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À la découverte des villages mystiques des Dai

French.china.org.cn | Mis à jour le 18. 10. 2021 | Mots clés : groupe ethnique


 

Vue aérienne d’un village traditionnel de l’ethnie dai


Le groupe ethnique dai de Chine vit depuis des siècles dans le sud de la province du Yunnan, principalement dans la région de Xishuangbanna. Le bouddhisme hinayana, le polythéisme et l’animisme sont autant de religions qui se côtoient au sein de la communauté dai, laquelle possède sa propre langue écrite et une riche culture.


Traditions et culture populaires

 

Le parc impérial de la préfecture autonome dai de Xishuangbanna, situé à Jinghong, était à l’origine le jardin des rois dai. Le premier à avoir régné, il y a 700 ans, fut le roi Payazhen, et le dernier, le roi Dao Shixun, qui abdiqua en 1949, avec l’établissement de la Chine nouvelle. Il est rare, dans l’histoire chinoise comme mondiale, qu’un groupe ethnique concentré dans une même région parvienne ainsi à maintenir le pouvoir politique en place plus de 700 ans d’affilée. D’après les documents historiques, une impitoyable oppression militaire mongole au début de la dynastie des Yuan (1271-1368) contraignit les habitants du royaume féodal dai de Ruili à aller s’installer dans les vallées et zones montagneuses plus au sud. C’est là que le premier chef, ou tusi, bâtit la ville de Menglian (« la recherche d’un lieu idéal »). Le gouvernement sous Zhu Di des Ming (1368-1644) reconnut le tusi et le nomma fonctionnaire impérial de Menglian. Il contrôlait alors de nombreuses régions, dont Menglian, Lancang et Ximeng. Son bureau se trouvait dans le vieux bourg de Nayun, aujourd’hui chef-lieu du district autonome dai, lahu et wa de Menglian, la dernière cité ancienne dai encore bien conservée en Chine.

 

Le vieux village de Manzhang (« village des éléphants »), relevant de Jinghong, a un passé d’environ 500 ans. Ici, les villageois ont toujours pris grand soin de leurs vieilles demeures et de l’environnement écologique alentour. En plus de préserver le charme extérieur du vieux village, les résidents sont restés fidèles à leur culture et à leurs coutumes d’antan. C’est pourquoi, dans les ruelles de Manzhang, des effluves de vin de riz gluant mélangé à l’hydromel s’échappent de chacun des foyers faisant office de distillerie. Le tissage du bambou, la poterie « à la roue lente », les manuscrits sur ôles (feuilles de palmier), la fabrication du papier et l’art du papier découpé font partie du mode de vie et des coutumes traditionnels des Dai. Les femmes âgées dai passent beaucoup de temps sur leur métier à tisser des motifs géométriques sur soie.

 

Depuis un millénaire, les Dai transmettent au fil des générations l’art de graver des écritures bouddhistes sur des ôles avec des lames de fer. Les Dai vénèrent ces feuilles. Ces vieux manuscrits sur ôles ont toujours été considérés comme des reliques de bon augure, porteurs de l’histoire et de la culture du peuple dai. Les anciennes gravures sur feuilles de palmier découvertes à Xishuangbanna comportent en effet des extraits de classiques, de légendes, d’histoires et de poèmes du bouddhisme hinayana, en langues pali et dai.

 

La méthode de fabrication du papier dai est l’une des plus anciennes de Chine. Les feuilles de palmier se sont imposées comme support pour copier les écritures conservées dans les temples bouddhistes, d’où leur importance pour la culture dai locale. Le choix des matériaux et la fabrication en soi du papier dai sont identiques aux techniques de fabrication du papier à base d’écorce de mûrier utilisées jadis en Chine, qu’avait rapportées l’agronome Jia Sixie dans son ouvrage Techniques essentielles visant au bien-être du peuple. Désormais « fossile vivant » de la fabrication traditionnelle du papier chinois, la technique dai consiste à battre à la main la fibre issue de l’écorce de mûrier, jusqu’à obtenir une substance pulpeuse semblable à un gruau de riz.

