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Conférence de presse du 16 mars 2007 en présence du Premier ministre Wen Jiabao



Wen Jiabao, premier ministre au Conseil des affaires d'État, a rencontré le 16 mars des journalistes chinois et étrangers et répondu à leurs questions, à l'occasion d'une conférence de presse tenue dans le Grand Palais du peuple pour la clôture de la 5e session annuelle de la 10e Assemblée populaire nationale (APN), sur l'invitation du porte-parole de l'APN Jiang Enzhu.

Wen : Mesdames, Messieurs, Camarades, voilà ma dernière conférence de presse en tant que chef du gouvernement lors des sessions de l'APN et de la Conférence consultative politique du Peuple chinois (CCPPC). Des citoyens de toute la Chine ont suivi les débats avec passion ; ils m'ont adressé plus d'un million de questions dans l'internet, qui ont été lues par 26 millions d'internautes. Hier, je surfais sur un site et je suis tombé sur ces questions : sommes-nous proches du premier ministre dans son cœur ? Qu'est-ce qui se cache dans sa pensée ? Dans l'après-midi, j'ai reçu une lettre écrite par les élèves d'une école primaire, que m'a transmise un député. Débordé comme je l'étais, j'ai griffonné quelques vœux à l'aide d'un pinceau. J'ai également lu, en ligne, qu'un membre de la CCPPC avait appelé, pour la quatrième année consécutive, l'institution d'un système d'assurance médicale pour les enfants. J'ai pris sa proposition au pied de la lettre et j'ai immédiatement donné des instructions pour faire de la santé des enfants l'une des priorités auprès des autorités compétentes.

Voilà quatre ans à présent que cette équipe est au gouvernement. Ces quatre années nous ont enseigné le principe fondamental qui veut que le pouvoir que nous possédons nous est intégralement confié par le peuple et qu'il appartient donc, in fine, au peuple. Toute notre action doit être guidée par le peuple : compter sur lui et lui consacrer nos réalisations. Il s'agit de remettre au goût du jour la mission du service public. Les membres du gouvernement doivent être de bons serviteurs du bien public et se mettre au service du peuple. Ils n'ont pas d'autre pouvoir. Il nous faut garder la conviction que tant que nos esprits seront libres, que nous suivrons la marche du temps, que nous chercherons la vérité, que nous poursuivrons les réformes et la quête d'un développement scientifique, harmonieux et pacifique, nous ferons de la Chine un pays prospère, démocratique, culturellement avancé et moderne.

« La création d'une agence d'investissement chinoise n'affectera pas le dollar négativement. »

Wall Street Journal (États-Unis) : Les investisseurs internationaux montrent un intérêt très marqué pour le marché des changes chinois. Pensez-vous que la croissance de la Bourse des valeurs depuis deux ans est trop rapide, que les investisseurs chinois prennent trop de risques ? Comment le gouvernement compte-t-il contenir ou réguler le marché ? Par ailleurs, le gouvernement a annoncé son intention de créer une agence qui aurait pour mission de diversifier les réserves de devises étrangères de la Chine. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Wen : Je suis de près le développement du marché des changes et j'espère moi-même qu'il grandira de façon équilibrée. Depuis l'an passé, nous avons renforcé le cadre institutionnel du marché, en introduisant notamment la réforme des titres non échangeables sur les sociétés cotées. Notre objectif est de construire un marché des capitaux mature. Pour cela, il faut d'abord améliorer la performance des entreprises cotées. Ensuite, il faut mettre en place un marché ouvert, juste et transparent, améliorer les moyens de supervision et de contrôle en renforçant le cadre légal. Enfin, il faudra s'assurer que l'information liée au marché soit accessible à temps et les investisseurs plus conscients des risques.

