À la veille de sa visite d'État en République de Corée, le premier ministre Wen Jiabao a donné, le 5 avril 2007, une interview conjointe à 19 médias sud-coréens, parmi lesquels l'agence de presse Yonhap, les quotidiens Chosun Ilbo et Dong-A Ilbo, et KBS (Korea Broadcasting System).
« Bon après-midi. Je suis très impatient avant ma visite en République de Corée. Je vais m'y rendre avec un esprit d'amitié et de coopération. Je voudrais présenter, de la part du peuple chinois, mes salutations cordiales et mes meilleurs vœux au peuple sud-coréen, et je vais répondre avec plaisir vos questions.
Je vous remercie pour votre présence malgré vos obligations. Je souhaite que votre visite en République de Corée et au Japon soit un succès. On sait que la Chine joue un grand rôle dans le mécanisme des négociations à six ; quel est votre avis sur l'établissement de la paix dans la péninsule coréenne ? Quel rôle la Chine jouera-t-elle dans l'optique d'une réunification de la Corée ?
Cela fait plus d'un demi-siècle que l'armistice a été signé dans la péninsule coréenne, cependant, aucun mécanisme pacifique n'y est encore établi, ce qui est anormal. Le plus important pour l'établissement d'un mécanisme pacifique, c'est d'éliminer toute forme de guerre froide. Nous espérons que toutes les parties concernées renforceront la consultation et le dialogue dans le cadre des négociations à six, et créeront des conditions favorables à l'établissement d'un mécanisme pacifique dans la péninsule, pour sa stabilité durable.
En fin de compte, les deux moitiés de la péninsule sont seules aptes à régler pacifiquement ce problème. Nous voudrions voir un raffermissement de la confiance mutuelle et une amélioration des relations à travers le dialogue, et une réunification pacifique et autonome. Le gouvernement chinois souhaite jouer un rôle d'accélérateur à cet effet.
Le problème historique de Goguryeo (Koguryo) constitue un différent entre la Chine et la République de Corée et une prière d'achoppement pour les relations d'amitié sino-coréennes. En outre, les relations entre les peuples des deux pays se sont récemment tendues à cause du problème du Mont Changbai. Qu'en pensez-vous ?
L'amitié entre la Chine et la République de Corée remonte à des millénaires, ce qui offre une condition favorable au développement des relations entre les deux pays. Il n'existe pas de différend territorial entre la Chine et la République de Corée ; c'est un principe politique très important pour le développement des relations. En ce qui concerne les questions d'ethnies et de changements de territoire, il faut les traiter correctement et judicieusement, sous le principe de la séparation entre science et politique, entre réalité et histoire, pour ne pas influer les relations entre les deux pays.
À la fin de 2005, lors de la visite du président Hu Jintao, la République de Corée a reconnu à la Chine le statut d'économie de marché complète; c'était le premier parmi les pays dont le volume d'échanges annuel avec la Chine est supérieur à 100 milliards de USD. La coopération économique revêt d'une signification très importante pour les deux pays. Quelles mesures concrètes prendra la Chine pour la renforcer ?
Le commerce entre la Chine et la République de Corée s'est développé rapidement à partir de l'établissement des relations diplomatiques il y a 15 ans. En 2006, le volume des échanges bilatéraux a dépassé 130 milliards de USD, soit 25 fois plus qu'il y a 15 ans. Pour le moment, on compte plus de 30 000 entreprises sud-coréennes installées en Chine, avec un montant d'investissement cumulé de 35 milliards de USD, et le nombre d'échanges personnels entre les deux pays dépasse les cinq millions par an. Nous suivons le principe d'égalité, d'avantages réciproques et de complémentarité mutuelle, c'est pourquoi les relations commerciales entre la Chine et la République de Corée sont si étroites.
Le président Hu a visité votre pays en 2005, et votre président Roh Moo-hyun est venu en Chine l'année suivante. Les deux pays ont fixé l'objectif du développement de leurs relations commerciales : fournir des efforts pour que le volume des échanges bilatéraux atteignent 200 milliards de USD d'ici à 2012. De plus, ils ont établi le Projet de développement à moyen et à long terme de la coopération économique et commerciale sino-coréenne, lancé cinq mesures favorisant les investissements et les échanges commerciaux, et listé douze domaines de coopération essentiels.