 

Le papier dai offre une protection contre les moustiques et est assez épais pour durer des siècles sans se déchirer. Initialement destiné à la copie des écritures bouddhistes, il a permis aussi de documenter les proclamations et annonces officielles du tusi et des magistrats. Les gens ordinaires, quant à eux, utilisaient du papier dai pour confectionner des figurines et des accessoires pour les cérémonies sacrificielles. Comme il s’agissait d’une industrie artisanale, le processus de fabrication était aussi bien l’affaire des hommes que des femmes. Les hommes se chargeaient en général du lavage, de la montée en ébullition et du battage de l’écorce en pulpe, puis les femmes versaient le tout dans des moules pour le séchage.

 

Le papier dai n’est plus utilisé pour la tenue d’archives historiques, mais les ateliers de fabrication de papier dai abondent encore dans le village de Manzhang. Les locaux transforment le papier dai tout juste fabriqué en somptueuses décorations. Leurs représentations naturalistes de grappes de fleurs de frangipanier est d’une beauté sans nom.

 

Les caractéristiques culturelles de l’ethnie dai comprennent le transport à dos d’éléphant, les « danses du paon », l’ode à la propreté et le port de sarongs. Parmi les célébrations traditionnelles et religieuses de l’année, la plus renommée est la « fête de l’eau ». Mais au milieu du sixième mois du calendrier lunaire, les habitants célèbrent la « fête des portes fermées », qui dure trois mois. Par égard aux diverses activités bouddhistes qui ont lieu à ce moment-là, il est interdit aux villageois de voyager ou d’organiser des mariages. Sa conclusion est marquée par la « fête de l’ouverture des portes ». Dès lors, le gros de la saison agricole est terminé, les températures baissent et les activités bouddhistes diminuent. Les jeunes dai peuvent aller faire la cour à l’élu(e) de leur cœur dans l’espoir de se marier. Par conséquent, pour les Dai, la « fête de l’ouverture des portes » est un moment propice pour lancer des pétards, allumer des lanternes célestes et parcourir les villages. Bref, c’est la période la plus joyeuse de l’année, où chaque village, plongé dans une ambiance festive, brille de mille feux.



La vie quotidienne des Dai

 

Le peuple dai est surtout réparti dans plusieurs préfectures autonomes du Yunnan, et souvent, les villages Dai ont tendance à se concentrer en un même endroit, entouré de rizières. Les Dai résident en général dans des habitations avec une cour en bambou et un sol déformé par les racines des arbres fruitiers (cachimans, papayer, manguier, bananier, ananas et jacquier) qui y poussent. Les feuilles rouges, jaunes et vertes des héliconias rostrés contrastent vivement avec les orchidées Dendrobium, aux couleurs plus douces et au parfum si agréable, qui sont suspendues au premier étage de chaque construction en bambou. Au milieu de cette scène exotique, des jeunes femmes dai, coiffées d’un chapeau en bambou et vêtues de courts chemisiers traditionnels colorés avec des jupes droites, font des allers-retours vers et depuis les champs en terrasse à proximité. Entre-temps, des aigrettes et des pies filent dans les airs ; tandis que des paons, oies et canards déambulent dans la cour.

 

Chaque jour, au coucher de soleil, les villageois rentrent chez eux en mobylettes, motos, véhicules agricoles et voitures, après une longue journée de travail dans les champs. Leur famille les aide à décharger leur panier rempli de trésors du terroir. Les enfants surtout s’empressent de farfouiller dedans, dans l’espoir d’y trouver des friandises. Le brouhaha des activités du jour s’estompe rapidement, alors que la fumée et l’arôme du souper sur le feu se frayent un chemin jusque dans la cour de chaque demeure. Ça et là, on entend un coq chanter, un chien aboyer ou un jeune enfant pleurer. Sans oublier le son faible, mais reconnaissable entre mille, qui s’engouffre par les portes et fenêtres ouvertes : celui du journal télévisé du soir sur CCTV.