Quant à l'utilisation des réserves de change, c'est en effet un problème épineux. Notre expérience nous enseigne comme il est difficile de composer sans devises étrangères. Dans les années 1990, la Chine n'en comptait pas assez et a dû recourir à un prêt du FMI, qui lui a accordé 800 millions de dollars. Désormais, nos réserves de change excèdent 1 000 milliards de dollars, et la bonne utilisation de ce trop plein pose un nouveau défi. La Chine souhaite donc diversifier ses réserves pour plus de sécurité. En effet, nous souhaitons établir une agence d'investissement, qui ne sera mise sous tutelle d'aucun ministère. Cette institution gérera les devises en respect des lois et sera supervisée par le gouvernement. Sa mission sera de préserver et d'accroître la valeur des actifs. Comme la pratique des investissements à l'international est récente en Chine, nous n'avons qu'une petite expérience en la matière. J'ai récemment consulté les statistiques, elles montrent qu'à la fin de 2006 les investissements non financiers chinois à l'étranger représentaient seulement 73,3 milliards de dollars. Ils ont pourtant augmenté de 16 milliards en un an, mais restent insignifiants par rapport aux pays développés.

Je devine qu'avec votre question vous demandez si la nature des nouveaux investissements affectera les titres détenus en dollars US. La plupart des réserves de la Chine sont aujourd'hui en dollars, c'est un fait. Mais la création d'une agence d'investissement chinoise n'affectera pas le dollar négativement.

« En s'attaquant à la question du bien-être du peuple, notre effort doit être concentré sur les catégories les plus défavorisées. »

Le Quotidien du Peuple (Chine) : Vous venez d'affirmer qu'hier vous avez répondu à des élèves d'école primaire. Ceci renvoie au bien-être de la population ; or il s'agissait du principal souci des députés de l'APN et des membres de la CCPPC aux deux sessions de cette année, et c'est également le point central du Rapport sur le travail du gouvernement. Dans ce rapport, d'un style très terre-à-terre, vous proposez un certain nombre d'initiatives pour améliorer le bien-être du peuple et accroître l'impact du gouvernement à cet effet. Quelles mesures seront adoptées pour assurer l'exécution de ces politiques et l'utilisation des ressources financières pour le bénéfice du peuple ?

Wen : Le but final de la réforme et de l'effort de développement est de répondre efficacement aux besoins matériels et culturels du peuple. Le bien-être du peuple doit donc être amélioré, dans sa vie quotidienne. La chose la plus importante que nous devons faire à présent est de favoriser l'égalité des chances dans l'éducation, de poursuivre une politique d'emploi proactive, de réduire les écarts de revenu et d'établir un système de sécurité sociale à la fois dans les régions urbaines et rurales.

Pour améliorer le bien-être des personnes, nous avons besoin de garanties institutionnelles. Nous avons une nouvelle législation sur l'abrogation des impôts agricoles et des taxes sur certains produits agricoles spéciaux. Nous avons mis en place une scolarité gratuite et obligatoire de neuf ans. Et nous allons développer un cadre juridique pour un système d'allocations couvrant les coûts fondamentaux de la vie dans les secteurs ruraux et urbains. Nous préparons un plan de réforme du système médical et de santé, qui sera par la suite institutionnalisé dans les villes et les campagnes. Une fois que les arrangements institutionnels seront en place, ce ne sera pas facile de changer les choses, et ces arrangements institutionnels ne seront pas soumis à un simple changement de gouvernement ou de leaders.

En s'attaquant à la question du bien-être du peuple, notre effort doit être concentré sur les catégories les plus défavorisées, parce que ce sont les plus nombreuses, en particulier dans les campagnes. La vitesse d'une flotte n'est pas déterminée par son bateau le plus rapide, mais bien par le plus lent. Si la condition des groupes les moins avantagés ne s'améliore pas, le bien-être de la société toute entière ne s'améliorera pas.

Pour améliorer le bien-être du peuple, nous devons faire en sorte que les gens se sentent heureux dans leur vie. Pour cela, il faut assurer les droits démocratiques des personnes et favoriser la justice et l'équité sociales. Vous allez demander : qu'est-ce que c'est, être heureux ? Rappelez-vous ce vers de Ai Qing, le poète chinois : « Allez demander à la terre qui dégèle, allez demander au fleuve qui dégèle. »

« J'espère que ma propre visite au Japon en avril prochain marquera le dégel. »

NHK (Japon) : J'ai deux questions. La première concerne les relations sino-japonaises, qui oscillent entre développement et limites. Comment peut-on améliorer cette relation ? Par ailleurs, quel rôle la Chine peut jouer par rapport à l'enlèvement des ressortissants japonais ?

