Jack Ma critique à son tour les derniers tarifs douaniers américains

D'éminents chefs d'entreprise et experts commerciaux chinois ont qualifié les dernières taxes américaines sur les produits chinois d'irrationnelles et de destructrices pour les communautés des affaires des deux pays.

Jack Ma (de son vrai nom Ma Yun), fondateur et président du géant chinois du commerce électronique Alibaba, a déclaré que son entreprise avait abandonné son projet de créer 1 million d'emplois aux Etats-Unis en raison du conflit commercial bilatéral.

Dans un entretien exclusif accordé mardi à Xinhua, M. Ma a indiqué que son engagement de créer ces emplois – pris en janvier dernier à la suite d’une réunion avec l’alors président-élu des Etats-Unis Donald Trump – était basé sur « une coopération amicale entre deux parties ainsi que sur des prémices rationnelles et objectives de commerce bilatéral ».

Il a déclaré que « la situation actuelle a déjà détruit les bases initiales. Il n'y a aucun moyen de tenir cette promesse » alors que les tensions tarifaires sino-américaines, qui durent depuis plusieurs mois, ont atteint un nouveau sommet. Washington a annoncé plus tôt cette semaine qu’elle imposerait des taxes supplémentaires sur 200 milliards de dollars de produits chinois. Beijing a alors répliqué en imposant des droits de douane sur environ 60 milliards de dollars d’importations américaines.

Les contre-mesures de la Chine sont le résultat de son désir de préserver le libre-échange mondial et les intérêts du pays, a déclaré jeudi Gao Feng, porte-parole du ministère du Commerce.

Les tarifs douaniers imposés par l'administration Trump, qui visent 200 milliards de dollars de produits chinois, nuiront non seulement aux consommateurs et aux entreprises des deux pays, mais menacent également la chaîne de valeur mondiale, a déploré M. Gao lors d'une conférence de presse.

Les Etats-Unis devraient « faire preuve de sincérité » dans les négociations commerciales bilatérales et prendre des mesures convaincantes pour corriger leur comportement protectionniste, a-t-il ajouté.

Selon M. Gao, la Chine est actuellement en train d’évaluer l’impact potentiel de la dernière série de tarifs américains dans des domaines tels que la machinerie, les textiles, les produits chimiques et les produits agricoles.

« Parmi les entreprises potentiellement affectées, les entreprises à capitaux étrangers en représenteront près de 50% », a indiqué M. Gao, soulignant que la hausse des tarifs américains entraînera une situation dont personne ne sortira gagnant.

Il a précisé que la Chine n’allait pas stimuler les exportations en dépréciant le renminbi (ou yuan, devise chinoise), mais qu’elle allait plutôt approfondir les réformes des taux de change et maintenir sa monnaie à un niveau raisonnable et équilibré.

Pour aider les entreprises à faire face aux difficultés et aux défis auxquels elles peuvent être confrontées, le pays lancera une série de mesures conformes aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), telles que des réductions de taxes pour la facilitation des échanges, a ajouté M. Gao.

Alors que les entreprises nationales font face à une forte pression extérieure, des experts les ont exhortées à tisser des liens plus étroits avec des pays et des régions autres que les Etats-Unis.

Tong Jiadong, ancien vice-président de l'Université de Nankai, a déclaré : « Nous devons travailler avec l'Union européenne, l'Afrique et les économies impliquées dans l'initiative de “La Ceinture et la Route”, mais également continuer à respecter les règles commerciales pour arriver à un environnement commercial stable ».

Jack Ma a noté lors de son entretien qu’il avait de plus en plus confiance dans des économies telles que l’Europe, la Russie, l’Asie du Sud-Est, l’Afrique et l’Amérique du Sud.

Il a indiqué que les bases du commerce avaient été sapées, « mais nous continuerons à travailler dur pour promouvoir un développement sain du commerce sino-américain ».

En tant qu’ardent défenseur de la mondialisation, M. Ma a déclaré que le commerce n’était pas une arme et qu’il devait plutôt être « un moteur de la paix ».

Les autorités centrales chinoises ont poursuivi sur la voie qu’elles se sont fixée pour faire avancer les réformes et ouvrir l'économie aux entreprises étrangères. Le pays a également déployé des efforts concertés pour stimuler la consommation intérieure.

« Le gouvernement pourrait adopter un certain nombre de politiques visant à élargir le marché intérieur et continuer à adopter des mesures appropriées pour assouplir son secteur fiscal et monétaire », a déclaré Zhang Jie, analyste chez Guotai Junan Securities. « Le pays fera de ce défi une opportunité d'approfondir davantage les réformes et d'ajuster sa structure industrielle ».