Le football français à l'assaut du public chinois !

Par : Norbert |  Mots clés : Le football français,chinois,Chine
French.china.org.cn | Mis à jour le 18-09-2014

LAURENT CASSAR, membre de la rédaction

Le Trophée des Champions, entre le Paris Saint-Germain et l'En Avant Guingamp, s'est déroulé cette année à Beijing. Pourquoi ce choix et qu'en ont pensé les amateurs de football ? Explications.

« L'Asie et la Chine, c'est l'avenir du monde. Un habitant de la Terre sur cinq habite la Chine. Elle est la 2e puissance économique du monde. La pratique du football va se développer de façon considérable en Chine, même si pour l'instant, elle est encore marginale. Mais la Chine se met au football. Nos amis et concurrents européens l'ont bien compris. À la France de faire valoir ses propres atouts, qui croyez-moi, ne sont pas négligeables. » Ce sont les mots qu'a prononcés Frédéric Thiriez, président de la LFP (Ligue de Football Professionnel), peu avant le match entre le Paris Saint-Germain et l'En Avant Guingamp. Il ne s'en cache pas : l'organisation du Trophée des Champions 2014 à Beijing avait avant tout un objectif marketing. Car la Chine est un immense marché pour le football. Un marché encore balbutiant, mais dont le potentiel fait rêver tous les clubs et sponsors de la planète football.

Le football chinois

Le football et la Chine, ça donne quoi au juste ? Une équipe nationale classée au 94e rang mondial qui n'a participé qu'à une seule Coupe du Monde (en 2002) et qui enchaîne les désillusions, comme les défaites 8-0 au Brésil et 5-1 à domicile contre la Thaïlande, respectivement en 2012 et 2013. L'entraîneur français Alain Perrin a été nommé récemment à la tête de la sélection pour essayer de redorer le blason de l'équipe nationale mais les Chinois eux-mêmes, pourtant d'un naturel optimiste et patriote, n'attendent pas grand-chose de leur équipe. « Nous sommes nuls », disent souvent les amateurs de football du pays, et ils sont nombreux. Ils se trouvent donc une grande équipe étrangère à supporter durant la Coupe du Monde. Et il en est de même lors de la Ligue des Champions.

Si on devait faire un classement des différents championnats nationaux, le championnat de Chine serait à peu près à la 15e position mondiale. Il présente en fait beaucoup de similitudes avec le championnat des états-Unis : niveau moyen des joueurs locaux (les meilleurs Chinois jouant en Europe), de jeunes Sud-Américains et Africains se servant de la Chine comme d'un tremplin vers l'Europe, et quelques stars du football mondial en fin de carrière. Alberto Gilardino, 32 ans, est la dernière de ces stars en date. Il vient d'être acheté 5 millions d'euros par le Guangzhou Evergrande, le club vainqueur de la Ligue des Champions asiatique 2014. Il s'ajoute à une liste de grands noms comme Didier Drogba ou Nicolas Anelka, payés près d'un million de dollars par mois, soit une cinquantaine de fois plus que leurs coéquipiers chinois… Mais ce sont ces joueurs qui attirent les Chinois dans les stades et qui boostent la popularité du championnat national. Néanmoins, rares sont ceux qui restent longtemps en Chine. On se rappellera à titre d'anecdote l'interview de Nicolas Anelka, alors joueur du Shanghai Shenhua depuis un an, à la télévision française en 2013 où il confessait n'avoir appris que deux choses en chinois : « ni hao » (bonjour) et « ting bu dong », qu'il avait traduit par « laisse-moi tranquille ! », alors que le sens est en fait « je ne comprends pas ». Les dirigeants du club ayant sans doute préféré lui apprendre cette phrase bien moins agressive pour répondre aux sollicitations des supporters…

Le marathon marketing du PSG !

Mais revenons au Trophée des Champions, le vainqueur du Championnat de France (le PSG – Paris Saint-Germain) opposé au vainqueur de la Coupe de France (le club de Guingamp), et tout ce qui l'entourait. Car le plus important n'était clairement pas ce match de gala, mais la tournée promotionnelle que le PSG a effectuée en Chine la semaine précédant le match ! Cette tournée a commencé à Hong Kong, où l'équipe est arrivée le 25 juillet. Le lendemain, après une séance d'entraînement matinale rendue difficile par la chaleur humide, les joueurs parisiens ont tout d'abord participé à un défilé de mode pour la marque de montres de luxe Hublot, puis ont pris part à un dîner de charité organisé par le Jockey Football Club, où s'est tenu une vente aux enchères au profit d'enfants défavorisés. Un match contre le champion de Hong Kong, l'équipe de Kitchee, était également au programme. Mais avant cela, séances de dédicaces, conférences de presse et sessions photo ont rythmé les journées des joueurs jusqu'à quelques petites heures avant le match qui fut facilement remporté par le PSG sur le score de 6-2, avec trois buts de sa star suédoise d'origine croato-bosniaque, Zlatan Ibrahimovic. C'est d'ailleurs autour de ce joueur que cette tournée en Chine s'appuyait. Joueur mondialement connu, cet attaquant au nom imprononçable pour les Chinois était l'attraction principale des médias et des amateurs de football locaux. Et comme à Hong Kong, « le temps c'est de l'argent », les joueurs sont aussi allés prendre un cours d'initiation au tai chi (tous avec la même paire de baskets Nike, bien apparente, à leurs pieds), assister à une démonstration de cuisine chinoise et sont allés rendre un hommage à Bruce Lee en posant devant sa statue, le tout face à des dizaines de photographes.

