Les Chinois vivant en France restent à l’écart des manifestations des « gilets jaunes »

Les Chinois vivant en France ont évité le mouvement des « gilets jaunes », qui a débuté pour protester contre un projet d'augmentation du prix du carburant et s'est étendu à l'ensemble du pays.

Lors de la cinquième semaine du mouvement, des manifestations ont provoqué des émeutes et la fermeture d'importants monuments parisiens, mais la communauté chinoise a choisi de rester à l'écart, se transmettant des informations pour s'aider mutuellement à rester en sécurité.

Zhang Zhulin, qui travaille en France depuis plus de dix ans, a déclaré que la communauté chinoise du pays était généralement indifférente au mouvement, qui a pris de l'ampleur dans la société française.

« Avec ce mouvement, les membres de la communauté chinoise s’échangent des avertissements, se conseillent de rester chez eux alors que la violence fait rage », a indiqué M. Zhang au Global Times.

« La plupart d'entre eux n'aiment pas se joindre aux manifestations (contrairement aux centaines de milliers de personnes qui sont descendues dans la rue) ».

La France compte la plus grande communauté chinoise d'Europe, estimée à plus de 600000 personnes, selon un rapport de la BBC de 2016.

Tous les Chinois avec qui le Global Times s'est entretenu ont déclaré que la France était un pays sûr et que le mouvement des « gilets jaunes » ne ferait pas de mal aux gens ordinaires.

Fermés, ou rationnels?

Selon M. Zhang, ce n’est pas uniquement ce mouvement social que les Chinois évitent. Ils ignorent généralement tous les mouvements, a-t-il déclaré.

Même la jeune génération de Chinois en France ne montre aucun intérêt à se joindre aux manifestations, a-t-il ajouté.

Comme il l’a indiqué, l'application populaire chinoise WeChat permet aux jeunes Chinois de communiquer au sein de la communauté et leur permet d'ignorer tout le reste.

« En outre, les Chinois possèdent des entreprises indépendantes telles que des restaurants et des marchés de gros. Cela a aggravé leur isolement », a-t-il affirmé.

En dépit des appels de la communauté à participer à la politique française, M. Zhang a noté que les Chinois préféraient rester à distance des mouvements sociaux.

Il pense que la plupart des Chinois vivant en France ne se joignent aux manifestations que lorsque leur propre sécurité est menacée.

Lin Hao (pseudonyme), réalisateur de documentaires en France, n'est pas d'accord avec M. Zhang. Il a une vision différente de la question.

Selon lui, les Chinois vivant en France ont des valeurs différentes, ils ne font pas partie de la « culture protestataire ».

« La communauté chinoise n'est pas isolée de la vie politique. Nous pensons simplement que ces manifestations des “gilets jaunes” ne sont pas assez bien organisées », a-t-il déclaré.

« Il n'y a pas de demandes claires, et cela finit toujours avec des pillages et des destructions par des anarchistes ».

Le mouvement des « gilets jaunes », qui a débuté suite à une hausse prévue des taxes sur l'essence, s'est ensuite transformé en une campagne anti-gouvernementale contre les politiques du président français Emmanuel Macron, généralement considérées comme favorables aux riches.

Les manifestants ont bloqué des rues avec des pneus en feu et ont vandalisé des magasins, attaquant la police avec des pierres, a-t-on pu voir dans la presse.

Selon M. Lin, le mouvement est devenu incontrôlable.

« Cela est dû aux anarchistes et à l'incitation des groupes d'extrême gauche et d'extrême droite. La communauté chinoise ne veut donc pas s’impliquer », a-t-il indiqué.

Selon lui, la communauté chinoise a organisé plusieurs manifestations au cours des dernières années et connaît bien la vie politique française, en particulier les jeunes, qui s’adaptent plus facilement.

En septembre 2016, au moins 15000 personnes d'ethnie chinoise se sont rassemblées sur la Place de la République à Paris suite au décès de deux membres de la communauté qui avaient été agressés par des adolescents, a rapporté la BBC.

Fanqi, étudiante chinoise à Paris, a déclaré que le mouvement des « gilets jaunes » était devenu une campagne violente et destructrice.

Alors que le mouvement fait la une des journaux internationaux, les internautes chinois ont des sentiments mitigés à son sujet.

La photo d'un Français portant un drapeau avec les mots « L'armée rouge des ouvriers et des paysans » s’est répandue sur Internet. Certains ont dit en plaisantant que le spectre du communisme « hantait » la France.

D'autres se sont demandé si les objets éparpillés dans les rues après les émeutes avaient été fabriqués en Chine.

Une communauté pas perturbée

M. Lin a noté que de nombreux médias chinois avaient surmédiatisé le mouvement des « gilets jaunes », qui n'est pas si grave que cela en réalité.

« La vie des Chinois ici n'est pas perturbée. Les plus touchés sont les commerçants situés dans les zones de manifestation », a-t-il déclaré.

Alors que Noël approche, les entreprises situées dans les zones de manifestation ont été fortement affectées.

Des sites touristiques importants de Paris, notamment la Tour Eiffel et les Champs-Elysées, ont même dû être temporairement fermés.

Des pays comme la Belgique, la République tchèque et le Portugal ont conseillé à leurs citoyens de décaler leurs visites en France, selon un rapport de l'AFP.

Il n’existe actuellement aucune estimation des pertes des entreprises chinoises en France.

Fanqi a déclaré qu'elle évitait certains quartiers de Paris ces jours-ci, en particulier l'avenue des Champs-Elysées. Mais sa vie personnelle n'a pas été affectée de manière significative.

Le gouvernement français a fait des efforts pour calmer les esprits. Le président Macron s'est adressé aux Français il y a plusieurs jours, promettant d'augmenter le salaire minimum de 100 euros à partir de 2019 et de réduire un impôt sur les retraites, selon les médias.

Le mouvement des « gilets jaunes » lui-même n'affectera pas l'immigration et les projets d'emploi des Chinois en France, a affirmé M. Lin au Global Times.