Chine : la "ruée vers le cordyceps" témoigne une transformation dans la région tibétaine (REPORTAGE)

Par : Norbert |  Mots clés : Chine-Qinghai-cordyceps
French.china.org.cn | Mis à jour le 10-07-2020

Alors que le début de l'été arrive dans les communautés tibétaines dans la province chinoise du Qinghai (nord-ouest), les bergers et les agriculteurs locaux commencent à se diriger vers le sol alpin à plus de 4 000 mètres au-dessus du niveau de la mer. Ici, ils passent des semaines à creuser un ingrédient coûteux dans la médecine traditionnelle chinoise - le champignon chenille.

Trouvé exclusivement en haute altitude, le champignon chenille, connu en Chine sous le nom de "ver d'hiver herbe d'été", a des propriétés de lutte contre le cancer et stimule le système immunitaire.

La ruée vers le champignon chenille, communément appelé cordyceps, qui a lieu chaque année dans de nombreuses parties du plateau chinois de Qinghai-Tibet, a apporté de la richesse à de nombreux bergers locaux, mais a également créé des problèmes écologiques.

Dans la préfecture autonome tibétaine de Yushu, une zone de production majeure de cordyceps, la récolte témoigne des changements silencieux.

RUÉE VERS LE CORDYCEPS

Depuis plus d'un mois à partir de fin mai, cette ruée vers l'or bat son plein dans la région de Sanjiangyuan de Yushu, signifiant "source des trois fleuves", abritant les sources du fleuve Yangtsé, du fleuve Jaune et du fleuve Lancang.

Ce "champignon entomopathogène" parasite une chenille de papillon qui évolue sous terre, au-delà de 3.500 m d'altitude. Le champignon pousse ensuite le reste de son corps à la surface afin de propager ses spores.

Dès que cette excroissance se pointe, des villages locaux se vident pour traquer ce champignon, une source importante de revenus pour beaucoup d'entre eux. Même les écoles sont fermées afin que les élèves et les enseignants puissent se joindre à la récolte.

Il est tellement recherché en Chine pour ses vertus médicinales qu'il récupère parfois son poids en or.

"Creuser le champignon est un travail difficile. Il exige une bonne vue, de la force physique et de la chance", a confié Tsewen, un berger du canton de Bagan.

RÉCOLTE ÉCOLOGIQUE

Allongés sur le sol alpin, essayant de repérer un petit champignon chenille aussi petit qu'une tige de pomme, les creuseurs de champignons comme Pema Khandro doivent braver les climats rigoureux du matin au soir.

Pema, 35 ans, n'est pas un novice dans ce domaine, avec des années de pratique. Après avoir localisé sa cible, Pema utilise un pic à glace pour creuser un trou d'environ dix centimètres de profondeur. Pour garder le champignon intact, elle soulève alors un amas de terre et tamise le champignon.

A l'époque, il y avait des trous partout après la saison de récolte, causant de graves dommages à la fertilité des terres dont les bergers locaux dépendent depuis des siècles. Les experts ont également averti que la vache à lait pourrait s'éteindre dans deux décennies, si aucune mesure n'était prise pour inverser la surexploitation.

Comme d'autres creuseurs, après avoir soigneusement enveloppé son trophée, Pema bouche rapidement et couvre de gazon le trou avant de passer à sa prochaine cible, afin de réduire les dommages au sol.

ALTERNATIVES POUR LA PROSPÉRITÉ

L'élevage est une industrie de base à Yushu. Cependant, les bergers locaux sont constamment confrontés à des risques en raison des conditions naturelles difficiles de la région; ce qui explique leur dépendance de la récolte des champignons.

Ces dernières années, grâce à l'essor de l'élevage écologique, 206 coopératives ont été établies dans la préfecture. Collectivement, ils sont plus forts face aux catastrophes naturelles. Avec l'appui technologique et financier du gouvernement local, les coopératives sont plus productives et efficaces que les éleveurs individuels.

Nyima Dargye dirige une coopérative dans le village de Maxiu, qui compte 60 bergers de 11 ménages. Outre le revenu de base de l'élevage, chaque ménage des coopératives a reçu près de 10.000 yuans (environ 1.425 dollars) comme dividendes l'an dernier, a-t-il indiqué.

Ces dernières années, avec l'amélioration de la sécurité sociale et l'augmentation des projets de réduction de la pauvreté, l'importance de l'"économie du champignon" a diminué.

"Creuser le champignon chenille dépend toujours de la météo. C'est difficile et cela demande aussi de la chance", a déclaré Mme Pema. "Avec de meilleures politiques, les bergers ont plus de revenus et nous nous sentons plus à l'aise pendant la saison de récolte."

A partir de 2005, la Chine a lancé son plus grand projet écologique pour protéger et restaurer l'environnement à Sanjiangyuan. En 2016, la Chine a commencé à piloter le parc national de Sanjiangyuan.

"Après que le parc a été mis en service, de nombreux bergers ont été employés comme protecteurs écologiques, chacun gagnant plus de 20.000 yuans par an", a noté Kata de l'administration du parc.

Selon les chiffres officiels, le parc emploie aujourd'hui 17.211 protecteurs écologiques locaux.

Alors que les revenus des bergers locaux se diversifient, creuser de l'or du cordyceps a perdu sa splendeur et n'est plus qu'un emploi saisonnier pour des revenus supplémentaires.

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Source: Agence de presse Xinhua
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