Et pendant ce temps, quid de Guingamp ? Les joueurs sont arrivés à Beijing dans l'anonymat le plus total et – faute de terrain d'entraînement prévu pour eux – ont dû s'entraîner sur une place publique de la ville située face à leur hôtel ! D'ailleurs, pour les Chinois, le Trophée des Champions se résumait à « l'équipe de Paris vient jouer à Beijing ». Mais comment leur en vouloir de ne pas connaître Guingamp, ville bretonne de 7 300 habitants ? À titre de comparaison, la plus petite ville chinoise évoluant en championnat de 1re division est Zhengzhou (club du Henan Construction) qui compte 3,1 millions d'habitants ! Comme me l'a dit une de mes collègues chinoise, « Guingamp est plus petit que certaines usines chinoises ! »

Le marathon marketing des joueurs du PSG s'est ensuite poursuivi à Beijing. Une grande séance de dédicaces était organisée aux Galeries Lafayette, où un « point PSG » avait été spécialement installé en faisant bien en sorte de mettre en valeur les sponsors du club sur différents panneaux et écrans géants. Les joueurs commencent à être un peu moins souriants et fatigués de toutes ces activités extrasportives. C'est d'ailleurs, la star en personne, Zlatan Ibrahimovic, qui exprime son mécontentement le premier dans les médias. Fatigué par le voyage, la chaleur et toutes ces obligations, il refuse même de se rendre à la dernière activité promotionnelle. Il a été remplacé par le joueur uruguayen Edinson Cavani, qui accompagné de l'entraîneur Laurent Blanc, est allé échanger quelques balles avec Wang Hao, double champion olympique et septuple champion du monde de ping-pong ! La rencontre était organisée par Huawei, numéro 3 mondial de la téléphonie mobile et unique sponsor asiatique du club. Le décor était somptueux : un ancien temple datant du XVe siècle reconverti en hôtel et situé à deux pas de la Cité interdite. L'incident diplomatique fut en revanche évité de peu lorsque Laurent Blanc sortit son téléphone Apple devant les photographes et les caméras ! Il fut gentiment invité à le garder tout au fond de sa poche…

Et enfin, le match !

Le match s'est tenu le 2 août au Stade des Travailleurs, l'antre du Beijing Guoan, qui compte 55 000 places. Le prix des places variait entre 200 et 550 yuans (25 et 65 euros)… avant qu'elles ne soient bradées pour un peu plus de 10 euros deux jours avant le match afin de garantir des tribunes pleines pour soigner l'image du Championnat de France à la télévision. La plupart des Français voulaient surtout voir Zlatan Ibrahimovic jouer. « J'ai deux pères : mon père et Zlatan ! » dit Baptiste, un Français travaillant à Beijing. « Quand je n'ai pas le moral, je regarde ses plus beaux buts de l'année dernière sur internet », ajoute-t-il. Quant à Marie qui travaille également à Beijing, c'est plutôt le physique du Suédois qui l'attire : « Zlatan, c'est une bombe tant footballistique que physique », s'exclame-t-elle.

Aux alentours du stade, c'est la cohue : des milliers de Chinois et d'étrangers convergent vers les portes du stade entre les stands de vendeurs de maillots et d'accessoires du Beijing Guoan et du PSG ainsi que des vendeurs de billets au noir proposant des places à 50 yuans (moins de 6 euros). Il est 20h mais il fait encore très chaud ce samedi soir, 32°C, avec un fort taux d'humidité. La pollution est aussi de la partie avec un taux dépassant largement la cote d'alerte française. Le match aurait probablement été annulé en France, mais ici, il se joue. Dans les tribunes, les maillots du grand Zlatan sont partout. La tournée promotionnelle et la grande séance de dédicaces aux Galeries Lafayette ont apparemment porté leurs fruits. Le stade n'est pas plein et le public est très cosmopolite. à ma gauche, est assis un groupe de quatre Colombiens qui me demandent d'où sort cette équipe de Guingamp. Devant moi, un groupe de Parisiens travaillant à Shanghai, venus ici pour le match. Et derrière moi, une famille chinoise équipée de trompettes en plastiques, de sachets de pop-corn et de jumelles.

Sur le terrain, le PSG marque rapidement deux buts, par Zlatan Ibrahimovic bien sûr ! Les spectateurs sont contents, ils ont vu ce qu'ils étaient venus voir. Mais ensuite, le public se met plutôt à encourager Guingamp ! « C'est une petite équipe, ils jouent avec le cœur ! », me dit un Chinois. Malgré les encouragements sur chacune de leurs (rares) actions, le score en reste là, victoire du PSG par 2 à 0. Le public est en peu déçu du spectacle proposé, les joueurs s'étant vite fatigués par la chaleur, et la différence de niveau entre les deux clubs était trop importante pour avoir un beau match. On se plaignait aussi du prix de l'eau, 10 yuans le verre (plus d'un euro). Cependant, l'essentiel fut atteint pour le PSG : les maillots du club se sont très bien vendus, les joueurs ont pris de belles photos avec les sponsors du club, et ils ont remporté le match. Quant à Guingamp, les joueurs se sont consolés en allant tout simplement manger un bon steak-frites au restaurant français O'Steak, passant inaperçus au milieu des autres clients !

Suivez China.org.cn sur Twitter et Facebook pour rejoindre la conversation.
Source: La Chine au Présent
Les dernières réactions            Nombre total de réactions: 0
Sans commentaire.
Voir les commentaires
Votre commentaire
Pseudonyme   Anonyme
Retournez en haut de la page