| Depuis la création du titre de dalaï-lama au Tibet il y a plus de 400 ans, le mot dalaï-lama est inséparable de l'histoire politique du Tibet.
Selon Liu Hongji, chercheur du Centre de recherches tibétologiques de Chine, le mot dalaï-lama n'est pas intrinsèque à la culture tibétaine, au même titre que d'autres mots chinois, celui-ci est un emprunt lexical d'origine étrangère.
Pendant la dynastie des Ming (1368-1644), les forces mongoles qui avaient établi la dynastie des Yuan (1206-1368) ont reculé vers le plateau mongol, et poursuivirent leur développement vers l'ouest. Depuis le plateau de Mongolie, ils occupèrent ensuite une grande superficie de l'Asie centrale, parallèlement, certains pouvoirs du khanat mongol furent créés les uns après les autres au Xinjiang et au Qinghai. A la fin de la dynastie des Ming et au début de la dynastie des Qing, le Qinghai était sous la domination de la tribu mongole des Tumet.
En 1578 de l'ère chrétienne (sixième année du règne de l'empereur Wanli des Ming), Sonam Gyatso, chef de l'école Gelugpa du bouddhisme tibétain (également connue comme école des Bonnets jaunes), enseigna la religion au Qinghai et en Mongolie intérieure. Troisième successeur de Tsongkhapa, fondateur de l'école Gelugpa, Sonam Gyatso marqua l'avènement de la réincarnation du tulku de l'école Gelugpa. Gendun Drupa, premier disciple de Tsongkhapa, était chef du monastère de Drepung, l'un des trois grands monastères de Lhassa. Après son nirvâna (mort), Gendun Gyatso lui succéda. Selon les dernières volontés de Tsongkhapa, les hiérarques de l'école Gelugpa décidèrent de la réincarnation de Gendun Gyatso. A la suite de son nirvâna, Sonam Gyatso, trois ans, fut invité au monastère de Drepung et devint le premier tulku de la réincarnation de Gendun Gyatso de l'école Gelugpa.
Alors que Sonam Gyatso enseignait la religion en Mongolie, celui-ci rencontra Altan Khan, chef de la tribu mongole des Tumet, au bord du lac Qinghai. Altan Khan lui conféra le titre de « dalaï-lama ». En langue mongole, dalaï signifie le sens d'océan, et en langue tibétaine, lama revêt le sens de sagesse, les deux mots combinés prennent le sens d'« Océan de sagesse ». A cette époque, ce titre était une distinction honorifique entre les représentations mongoles et tibétaines, et ne possédait pas de sens politique et légal.
Altan Khan, avait déjà reçut le titre de prince Shunyi (littéralement la loyauté et la droiture) octroyé par la dynastie des Ming. Sonam Gyatso le chargea de demander à la cour des Ming de lui conférer un titre officiel. Il envoya pour ce faire une lettre à Zhang Juzheng, premier ministre des Ming. Quelques mois après, l'empereur Wanli des Ming lui envoya une lettre dans laquelle figurait l'appellation : « dalaï-lama ».
En 1587, le gouvernement de la dynastie des Ming reconnût officiellement le titre de « dalaï-lama ». Lorsque Sonam Gyatso reçut ce titre, il devint le 3e dalaï-lama. Les deux premiers furent admis par les générations futures. Gendun Drupa et Gendun Gyatso étaient respectivement le premier et le deuxième dalaï-lama.
En 1653, à l'invitation de la cour impériale des Qing, le 5e dalaï-lama se rendit à Beijing. L'empereur Shunzhi poursuivit l'utilisation du titre de dalaï-lama, et lui conféra officiellement le titre de : « dalaï-lama, gardien de l'enseignement du Bouddha qui réside dans la Félicité, le très vertueux séjour divin de l'Ouest, l'union de l'enseignement pour tous les êtres sous le Ciel ». Il lui offrit un livre et un sceau en or (ce dernier fut gravé respectivement en chinois, mongol et tibétain). Depuis lors, le titre de dalaï-lama confère à un rôle politique et jouit d'un effet légal.
En 1751, afin de mieux gouverner le Tibet, le gouvernement des Qing demanda au 7e dalaï-lama de prendre en charge le pouvoir local et procéder au prélude de l'unité entre les pouvoirs politiques et religieux. Le dalaï-lama et le panchen-lama sont les deux grands successeurs de Tsongkhapa, ils ont adopté le système original de réincarnation par héritage des tulkus. Aujourd'hui, le dalaï-lama appartient à la quatorzième génération, tandis que le panchen-lama appartient à la onzième.
Au cours de la réincarnation du tulku, on pouvait parfois trouver quelques « enfants-réincarnations ». Pour éviter le différend et la dispute, en 1792 (57e année du règne de l'empereur Qianlong des Qing), l'empereur Qianlong fit concevoir deux urnes en or, dont l'une fut envoyée à la lamaserie Yonghegong de Beijing et l'autre, au monastère de Jokhang. Lors de la réincarnation de tous les tulkus tibétains et mongols du bouddhisme tibétain enregistrés au département des affaires religieuses, tels que le Khutukhtu Canggya, Jebtsundamba, le dalaï-lama et le panchen-lama, on doit écrire le nom des « enfants-réincarnations » trouvés sur la tablette en ivoire, en les plaçant dans l'urne en or. Ensuite, la sélection aléatoire effectuée à l'aide de l'urne en or déposée jusqu' à la lamaserie Yonghegong de Beijing ou au monastère de Jokhang était surveillée par le ministre du département des affaires religieuses ou par l'Amba (commissaire impérial) au Tibet. Après avoir été intronisé, l'enfant-réincarnation devient officiellement « tulku réincarnation ».
Si l'on ne trouve qu'un seul enfant-réincarnation, il faut le soumettre à l'approbation du gouvernement central par l'intermédiaire de commissaire impérial au Tibet afin d'éviter la sélection aléatoire.
Le 14e dalaï-lama actuellement exilé en Inde avait été approuvé par le président du gouvernement de la République de Chine d'alors. |