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L'ambassadeur de Chine aux États-Unis et des observateurs dénoncent le voyage « imprudent » de Nancy Pelosi à Taïwan

French.china.org.cn | Mis à jour le 03. 08. 2022 | Mots clés : Nancy Pelosi, Taïwan

L'ambassadeur de Chine aux États-Unis a qualifié mardi la visite à Taïwan de la présidente de la Chambre des États-Unis, Nancy Pelosi, d’« imprudente et provocatrice », alors que des observateurs de politique étrangère ont également donné leur avis sur les supposés risques générés par ce voyage.

« Au mépris de la forte opposition de la Chine, Mme Pelosi s'est envolée pour Taïwan mardi soir dans un grave mépris du principe d'“une seule Chine” et des dispositions des trois communiqués conjoints sino-américains ».

« La visite de la présidente de la Chambre est un événement majeur qui améliore les relations de fond entre les États-Unis et Taïwan et envoie ainsi un très mauvais signal aux forces séparatistes souhaitant l'“indépendance de Taïwan” », a soutenu l'ambassadeur Qin Gang dans une interview avec CNN.

« Cela porte un coup sérieux au fondement politique des relations sino-américaines (et) porte gravement atteinte à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de la Chine. C'est une décision imprudente et provocatrice », a-t-il avancé.

M. Qin a affirmé que Mme Pelosi « est la n°3 du gouvernement américain après le président et la vice-présidente, et sa visite sous quelque forme que ce soit et à n'importe quel moment de son mandat, est lourde de répercussions politiques, ce qui entraînera une escalade de la tension à travers le détroit de Taïwan et dans les relations américano-chinoises ».

« La situation actuelle est créée uniquement par la partie américaine, et donc bien sûr, elle doit en assumer la responsabilité », a-t-il soutenu. « Nous ferons tout ce que nous pourrons pour sauvegarder notre souveraineté et notre intégrité territoriale. Et notre réponse sera très ferme, forte et énergique », a indiqué l'ambassadeur.

Alors que Mme Pelosi a déclaré que son voyage à Taïwan visait à faire preuve de solidarité démocratique avec l’île, M. Qin a avancé que la « question de Taïwan ne concerne pas la démocratie mais la souveraineté nationale et l'intégrité territoriale de la Chine ».

« C'est l'aspiration de plus de 1,4 milliard de Chinois que de réaliser la réunification de la Chine, et c'est une volonté inflexible de toute la nation chinoise de défendre notre souveraineté nationale et notre intégrité territoriale », a-t-il affirmé.

L’élue démocrate est la plus haute responsable américaine en 25 ans à effectuer une visite à Taïwan depuis Newt Gingrich, alors président de la Chambre, en 1997. « La visite de M. Gingrich était erronée et fermement opposée par la Chine », a soutenu M. Qin.

« Une erreur ne peut justifier les erreurs suivantes de même nature », a-t-il ajouté.

Un jour avant la visite de Mme Pelosi, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby, avait déclaré que « rien n'a changé dans notre politique d'“une seule Chine” », rappelant que « notre Constitution comprend une séparation des pouvoirs […] et le Congrès est une branche indépendante du gouvernement ». Il a le même jour mis en garde la Chine contre une « réaction excessive » à ce voyage.

Michael D. Swaine, directeur du programme pour l'Asie de l'Est au Quincy Institute for Responsible Statecraft, un groupe de réflexion basé à Washington, a déclaré mardi que les responsables américains pouvaient « parler des heures » sur le fait qu’ils ne soutiennent pas l'indépendance de Taïwan.

Dans une série de commentaires publiés sur Twitter, M. Swaine a noté que la Chine estimait que « les actions des responsables américains démentent leurs propos », et qu’elle considère le voyage de Mme Pelosi comme « une trahison majeure des limites passées et le signal d'une volonté américaine de normaliser une politique d'“une Chine et d'un Taïwan” ».

« Je parie qu'une majorité du public américain n'a aucun intérêt à risquer un conflit avec une puissance nucléaire concernant une île qu'ils ne peuvent pas identifier sur une carte. Oui, les États-Unis sont profondément impliqués dans la prévention des menaces (claires) à la sécurité de Taïwan, mais dans ce cas, ils ont créé cette menace par leurs actions ; la réponse de la Chine est trop prévisible (et) les États-Unis essaient (de) bluffer la Chine en lui faisant croire qu'elle réagit de manière excessive », a prétendu M. Swaine.