Wen : La Chine et le Japon sont de proches voisins qui se font face à travers un étroit filet d'eau. Dans l'antiquité chinoise, le philosophe Kuan-tzu avait observé : « Pour conquérir un ami éloigné, on a besoin, tout d'abord, d'avoir de bonnes relations avec ses voisins. Pour vaincre l'adversité, il faut atténuer l'animosité. » Grâce aux efforts communs des gouvernements chinois et japonais, un accord a été obtenu en vue de lever les obstacles politiques à l'amélioration des relations Chine-Japon, jusqu'à la visite en Chine du premier ministre Shinzo Abe en octobre dernier. Favoriser la coopération et l'amitié entre les deux pays, de génération en génération, est un mouvement de l'histoire et répond aux aspirations de nos deux peuples.

Il est vrai qu'il reste beaucoup de problèmes entre la Chine et le Japon, mais il existe trois documents politiques qui forment le socle des relations. Ces trois documents politiques ont déterminé les relations passées entre la Chine et le Japon sur les bases politique, légale et factuelle. Ils ont aussi indiqué la marche à suivre pour l'approfondissement des relations sino-japonaises stratégiques et à long terme. Il faut adhérer à ces trois documents et regarder à travers l'histoire pour mieux guider la future croissance des relations bilatérales. Si la visite de Abe en Chine l'an passé peut être considérée comme une rencontre pour briser la glace, alors j'espère que ma propre visite au Japon en avril prochain marquera quant à elle le dégel. Je compte conclure un accord avec le premier ministre Abe sur l'établissement de relations stratégiques et d'avantage mutuel, et je m'entretiendrai sur la façon d'installer un mécanisme de coopération économique et de favoriser les échanges scientifiques, éducatifs, et les visites entre les deux peuples, notamment de jeunes. J'espère que la Chine et le Japon travailleront ensemble pour assurer la croissance stable et à long terme de leur l'amitié et de leur coopération.

Quant à votre deuxième question, nous avons exprimé à maintes reprises la sympathie et la compréhension de la Chine sur la question des enlèvements de ressortissants japonais. Cependant, c'est une question qui concerne le Japon et la République populaire démocratique de Corée. J'espère qu'elle pourra se résoudre sans à-coup par le dialogue et par la négociation.

« La paix et le développement à travers le détroit de Taiwan représentent la tendance de l'histoire. »

ETTV (Taiwan) : L'année 2007 sera cruciale pour les relations autour du détroit de Taiwan. Si les relations politiques entre les deux rives sont aujourd'hui au point mort, les échanges personnels se multiplient, les affaires aussi. Des vols charters sont ouverts aux négociants et les fruits taiwanais sont vendus sur le continent. Les habitants attendent maintenant avec impatience l'arrivée des premiers groupes de touristes du continent à Taiwan. Quand cela arrivera-t-il ? Quelles sont les prochaines étapes dans le rapprochement ? Avec les Jeux olympiques à Beijing et les élections à Taiwan, l'année 2008 s'annonce tout aussi décisive.

Wen : Les années 2007 et 2008 seront en effet cruciales pour la paix et la stabilité à travers le détroit. Dans mon Rapport sur le travail du gouvernement, j'ai réitéré l'opposition ferme de la Chine à toute activité séparatiste, y compris à une indépendance de jure de Taiwan. Nous observons de près les tentatives des forces séparatistes taiwanaises pour une indépendance de l'île. Nous ne permettrons jamais aucune dérive de l'histoire, de la réalité et du statut juridique universellement reconnu de Taiwan, à savoir qu'elle est une partie inaliénable du territoire de la Chine depuis la plus haute antiquité.