 

Les Dai vivent en paix les uns avec les autres. Souvent, des familles de trois, quatre, voire cinq générations cohabitent en harmonie sous un même toit. Conformément à la culture locale, le fils ou la fille aîné(e) loge avec l’ancienne génération. L’importance de l’égalité des genres pour la culture dai est palpable au sein des familles, car celles-ci approuvent le choix des jeunes mariés de vivre ensemble au sein de la famille du jeune homme ou de celle de la jeune femme.

 

Les temples bouddhistes theravadas font également partie du quotidien des villages dai. Le temple du village de Mengsuo, dans le district autonome wa de Ximeng, est une vitrine des caractéristiques culturelles dai. Décoré dans des tons vifs, ce temple abrite une statue dorée de Bouddha debout, adossé contre un mur rouge, ainsi que des marches, des piliers, un mur d’enceinte et des décorations tout aussi dorés, sous un toit en tuiles rouges bordées de vert. Deux statues d’animaux de bon augure de teintes or et bleu gardent l’entrée.

 

Sur un terrain de basket à proximité du temple, j’ai rencontré une jeune femme du coin, qui allait répéter un spectacle de danse dai avec ses amies dans une zone pittoresque du district de Ximeng. Quelques minutes plus tard, j’ai entendu leurs éclats de rire joyeux, puis les accents mélodieux d’un chant folklorique dai. Deux d’entre elles ont entonné un air, tandis que les autres dansaient avec une souplesse exquise au son d’une mélodie évoquant le murmure de l’eau immaculée dévalant la montagne.



Des racines ancestrales le long du fleuve Lancang

 

La montagne Jingmai, dans le district autonome lahu de Lancang, est une région magnifique mais mystique. Il s’agit de l’un des berceaux de la culture du thé en Chine. Plusieurs groupes ethniques vécurent des millénaires sous la protection de cette imposante montagne, telle l’ethnie dai, dont les racines remontent à 2 000 ans.

 

Selon la légende, il y a près de 1 800 ans, le prince tribal dai Zhaonuola prit conscience que les ressources alimentaires diminuaient à mesure que son peuple croissait. Il décida donc d’amener plusieurs milliers d’habitants vers les contrées sud, pour leur offrir un nouveau foyer. Après qu’ils eurent franchi des rivières, traversé des forêts et parcouru monts et vallées, ils arrivèrent enfin dans la sublime région où coule la rivière Lancang (actuel district de Lancang). À l’époque, ces infinies forêts vierges d’arbres et de bambous vertigineux étaient l’apanage de millions d’éléphants et d’innombrables autres espèces de bêtes sauvages.

 

Zhaonuola et son peuple s’installèrent alors dans la région de la montagne Jingmai. Pour construire leurs maisons, ils coupaient du bambou avec des outils en pierre, et ils se nourrissaient de fruits sauvages et de poissons d’eau douce. Ses nouveaux habitants jouissaient d’une vie confortable, avec un abri en dur et assez de ressources pour se nourrir et se vêtir. Aujourd’hui, d’anciens outils en pierre remontant à l’âge néolithique décorent encore l’intérieur des habitations.

 

Nuogan signifie « l’endroit où les cerfs boivent de l’eau » dans la langue dai. Le hameau de Nuogan dans la région de la montagne Jingmai est une ancienne implantation de logis bien conservés. Les Dai vivent toujours paisiblement en ce lieu, dans des habitations folkloriques grises sur pilotis. Ce hameau se trouve dans un petit bassin plat et calme, cerné de montagnes et d’arbres primitifs. Lorsque les villageois croisent, en de rares occasions, des étrangers à Nuogan, ils leur réservent un accueil chaleureux, en les invitant à venir se reposer chez eux autour d’une tasse de thé Jiangmai, la spécialité locale. Tout dans la vie ici est empreint d’un riche passé : l’histoire millénaire du village, sa culture du thé, son mode de vie et l’art traditionnel de recevoir des invités. Nuogan est aussi un endroit réputé pour les records de longévité de sa population. En effet, le résident le plus âgé aurait 128 ans.

 

En conclusion, les Dai mènent une vie paisible et tranquille dans le sud-ouest de la Chine. Et bien qu’ils entrent peu à peu dans la civilisation moderne, ils conservent les vieilles coutumes de leurs ancêtres.

 



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Source:La Chine au Présent