Nicholas Hope, le directeur du Stanford Center for International Development, a déclaré qu'il avait espéré « avec ferveur que Mme Pelosi serait assez sage pour éviter d'aller à Taïwan ».

« Aller là-bas aggraverait l'état déjà délicat des relations sino-américaines et, je pense, ne serait dans l'intérêt d'aucun pays, ni de ceux de Taïwan », a avancé M. Hope dans une interview avec China Daily.

« Taïwan ne sera ni plus sûr ni plus prospère à la suite de cette visite purement symbolique, et beaucoup de mauvaises choses pourraient arriver », a écrit lundi le chroniqueur du New York Times Thomas Friedman. « Il s'agirait notamment d'une réponse militaire chinoise qui pourrait entraîner la plongée des États-Unis dans des conflits indirects en même temps avec une Russie dotée d'armes nucléaires et une Chine également dotée d'armes nucléaires. »

« C'est une mesure de notre dysfonctionnement politique qu'un président ne puisse pas dissuader un président de la Chambre de s'engager dans une manœuvre diplomatique que toute son équipe de sécurité nationale – du directeur de la CIA aux chefs d'état-major – a jugée imprudente », a-t-il écrit.

Dans un article de blog intitulé « Iriez-vous en guerre pour que Nancy Pelosi puisse visiter Taïwan ? », Peter Beinart a écrit sur la plateforme substack.com : « Si sa visite déclenche une réponse militaire chinoise et amène Washington et Beijing au bord de la guerre, les politiciens de Washington enrôleront-ils leurs enfants pour combattre ? »

« C'est le genre de question que les commentateurs de politique étrangère posent rarement. C'est trop impoli. Et quand il s'agit du débat sur la Chine à Washington, c'est cette politesse – le fait de ne pas parler en termes directs et humains des conséquences de la guerre – qui me terrifie », a avancé M. Beinart, qui est le rédacteur en chef de Jewish Currents, un contributeur à CNN et également professeur de journalisme à la CUNY.

« Une guerre pour Taïwan pourrait-elle faire exploser le monde entier ? Oui. Il y a peu d'Américains qui connaissent mieux la Chine que J. Stapleton Roy et Chas Freeman. Roy a grandi là-bas et y est revenu plus tard comme ambassadeur des États-Unis. Freeman a servi en tant qu’interprète lors de la visite de Richard Nixon en Chine en 1972. Tous deux ont récemment averti qu'un conflit à propos de Taïwan pourrait dégénérer en guerre nucléaire », a écrit M. Beinart.

« Combien de vies valent la peine d'être risquées pour que Nancy Pelosi puisse se rendre à Taïwan ? C'est une question impolie – une question que les médias américains devraient poser encore et encore dans les prochains jours. »

Ted Galen Carpenter, chercheur principal en études de défense et de politique étrangère au Cato Institute, a prétendu mardi sur antiwar.com : « À bien des égards, la détermination de Washington à aller de l'avant avec un plus grand soutien à Taïwan dans le cadre d'une politique globale de confinement dirigée contre la Chine rappelle les erreurs commises par les responsables américains concernant l'élargissement de l'OTAN, en particulier la campagne pour incorporer l'Ukraine, et la réponse sourde de Washington aux plaintes croissantes de Moscou. »

« L'administration doit mettre en place un retrait tranquille concernant ses liens politiques et militaires croissants avec Taipei et adopter une approche moins conflictuelle vis-à-vis de Beijing. De plus, ce changement doit aller bien au-delà du simple découragement de la visite provocatrice de Mme Pelosi à Taipei », a avancé M. Carpenter.

Selon lui, « il est devenu de plus en plus évident pour les dirigeants de la Chine que les États-Unis poursuivent une politique d'endiguement anti-chinoise à part entière, avec Taïwan comme fer de lance, dans un effort désespéré pour préserver la primauté stratégique en déclin de Washington en Asie de l'Est. »

« Il est hautement improbable que Beijing accepte passivement une présence américaine aussi intrusive dans la sphère de sécurité centrale de la Chine sur le long terme. Alors que la puissance économique et militaire de la Chine continue de croître, la résistance de Beijing aux efforts hégémoniques de Washington va s'intensifier », a-t-il soutenu.


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Source:french.china.org.cn