Yang Shuai n'avait jamais imaginé qu'il irait à l'université, sept ans après avoir renoncé à l'examen national de fin d'études secondaires pour devenir ouvrier migrant à Shanghai.

Ce jeune homme de vingt-sept ans, originaire de la province de l'Anhui, fait partie des mille premiers migrants à bénéficier d'une formation de trois mois en administration des affaires depuis fin novembre. Le programme lui permet d'apprendre les compétences nécessaires à la nouvelle génération de travailleurs migrants désireux de progresser dans leurs villes d'accueil.

La formation comprend des cours d'économie, de gestion et de droit. À la clé est un diplôme d'associé de l'Université de la télévision de Shanghai.

Yang vient d'être promu responsable de la maintenance de Shanghai Wanji Mechanical Construction Engineering Co Ltd, après sept ans de travaux manuels. Le programme n'a pas seulement réalisé son rêve d'aller à l'université, il a également fait de lui un meilleur chef d'équipe.

« Mon poste exige des compétences de gestion, qui pour parler franchement, étaient au-delà de mes capacités en raison de mon éducation et expérience limitées », confie-t-il.

« C'est grâce à ces cours que j'ai appris à bien faire mon travail. De nombreux travailleurs migrants de ma génération ne cherchent pas seulement des emplois à la ville, mais aussi de meilleures opportunités. Nous sommes capables de faire davantage que des tâches manuelles », souligne-t-il.

La nouvelle génération de migrants, nés dans les années 1980 et 1990, a un niveau d'éducation et plus de compétences que leurs parents. Ils deviendront la pierre angulaire de la main-d'œuvre industrielle durant le XIIe plan quinquennal (2011-2015).

Shanghai compte 4 millions de travailleurs migrants, soit un cinquième de la population de la ville. Environ 40 % d'entre eux ont poursuivi leurs études au-delà du lycée.

« Contrairement à leurs pères et grands-pères, qui ont fait des travaux ingrats dans les villes côtières du sud-est de la Chine pour nourrir leur famille restée à la campagne, la nouvelle génération vient dans les villes dans l'espoir de s'y installer et de gagner la reconnaissance sociale », explique Fang Yuping, du syndicat du district de Yangpu, qui promeut et organise des formations pour les migrants.

Le nombre de citadins devrait doubler d'ici 2050, amenant un niveau d'urbanisation sans précédent dans l'histoire humaine. Plus de 400 millions de personnes vivant en zones rurales se déplaceront vers les villes ou verront l'urbanisation de leurs villages dans les quinze prochaines années. Selon le gouvernement, ce mouvement d'urbanisation permettra de soutenir la croissance économique rapide.

« Puisque les travailleurs migrants font aujourd'hui partie intégrante des villes, nous devrions les accepter et leur offrir de meilleures opportunités de promotion sociale », estime M. Fang. Il remarque également qu'avec l'accélération de l'intégration urbaine et rurale au cours du XIIe plan quinquennal, les migrants bénéficieront de plus en plus d'une égalité des chances.

« Les progrès en ce sens ont été évidents ces dernières années », souligne-t-il. « Par exemple, les enfants de travailleurs migrants peuvent à présent être admis dans les écoles publiques, ce qui relevait auparavant du privilège exclusif des élèves de la localité. Plus d'ouvriers sont couverts par la sécurité sociale, même si les institutions au service des populations urbaines et rurales sont toujours séparées ».

Wang Bifu, l'un des collègues de Yang venu de Suqian, dans la province du Jiangsu, estime que l'intégration urbaine et rurale signifiera un meilleur futur pour les grands espaces ruraux de la Chine.

« Je rentrerai peut-être dans mon village, car je pense qu'il y aura plus d'opportunités qui s'ouvriront à nous pour lancer notre propre entreprise », déclare-t-il.