Nous déploierons tous nos efforts pour favoriser la paix et le développement à travers le détroit de Taiwan et pour poursuivre les politiques qui favorisent la croissance pacifique des relations. Vous avez raison de préciser que de plus en plus d'hommes d'affaires taiwanais se rendent sur le continent. L'an dernier, le commerce bilatéral a atteint 100 milliards de dollars, dont 80 étaient composés des exportations de Taiwan vers le continent. Nous affichons notre fermeté dans la protection des droits et intérêts des entreprises taiwanaises et des compatriotes de Taiwan qui investissent, étudient et se déplacent sur le continent. La première priorité est d'ouvrir des vols charters de passagers les week-ends et de simplifier les procédures d'embarquement de marchandises des deux côtés. Les continentaux appellent de leurs vœux l'ouverture du tourisme à Taiwan, pour laquelle les préparatifs avancent rapidement. Nous espérons que leur souhait pourra être réalisé d'ici peu. La paix et le développement à travers le détroit de Taiwan représentent la tendance de l'histoire. C'est une tendance que personne ne peut renverser. Regardez cette poésie chinoise classique : « Mille voiles traversent le navire chaviré ; dix mille pousses de jeunes arbres percent derrière l'arbre flétri. »

« Tous les fonctionnaires corrompus doivent être mis devant la justice. »

CCTV (Chine) : Vous venez d'affirmer que les fonctionnaires devaient travailler en tant que serviteurs du peuple et ne possédaient pas d'autre pouvoir. Ceci s'applique non seulement aux fonctionnaires du gouvernement, mais aussi et surtout aux officiels. Ma question concerne la corruption. Les révélations sur les enquêtes impliquant Chen Liangyu et Zheng Xiaoyu ont déclenché une vive indignation publique. D'un côté, les gens se sentent trahis parce qu'ils attendaient une grande fermeté dans la lutte contre la corruption. De l'autre, ils sont troublés par les actes de corruption qu'ils ont pu voir de leurs yeux. Comment réellement limiter ces procédés d'échange du pouvoir contre l'argent ?

Wen : Impossible de nier qu'avec le développement de l'économie de marché, la corruption a augmenté. C'est même un sérieux problème dans certains secteurs et localités, et quelques cas impliquent des fonctionnaires de très haut rang. Pour résoudre ce problème, nous devons d'abord nous attaquer aux insuffisances institutionnelles. La corruption est provoquée par beaucoup de facteurs, et le plus important est la concentration excessive du pouvoir et l'absence de moyens de contrôle et d'alerte efficaces. Ceci rend nécessaire la réforme de notre système. Il faut mettre en application la Loi sur les autorisations administratives, qui a déjà été promulguée, et réduire la liste des secteurs qui nécessitent une approbation gouvernementale. Lorsque l'administration dispose d'un pouvoir d'approbation trop étendu, les cas de corruption où des fonctionnaires échangent leur pouvoir contre de l'argent ou agissent en connivence avec les milieux d'affaires se multiplient. En second lieu, nous devons favoriser la réforme du système politique, travailler à rétablir l'équilibre dans la concentration des pouvoirs et améliorer le contrôle sur les pouvoirs publics. Toutes les décisions requérant une validation administrative, et tout particulièrement celles qui auront un impact sur l'intérêt public, doivent être prises de manière ouverte, juste et transparente. Troisièmement enfin, nous devons adopter une approche sur les deux fronts de la sensibilisation et de la punition. Chaque cadre doit savoir que « si l'eau peut porter le bateau, elle peut aussi le faire chavirer. » Tous les fonctionnaires corrompus, qui qu'ils soient, quels que soient leur rang administratif et leur domaine d'action, doivent être mis devant la justice.

« Nous poursuivrons l'établissement de la démocratie chinoise dans le respect des spécificités propres à la Chine. »

Le Monde (France) : Dans un entretien que vous avez récemment accordé au Quotidien du peuple, vous avez déclaré que système socialiste et démocratie ne s'excluaient pas mutuellement. Vous avez néanmoins ajouté que l'étape initiale du socialisme devrait perdurer pendant au moins cent ans de plus. Est-ce que cela signifie qu'il n'y aura pas de démocratie en Chine avant cent ans ?

