Les parents de Wei Zexi, diplômé de science informatique à l'Université Xidian de la province de Shaanxi, qui est décédé d'une forme rare de cancer, attendent devant un funérarium à Xianyang, le 13 avril.

Le gouvernement central a dépêché une équipe d'enquêteurs auprès du géant chinois des moteurs de recherche Baidu, la société ayant été accusée par un patient hospitalier de fournir des informations trompeuses sur les traitements médicaux. Le jeune homme est depuis décédé.

L'équipe est composée de fonctionnaires de l'Administration du cyberespace de Chine, de la Commission nationale de la santé et de la planification familiale, et de l'Administration d'Etat de l'industrie et du commerce, qui supervise la publicité en ligne.

Jiang Jun, porte-parole de l'Administration du cyberespace de Chine, l'organisme de réglementation d'Internet, a indiqué que les résultats de l'enquête seront rendus publics.

Baidu fait l'objet d'une pression croissante de l'opinion publique depuis qu'un couple a affirmé en ligne que leur fils de 21 ans était décédé d'un cancer après avoir reçu un traitement d'immunothérapie dans un hôpital de Beijing.

Les actions de Baidu ont chuté de 6,8 % au Nasdaq suite au scandale.

Wei Zexi, jeune informaticien diplômé de l'Université Xidian, est décédé le 12 avril d'un sarcome synovial, un cancer rare des tissus mous. Entre septembre 2015 et avril 2016, il a reçu un traitement utilisant des cellules générées par son système immunitaire pour tuer les cellules cancéreuses.

Le traitement a été administré au centre de traitement biologique du deuxième hôpital de la police armée de Beijing.

Les parents ont écrit que leur fils a appris que ce traitement existait et que l'hôpital en question le dispensait en faisant des recherches sur Baidu. L'hôpital était classé en deuxième place sur la première page des résultats de recherche.

Avant son décès, le jeune homme avait écrit son expérience sur le site de questions et réponses Zhihu. Il décrivait le traitement comme inutile et critiquait la pratique de Baidu de faire apparaître des résultats en fonction du paiement reçu par le groupe.

Le référencement payant est un modèle de publicité utilisé sur Internet pour diriger les internautes vers certains sites. Ce système, en vertu duquel un annonceur paie un moteur de recherche pour chaque clic sur l'une de ses publicités, est depuis longtemps une source majeure de revenus pour Baidu.

Contrairement à d'autres moteurs de recherche comme Google, qui marque clairement les résultats de recherche qui sont des publicités avec une mention colorée, la liste des résultats publicitaires sur Baidu n'est pas clairement annoncée.

On ne peut voir que deux petits caractères gris qui indiquent que le résultat est en fait une publicité.

Dans un communiqué de presse, les parents de Wei ont déclaré : « Nous ne voulons pas de compensation, ni poursuivre en justice des organisations ou individus. Notre fils a publié son expérience en ligne pour un but simple : il voulait faire savoir aux gens que ce traitement est inutile. »

Wei Zexi avait écrit que d'autres hôpitaux publics lui avaient dit que ses jours étaient comptés, car son cancer en phase terminale avait été diagnostiqué en 2014. Il a déclaré que le traitement d'immunothérapie proposé par l'hôpital de Beijing avait coûté la famille plus de 200 000 yuans (31 000 dollars), et qu'une grande partie de la somme avait été empruntée à des amis et membres de sa famille.

Le jeune homme avait déjà été subi une chimiothérapie.

Cette affaire a suscité la colère du public au sujet de la réglementation de la publicité en ligne. Certains ont appelé Baidu à assumer la responsabilité des promotions médicales qu'il met en avant.

Baidu a déclaré dimanche dans un communiqué qu'il coopérerait pleinement avec l'enquête du gouvernement et que de fausses informations ne devraient pas être autorisées à circuler en ligne.

Dans une précédente réponse, aussi publiée dimanche, Baidu avait fait part de sa demande aux autorités d'enquêter sur la sous-traitance par l'hôpital de ce traitement controversé.

Les médias ont rapporté lundi que le centre de traitement biologique de l'hôpital où Wei Zexi a été traité ne faisait pas partie de l'hôpital, mais était sous-traité à une société privée en violation des règlements en vigueur.

Lundi, une visite des médias au centre a permis de constater que ses activités ont été suspendues.

L'hôpital a refusé de faire le moindre commentaire sur l'affaire.

Ying Jianming, directeur adjoint du département de pathologie de l'Institut et hôpital d'oncologie à l'Académie chinoise des sciences médicales, a déclaré que le traitement par immunothérapie était officiellement réglementé comme un domaine de recherche en science médicale, et qu'il ne devait donc pas être commercialisé ou pratiqué comme un traitement habituel dans les cliniques.

Mais dans de nombreux hôpitaux affiliés à l'armée comme celui où Wei Zexi a reçu un traitement, « cela n'est pas strictement réglementé », a-t-il révélé, en ajoutant que dans les grands hôpitaux publics, « il n'y a pas de telles pratiques ».

Toutefois, la possibilité qu'un tel traitement puisse être utile à certains patients ne peut pas être exclue, a estimé M. Ying.

Un patient souffrant de sarcome synovial en phase terminale a généralement une espérance de vie d'un mois à un an avec les traitements ordinairement proposés, comme la chirurgie et la chimiothérapie, a-t-il déclaré.

Ce n'est pas la première fois que Baidu se retrouve sous le feu des critiques pour son modèle commercial. En novembre 2008, le réseau national de télévision CCTV avait rapporté que Baidu vendait des placements prioritaires sur certains termes médicaux à de faux hôpitaux et à des fournisseurs de médicaments sans licence.

A l'heure actuelle, cette pratique n'est encadrée par aucune réglementation.

Zhu Wei, professeur associé à l'Université chinoise de science politique et de droit, a déclaré que des règles détaillées sur la publicité sur Internet devraient être adoptées le plus rapidement possible.

« Le référencement payant est une sorte de publicité et devrait être régi par la loi », a-t-il estimé.

L'Administration d'Etat de l'industrie et du commerce a rendu public un projet de loi sur la publicité en ligne pour solliciter l'opinion publique l'été dernier, mais aucune annonce n'a été faite depuis sur l'avancement du projet.