Quotidien du peuple : Voilà dix ans de rétrocession de Hongkong à la mère patrie, ainsi que de la pratique d'« un État, deux systèmes » et d'« administration de Hongkong par les Hongkongais ». Vous étiez l'un des principaux témoins du retour de Hongkong et vous assumez maintenant les fonctions de chef de l'exécutif. Comment estimez-vous les changements qui se sont opérés à Hongkong depuis dix ans ?
D. T. : Comme l'a dit le premier ministre Wen Jiabao, au cours de ces dix ans depuis son retour, Hongkong a traversé un chemin extraordinaire. L'une des raisons, je crois, est que le terme « un État, deux systèmes » est un concept récent, lequel signifie deux modes de vie, deux monnaies, deux systèmes juridiques, voire même deux concepts de valeurs dans un même pays. Probablement au début, de nombreuses personnes étaient perplexes vis-à-vis de ce concept, mais aujourd'hui, dix ans plus tard, nous voyons que les contacts entre Hongkong et l'intérieur de la Chine sont plus forts que jamais sur le plan économique, touristique et culturel. Des enquêtes différentes ont aussi montré que les Hongkongais accordent une reconnaissance de plus en plus forte à l'État et se montrent de plus en plus confiants envers le gouvernement central. Mais dans le même temps, nous accordons toujours une grande considération aux valeurs qui font l'âme et le mode de vie de Hongkong. Tout cela démontre que le concept d'« un État, deux systèmes » est appliqué avec réussite. Certes, nous sommes capables d'améliorer cette évolution tout moment, mais à parler d'un concept sans précédent, nous avons obtenu des résultats avec beaucoup de peine.
Q. P. : De nombreuses personnes ont aimé juger à l'aune de la prospérité économique le succès du concept d'« un État, deux systèmes ». Mais en fait, il semble que l'administration sociale, le niveau de l'éducation, la probité et l'efficacité ainsi que le sens de la responsabilité des citoyens méritent d'être plus souvent mentionnés.
D. T. : C'est vrai. La supériorité de Hongkong réside en outre dans son champ d'horizon international et l'existence d'un réseau international. Les hommes talentueux des quatre coins du monde sont heureux de venir s'épanouir à Hongkong, beaucoup d'entre eux considèrent Hongkong comme leur pays d'adoption, parce que nous considérons les valeurs communes fondamentales, telles que la justice, la liberté, le respect et la tolérance. Par ailleurs, le système de marché est aussi un avantage reconnu de Hongkong. Nous avons un système de crédit parfait. Le secteur des loisirs, les commerces, les banques, l'assurance et les services juridiques placent tous le crédit et la bonne foi au cœur de leur développement. Nous protégeons pleinement la propriété intellectuelle, ce qui est favorable au développement des marques et à la création culturelle. La société de Hongkong est hautement ouverte et libre, son système juridique est strict et complet, la concurrence loyale règne dans son environnement commercial et le gouvernement préserve la probité et la grande efficacité, ce qui permet d'attirer de nombreuses entreprises transnationales pour qu'elles installent leur siège régional et un bureau à Hongkong.
Q. P. : Vous avez grandi et travaillé à Hongkong. En particulier, vous avez travaillé pendant longtemps au sein du gouvernement. Vous êtes donc témoin des changements de la société hongkongaise. Comment jugez-vous l'écologie politique de Hongkong et les souhaits du public à ce sujet et comment voyez-vous son attente du gouvernement ?
D. T. : Les habitants souhaitent que le gouvernement réfléchisse sur les politiques les concernant. Cela me demande de sortir de mon hôtel, non seulement pour rendre visite aux citoyens, mais aussi changer radicalement l'attitude du gouvernement lors de l'élaboration des politiques. Lors de l'élaboration des politiques, en plus de la question « qu'est-ce que nous pouvons faire pour les habitants », nous devons aussi nous demander : « Qu'est-ce que nous pouvons faire ensemble avec les habitants ? » Dans mon prochain mandat, l'opinion publique deviendra le cœur de nos décisions. Á l'avenir, les citoyens participeront aux décisions concernant les affaires publiques dans une plus large sphère et de manière plus approfondie. Le gouvernement communiquera avec le public le plus tôt possible, recueillera ses opinions dès le début d'une décision.
Q. P. : Votre carrière professionnelle est essentiellement occupée par le rôle de fonctionnaire du gouvernement. Il y a un grand changement d'un fonctionnaire ordinaire au chef de l'exécutif, par exemple, mode de conduite, mode de décision et conscience du rôle. Tout cela nécessite des adaptations, avec un positionnement et des exigences différents. Quelle est votre expérience des deux rôles ?