Wen : Dans cet article, j'ai bien insisté sur le fait que socialisme, démocratie et État de droit n'étaient pas contradictoires. La démocratie, le système légal, la liberté et les droits humains, l'égalité, la fraternité, ne sont pas des avantages propres uniquement au capitalisme. Au contraire, ils sont plutôt une réussite de la civilisation humaine sur le long terme et un socle de valeurs communes partagées par l'humanité toute entière. J'ai également précisé dans l'article qu'il y avait dans le monde plus de 2 000 groupes ethniques répartis dans plus de 200 pays et régions, et que, tout comme leur condition sociale, leur histoire, leur culture et leur niveau de développement diffèrent, de même ils atteignent la démocratie par des moyens propres et sous des formes propres. Qu'on le veuille ou non, la diversité culturelle est un fait.

Vous demandez en réalité ce que peut être la démocratie socialiste. Permettez-moi d'être clair : la démocratie socialiste, en dernière analyse, c'est laisser le peuple se gouverner lui-même. Cela signifie que nous devons assurer le droit du peuple à élire démocratiquement ses représentants, à prendre les décisions démocratiquement, à se gérer démocratiquement. Cela signifie que nous devons créer les conditions pour que le peuple surveille et critique son gouvernement. Cela signifie que nous devons faire en sorte que chacun profite du développement dans un environnement équitable, juste et libre et que la créativité et la pensée indépendante du peuple prennent leur essor. Cela signifie enfin qu'il faut diriger le pays en respect de la loi, améliorer le système légal et renforcer l'État de droit.

Nous manquons encore d'expérience dans le développement socialiste, y compris dans la démocratie socialiste. Nous poursuivrons notre politique d'ouverture, en nous appuyant sur tous les accomplissements de la civilisation humaine, et l'établissement de la démocratie chinoise dans le respect des spécificités propres à la Chine. Vous demandez si j'affirmais qu'il n'y aurait pas de démocratie en Chine pour les cent ans à venir. Vous m'avez mal compris. Ce que j'ai voulu dire, c'est que cela prendra du temps avant de parvenir à un système mature, expérimenté et développé. Dans cet intervalle, nous devons accomplir deux tâches principales et deux réformes importantes. Les deux tâches principales sont : développer grâce à des efforts concertés la productivité sociale ; et favoriser l'équité et la justice sociales, en faisant de la justice la valeur socle du système socialiste. Les deux réformes importantes sont : pousser la réforme économique vers le marché et pousser la réforme politique vers la démocratie. La démocratie, comme toute vérité, doit passer l'épreuve des faits. Seule la pratique nous permettra de dire si la démocratie est souhaitable ou non pour un pays.

« La position de Hongkong, centre financier est irremplaçable. »

Hong Kong Economic Times (Hongkong) : Cette année marque le 10e anniversaire de la rétrocession de Hongkong. Comment évaluez-vous sa performance en une décennie ? Quelles sont vos attentes pour l'avenir ? Dans le Rapport sur le travail du gouvernement, vous mentionnez la nécessité d'accélérer les réformes financières. Quel rôle Hongkong, place financière internationale, doit-elle jouer dans la réforme du système financier chinois ?

Wen : Au cours des dix dernières années, Hongkong a accompli des progrès significatifs. Le gouvernement central a loyalement observé les principes « Un pays, deux systèmes » et « Les habitants de Hongkong administrent Hongkong avec un haut degré d'autonomie », et a agi en accord avec la loi fondamentale. Il n'est pas intervenu dans l'administration du gouvernement de la RAS, lequel a su fédérer les habitants en surmontant un certain nombre de difficultés, y compris la crise financière asiatique. En conséquence, Hongkong a maintenu la stabilité et la croissance économique et a amélioré le bien-être de ses habitants.

Hongkong est désormais à une étape cruciale de son développement. J'ai toujours estimé que, couvert par le continent mais ouvert sur le monde, Hongkong jouit d'une position géographique unique. Elle accueille l'économie la plus libre de la planète, bénéficie de liens étendus avec le reste du monde, d'un véritable système légal et d'un bassin prospère d'expertise managériale. La position de Hongkong, centre financier, carrefour commercial et de transport maritime est irremplaçable. À l'occasion du 10e anniversaire du retour de Hongkong, je souhaite exprimer mes sincères salutations à nos compatriotes. J'espère que Hongkong deviendra plus prospère, plus ouverte et harmonieuse. La fleur de bauhinia (l'emblème de Hongkong) est épanouie ; le rouge est beau cette année, et le sera encore plus l'an prochain.

