçoit que le discours était extrêmement
limité. Il mettait un accent trop prononcé sur les relations entre
culture et politique et sur la nature de classe de la littérature,
mais passait sous silence l'aspect humain de la littérature",
ajoute-t-il.
"Notre groupe d'écrivains avait
déjà réalisé ces limites lorsque nous écrivions dans les années
1980. Nous avons essayé de les dépasser tout au long de notre
création littéraire."
"Je crois que nombre de mes
critiques n'ont pas lu mes oeuvres. S'ils les avaient lues, ils
auraient compris que je faisais face à une pression et à des
risques importants en les écrivant."
"Beaucoup de gens me critiquent
pour les relations étroites que j'entretiens avec les autorités
chinoises et le Parti communiste chinois (PCC). Mais en réalité,
nombre d'entre eux travaillent pour le gouvernement ou font
eux-même partie du PCC", explique cet écrivain âgé de 57 ans.
"Ma position politique n'est pas en
contradiction avec le prix Nobel", a-t-il souligné.
"Les ouvrages parlent pour leurs
écrivains. Ils ne servent aucun parti ou groupe. Les auteurs
doivent être guidés par leur conscience, se tenir en face de chaque
personne, étudier le destin et les sentiments du peuple et prendre
leurs propres décisions."
"Si vous lisez mes oeuvres, vous
savez que mes attaques visant la part d'ombre de la société sont
particulièrement sévères", a-t-il poursuivi.
Mo Yan, dont le véritable nom est
Guan Moye, est devenu jeudi le premier Chinois à remporter le prix
Nobel de littérature au cours des cent ans d'histoire de cette
récompense, apportant une joie immense aux autres écrivains et
lecteurs chinois.
Issu d'une famille d'agriculteurs
d'un village de Gaomi, Mo Yan s'est fait connaître à la fin des
années 1980 pour ses romans tels que Beaux Seins, belles fesses et
Le Clan du sorgho, porté à l'écran en 1986 par Zhang Yimou sous le
titre Le Sorgho rouge.
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