D. T. : J'ai entamé ma carrière administrative en 1967 et cela fait quarante ans que je suis au service des citoyens. Quel que soit mon service et mon poste, j'ai une conviction : mettre tout mon cœur à l'ouvrage. Je tiens cette habitude de mon père qui était très sévère avec moi et me posait des exigences très strictes. Ces approches ont formé mon sens des responsabilités et m'ont entraîné à faire face aux choses avec une attitude sérieuse, à réfléchir minutieusement lors des prises de décisions, à agir avec prudence. C'est très contradictoire je pense qu'il faudrait le remplacer par agir avec prudence. Et plus important, il faut savoir tenir ses engagements ; on ne peut pas faire des promesses facilement. En tant que fonctionnaire, face à une affaire, j'analysais avec raison, trouvais la meilleure solution et puis agissais. Comparativement, je travaillais plutôt selon les lettres et les chiffres. Le chef de l'exécutif, lui, est un homme politique. La prise de décision lui est importante. Et au cours de la prise d'une décision, il lui faut synthétiser les opinions de toutes les couches sociales ; il lui faut faire des études détaillées, obtenir les estimations publiques et équilibrer les intérêts des diverses parties. Pour toute chose et à tout moment, il doit faire preuve d'une grande écoute et ouvrir les yeux pour voir clairement la situation et les changements sociaux et bien entendre la voix des citoyens. Toutes les choses ne sont pas raisonnables ; on doit tenir compte des besoins sentimentaux. Les Hongkongais ont une particularité : ils s'efforcent de s'épanouir sans relâche. Cet esprit continuera d'entraîner Hongkong vers l'avant. Et avec cette même conviction, je mènerai à bien mon travail de chef de l'exécutif.
Q. P. : La réussite de la pratique du concept d'« un État, deux systèmes » exercera une influence profonde sur l'avenir de Hongkong. Votre fonction de chef de l'exécutif est pour l'instant bien assumée. Comment continuerez-vous cette pratique et prolongerez-vous cette réussite ?
D. T. : Sur le plan économique, nous promouvrons les infrastructures et de gigantesques travaux de construction qui aideront à accroître la compétitivité de Hongkong, y compris le projet du pont reliant Hongkong, Zhuhai et Macao, le projet de développement des zones frontalières, la zone artistique et de loisir à l'ouest de Kowloon ainsi que d'un quai pour les paquebots. Certes, nous devrons aussi tenir compte des traditions de vie des habitants, protéger l'environnement et les sites et monuments historiques. Sur le plan social, en profitant du déroulement des travaux d'envergure, le gouvernement promouvra la coopération entre les milieux d'affaires, les citoyens et le secteur public pour développer l'« entreprise sociale », créer des emplois et réduire le nombre de chômeurs. Nous continuerons d'investir dans l'éducation, renforcer la mobilité sociale, afin de permettre à la population modeste d'accéder à de nouvelles perspectives, cela en vue de résorber efficacement la pauvreté d'une génération à l'autre. Bien entendu, tout cela vise à améliorer la qualité de vie de nos habitants. Nous nous efforcerons d'améliorer la qualité atmosphérique, je peux citer quelques mesures : coopération avec la province intérieure du Guangdong, contrôle strict de l'émission de matières polluantes par la compagnie de l'électricité de Hongkong, encourager les citoyens à réduire la consommation de sacs plastiques et à éteindre leur moteur quand leur véhicule est à l'arrêt. Pour relever le défi du vieillissement de la population, nous consacrerons davantage de ressources dans les domaines des soins médicaux, des services aux personnes âgées, de l'éducation et de l'assurance retraite. Nous introduirons un nouveau plan afin de réunir des fonds dans le domaine médical, encouragerons la natalité des habitants, encouragerons les hommes de talent de diverses localités à s'installer à Hongkong. En outre, nous promouvrons la démocratie, répondrons aux attentes des habitants en la matière, agirons en conformité avec la Loi fondamentale afin d'acheminer la région administrative spéciale de Hongkong vers les deux suffrages universels.
Parcours de Donald Tsang Yam-kuen
1944 Naissance
1964 Diplômé du Wah Yan College et devient représentant de commerce
1967 Rejoint le gouvernement britannique de Hongkong
1971 Réussit l'examen de fonctionnaire, puis assume les fonctions de directeur administratif et directeur commercial. Pendant ce temps, il obtient la maîtrise en administration publique de l'Université de Harvard. 1995 Chef des Finances
1997 Premier directeur des Finances de la Région administrative spéciale de Hongkong
2001 Directeur administratif
2005 Chef de l'exécutif de la Région administrative spéciale de Hongkong
2007 Second mandat
|