« Le gouvernement chinois respecte ses engagements internationaux en matière des émissions de gaz à effet de serre. »

Financial Times (Royaume-Uni) : Ma question concerne l'attitude du gouvernement par rapport à l'environnement, à la fois national et mondial. Comment expliquez-vous l'échec du plan de réduction des consommations d'énergie et de la pollution l'an passé ? On estime que, d'ici à 2009, la Chine sera le premier producteur mondial de gaz à effet de serre ; acceptera-t-elle, à partir d'un certain point, de rejoindre la communauté internationale à ce niveau ?

Wen : J'ai déjà détaillé, au cours d'une session de l'APN, les raisons de l'échec du plan de réduction des consommations d'énergie et de la pollution, et j'ai proposé huit mesures pour y remédier. Je ne reviendrai pas dessus aujourd'hui.

Concernant votre seconde question, sur les émissions de gaz à effet de serre, nous soutenons le protocole de Kyoto. Bien que la Chine soit toujours un pays en voie de développement, nous avons formulé un programme national en réponse au changement climatique, basé sur les conventions internationales. Nous avons fixé un objectif de 20 % de réduction des consommations d'énergie par unité de PIB pour la période 2006-2010. Bien que le protocole de Kyoto n'ait pas établi d'objectifs contraignants pour les pays en voie de développement, le gouvernement chinois agit avec responsabilité envers le monde et respecte ses engagements internationaux.

« Pour assurer la croissance forte mais régulière de l'économie, les conditions sont là. »

China News Service (Chine) : La croissance de l'économie chinoise a dépassé les 10 % alors que l'inflation a été contenue en-dessous de 3 % pour la quatrième année consécutive. C'est une performance rare, en Chine comme ailleurs. Certains analystes affirment que l'économie chinoise va arriver à un tournant en 2007. Quel est votre point de vue ? Quels sont les problèmes que doit affronter la Chine et sera-t-elle capable de maintenir de tels chiffres à l'avenir ?

Wen : L'économie chinoise a maintenu ces dernières années une croissance rapide mais régulière. Elle ne doit cependant pas entraîner une suffisance de notre part, ni dans le passé, ni aujourd'hui, ni dans l'avenir. Mon esprit est tourné vers les défis qui nous pressent. « Un royaume qui a l'air paisible et stable peut tout à fait subir des crises inattendues. » Il y a des problèmes structuraux dans l'économie de la Chine, qui entraînent un développement instable, non équilibré, non coordonné et non durable. Instable signifie surinvestissement, liquidités excessives et excédent commercial démesuré. Non équilibré signifie inégal entre les secteurs urbains et ruraux, entre les différentes régions et entre le développement économique et social. Non coordonné signifie qu'il existe un fort déséquilibre entre les secteurs primaire, secondaire et tertiaire et entre l'investissement et la consommation. La croissance économique est principalement tirée par les investissements et les exportations. Non durable enfin signifie que nous avons mal agi par rapport aux économies d'énergie et à l'environnement. Tous ces problèmes sont urgents et nécessitent des efforts à long terme.

J'ai dit que l'économie chinoise avait connu une croissance forte mais régulière pendant des années ; mais pourra-t-elle tenir la distance ? D'abord, les conditions sont là. La condition la plus importante est un environnement international paisible suffisamment long pour nous permettre de nous concentrer sur le développement économique. En second lieu, nous possédons un marché intérieur au potentiel énorme. Cependant, la clef de la croissance économique de la Chine se situe dans notre capacité à poursuivre les bonnes politiques. Nous continuerons à pousser la demande domestique, et la consommation en premier lieu. Nous poursuivrons l'effort de réforme et d'ouverture pour dépasser les obstacles institutionnels et structuraux et augmenter la connaissance et l'innovation basée sur la technologie. Tout ceci établira de solides fondations pour la croissance économique. Nous favoriserons davantage la protection des ressources et la réduction des émissions polluantes pour rendre la croissance économique durable. La tâche est difficile, mais nous avons confiance.