Dans le contexte de mondialisation économique, les relations commerciales entre la Chine et la République de Corée sont entrées dans une nouvelle phase de développement : il s'agit à présent d'étendre les domaines de coopération (économies d'énergie, protection de l'environnement, high-tech et technologies de l'information), d'élever leur niveau (avantages mutuels, développement durable et équilibré), d'affronter conjointement les défis (consultation et collaboration bilatérales ou dans les cadres de l'OMC, de l'APEC, de l'ANASE 10+3 ou du sommet de l'Asie de l'Est)…
Nous apprécions hautement l'attitude de la République de Corée, qui reconnaît à la Chine le statut d'économie de marché complète. La recherche conjointe non gouvernementale sur la zone de libre-échange a déjà pris fin, alors qu'une recherche conjointe de gouvernement, des milieux industriels et scientifiques sont désormais en vigueur. Nous souhaitons accélérer les recherches et présenter le plus tôt possible un plan gagnant-gagnant, afin d'accélérer la construction de la zone de libre-échange entre la Chine et la République de Corée.
L' « engouement sud-coréen » a joué un rôle important dans l'encouragement des échanges entre la Chine et la République de Corée et dans le renforcement de l'amitié entre les deux peuples. Mais il semble décliner ces derniers temps. Qu'en pensez-vous ? Pour le 15e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques, existe-t-il des plans pour étendre les échanges culturels entre les deux pays ?
Les échanges culturels entre la Chine et la République de Corée remontent loin dans le passé, ce qui est favorable à la communication, à la compréhension et à l'amitié. Les Chinois, surtout les jeunes, sont très intéressés par la culture sud-coréenne, et le gouvernement chinois continuera à soutenir les activités d'échanges entre les deux pays. Cette année marque le 15e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques et une année croisée Chine-République de Corée. Parmi les 47 projets d'échanges proposés par le gouvernement chinois, les activités culturelles représentent une majorité écrasante. À l'occasion de ma visite dans votre pays, j'assisterai, avec des dirigeants, à l'inauguration de cette année croisée. Je suis certain que les échanges culturels entre la Chine et la République de Corée en sortiront renforcés.
Au cours de l'amélioration de sa structure économique, la Chine a progressivement limité les nombreuses mesures favorables aux entreprises à capitaux étrangers. L'environnement des affaires est bouleversé et les entreprises étrangères s'en soucient beaucoup. Quel est votre avis sur ce phénomène ?
À partir de la réforme et de l'ouverture, la Chine a appliqué une série de politiques préférentielles encourageant l'investissement des entreprises à capitaux étrangers et l'introduction des capitaux et technologies étrangers, ce qui a accéléré le développement de l'économie chinoise et en même temps renforcé ses relations économiques avec d'autres pays. L'économie chinoise se trouve dans une période très importante de réajustement de sa structure ; les nouvelles politiques préférentielles, qui varient en fonction des industries, remplacent des mesures qui variaient en fonction de la provenance des capitaux. L'Assemblée populaire nationale a adopté il y a peu une nouvelle loi sur l'Impôt sur le revenu des entreprises, qui normalise l'impôt et donne aux entreprises à capitaux nationaux comme étrangers un environnement de concurrence équitable.
Pour les industries de haute technologie, les entreprises à bénéfice dérisoire, les zones économiques spéciales et les régions de l'ouest du pays, nous réservons des politiques préférentielles pour les entreprises à capitaux étrangers. Elles bénéficient d'une période de cinq ans pour s'adapter. Cela n'influera pas sur la gestion des entreprises à capitaux étrangers installées en Chine. La Chine possède un ensemble des lois et règlements pour les entreprises à capitaux étrangers et leur offre un environnement de marché juste et stable, ce qui constitue les conditions et garanties indispensables à l'introduction et à l'encouragement des capitaux étrangers.
Les ressources en main-d'œuvre de la Chine constituent un immense avantage, non seulement en quantité mais aussi en qualité et en coût de revient. Nous renforcerons les contrôles sur le secteur des services et la formation de la main-d'œuvre. De plus, je voudrais souligner que nous protégeons, conformément aux lois, les droits et intérêts légitimes des commerçants étrangers résidant en Chine ; nous demandons par conséquent à ces derniers de protéger les droits et intérêts légitimes des ouvriers chinois. »
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