« Nous espérons que le Dalai Lama prendra des mesures utiles pour l'unité de la Chine. »

Frankfurter Allgemeine Zeitung (Allemagne) : Le Dalaï Lama a exprimé le souhait de se rendre en Chine pour un pèlerinage ; mais certains officiels de votre gouvernement l'accusent encore d'œuvrer pour l'indépendance du Tibet. Celui-ci s'en défend pourtant. Pourquoi le gouvernement chinois le voit toujours comme un séparatiste ? L'accueillerez-vous pour un pèlerinage pendant les Jeux olympiques ?

Wen : Notre politique à l'égard du Dalaï Lama est claire et intangible. Dès l'instant où il reconnaîtra que le Tibet, tout comme Taiwan, est une part inaliénable de la Chine, et où il cessera ses activités séparatistes, nous nous ouvrirons aux discussions sur son avenir. La porte est ouverte.

Le Tibet est une région autonome de la Chine. Souvenez-vous que le 14e Dalaï Lama lui-même présidait le comité qui avait préparé l'établissement de la Région autonome du Tibet en 1956. Ensuite, il a choisi de constituer un soi-disant « gouvernement tibétain en exil », a appelé à un large degré d'autonomie, et a même réclamé que toutes les troupes chinoises mais aussi toutes les populations Han et non-tibétaines quittent le Tibet. Alors les gens demandent : est-ce que le Dalaï Lama souhaite voir une Chine unie, ou se voue-t-il à saper l'unité de la Chine ? Nous n'allons pas seulement écouter ce qu'il a à dire ; nous allons aussi regarder de près ce qu'il fait. Nous espérons qu'il prendra des mesures utiles pour l'unité de la Chine et le développement du Tibet.

« Le récent essai extra-atmosphérique effectué par la Chine n'a été dirigé contre aucun pays. »

Associated Press : La Chine a effectué un essai anti-satellite cette année. Bien que les États-Unis et l'ancienne Union Soviétique en aient fait autant dans le passé, cela n'avait plus eu lieu depuis vingt ans. Cet essai, et le fait que la Chine augmente régulièrement sa puissance militaire, ne sont-ils pas contradictoires avec les affirmations chinoises d'un développement pacifique ?

Wen : Le récent essai extra-atmosphérique effectué par la Chine n'a été dirigé contre aucun pays. Il n'a constitué une menace envers personne, ni n'a violé aucun traité international. La Chine s'en tient à une utilisation pacifique de l'espace extra-atmosphérique et s'oppose à la course aux armements dans l'espace. Je souhaite inviter les pays concernés à négocier et conclure un traité sur l'utilisation pacifique de l'espace extra-atmosphérique dans un bref délai.

Beaucoup affirment que les dépenses militaires de la Chine manquent de transparence, et que l'essai réussi dans l'espace extra-atmosphérique va à contre-sens d'un développement pacifique. On a aussi posé la question de savoir si la Chine constituait ou non une menace pour le monde. Ces questions, en fait, ont été posées par les journalistes depuis l'ouverture des sessions de l'APN et de la CCPPC.

Alors, pour répondre à votre question, laissez-moi préciser deux points : d'abord, la Chine possède une population de 1,3 milliard d'habitants, qui vivent sur un territoire de 9,6 millions de km2, avec 22 000 kilomètres de frontières terrestres et 18 000 de côtes. Et les dépenses militaires de la Chine demeurent faibles, tant en valeur absolue que relative, par rapport à la majorité des autres pays. Même certains pays en développement se classent devant la Chine à ce niveau, et je ne parle pas des pays développés. Ensuite, la Chine a subi l'agression et l'oppression des puissances impérialistes dans son histoire moderne, après les guerres de l'Opium en 1840. Nous, Chinois, savons trop bien ce que cela veut dire d'être soumis. Notre politique militaire est donc uniquement défensive. Les capacités militaires limitées de la Chine servent uniquement à assurer la sécurité, l'indépendance et la souveraineté du pays. Nous sommes tout à fait transparents sur cette question.


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