— Discours du Premier ministre du Conseil des affaires d'Etat de la
République populaire de Chine Wen Jiabao au Sommet Asie-Europe
(Vientiane, 5 novembre 2012)
Je voudrais tout d'abord remercier le gouvernement laotien d'avoir pris de parfaites dispositions pour l'organisation de ce sommet. En automne 2008, je m'en souviens, le 7e Sommet Asie-Europe s'est tenu à Beijing au moment où la crise financière internationale s'est explosée sur tous les plans et s'est répandue rapidement, et ensemble avec mes collègues asiatiques et européens, nous avons, sans tarder, émis au monde entier un message de solidarité pour surmonter les difficultés, renforçant ainsi la confiance et l'espoir de la communauté internationale de vaincre la crise. Quatre ans se sont écoulés depuis, les pays asiatiques et européens ont, d'une part, œuvré sans cesse à perfectionner leurs politiques économiques intérieures et à régler de manière ciblée leurs propres problèmes, et d'autre part, travaillé au renforcement de leur dialogue et de leur coordination en matière de politique macroéconomique et à l'approfondissement de leur coopération pragmatique dans tous les domaines. Ces efforts ont donné des résultats positifs et permis de maintenir l'élan de la reprise de l'économie mondiale.
La Chine est un grand pays responsable qui a toujours adopté une attitude active et responsable devant la crise financière internationale. Nous avons veillé à bien gérer nos propres affaires et réussi à stabiliser l'économie chinoise dans le moindre délai et à en assurer un développement régulier et relativement rapide. Nous avons poursuivi l'ouverture et la coopération, travaillé à un développement équilibré de l'importation et de l'exportation et à une coordination entre l'introduction des capitaux étrangers et l'investissement en outre-mer, et envoyé en tout 33 grandes missions d'achat à l'étranger, ce qui représente d'importantes demandes et de nombreux postes d'emploi pour les pays concernés ainsi que des occasions favorables pour le développement des entreprises transnationales. Nous avons pris une part active à la gouvernance économique mondiale, apporté notre contribution à la réforme du système financier international, mené des dialogues bilatéraux et multilatéraux et accordé des aides aux pays en difficulté économique. Au cours de ces quatre dernières années, l'économie chinoise a connu en moyenne une croissance annuelle de plus de 9%, le volume d'import-export a dépassé 11 000 milliards de dollars américains, dont près de 5 300 milliards pour les importations, plus de 400 milliards de dollars américains de capitaux étrangers ont été introduits en Chine, et quelques 250 milliards de dollars américains, investis à l'étranger. Pendant cette période, nous avons mené en profondeur la réforme du mécanisme de formation du taux de change du RMB et travaillé à rendre le taux de change du RMB plus flexible, de telle sorte que le taux de change effectif réel du RMB a de nouveau augmenté de 16% sur la base d'une forte appréciation des années précédentes et que l'excédent du compte courant représente aujourd'hui 2,6% du PIB, contre 10,1% en 2007. Ces chiffres montrent que la Chine est un moteur important pour la croissance mondiale et a joué un rôle crucial dans la reprise de l'économie mondiale.
Depuis cette année, face à un environnement économique international complexe et grave et à une demande extérieure affaiblie, nous avons accordé plus d'importance à la stabilisation de la croissance et fait de la stimulation de la demande intérieure, notamment de la demande de consommation, la priorité de notre travail. Et nos efforts actifs visant à restructurer l'économie nationale ainsi qu'à renforcer et à améliorer le contrôle macroéconomique ont donné des résultats remarquables. Pendant les trois premiers trimestres, le PIB du pays a augmenté de 7,7%, l'indice des prix à la consommation a connu une hausse de 2,8% par rapport à la même période de l'année précédente, 10,24 millions de postes d'emploi ont été créés dans les zones urbaines, le volume d'import-export s'est accru de 6,2% et la balance des paiements internationaux est devenue plus équilibrée. L'économie chinoise connaît désormais une croissance stable. En septembre, les principaux indicateurs économiques ont enregistré une hausse générale, la valeur ajoutée des grandes industries a connu une croissance réelle de 9,2% par rapport à la même période de l'année dernière, le volume des ventes au détail des articles de consommation s'est accru de 14,2%, l'investissement en biens immobiliers a augmenté de 20,5% pour les trois premiers trimestres, l'exportation et le trafic-fret ont respectivement enregistré une augmentation de 9,9% et de 11,8%, l'indice PMI manufacturier a rebondi pour la première fois depuis quatre mois pour atteindre 49,8% et l'indice de confiance des consommateurs est remonté à 100,8. Quand les différentes politiques et mesures seront mises en œuvre et auront produit des effets, la croissance chinoise sera encore plus stable. Nous sommes confiants dans la réalisation des objectifs de développement prévus pour cette année, et nous avons surtout la confiance, les conditions et la capacité de réaliser un développement de niveau plus élevé et de meilleure qualité pour un plus long terme.
La crise financière internationale n'est pas terminée, et il y a encore beaucoup d'incertitudes et de risques baissiers. La communauté internationale souhaite vivement entendre des voix sages, rassembler les forces capables de surmonter la crise et trouver des moyens efficaces pour le renouveau économique. Avec une population nombreuse, de riches ressources et un vaste marché, l'Asie est aujourd'hui la région la plus dynamique dans le monde. L'Europe qui jouit d'une économie réelle forte, d'un système de marché développé et d'une force technico-scientifique puissante reste toujours un pôle important du monde. Actuellement, les membres de l'ASEM représentent 56% du volume économique global mondial et plus de 60% du commerce international. Tant que nous travaillons en solidarité et coopérons étroitement, nous serons à même d'assumer la lourde responsabilité de promouvoir la croissance stable de l'économie mondiale et de donner au monde confiance, courage et espoir. A cet égard, j'aimerais vous faire partager quelques de mes réflexions :
Premièrement, un commerce international libre, ouvert et juste constitue une force motrice importante pour la croissance économique mondiale. Le développement stable du commerce international permet de promouvoir la division sociale du travail, d'étendre le marché et d'augmenter les opportunités de travail et correspond à l'intérêt commun de tous les pays. Nous devons élargir l'accès au marché avec plus de sincérité et plus de détermination, combattre ensemble le protectionnisme commercial et d'investissement avec une attitude plus nette et des actions plus fermes et bien gérer les frictions commerciales avec des moyens plus raisonnables. Nous devons nous en tenir aux engagements pris lors du Sommet du G20 de cette année pour ne pas adopter de nouvelles mesures protectionnistes d'ici 2014, réactualiser au plus tôt le Plan d'action pour la facilitation des échanges commerciaux (TFAP) et le Plan d'action pour la promotion des investissements (IPAP) de l'ASEM, mettre l'accent sur la coopération dans les domaines de la distribution, de l'e-commerce, des procédures douanières, de l'inspection et de la quarantaine, des infrastructures, de l'accès aux investissements et des échanges entre hommes d'affaires, et faire valoir l'immense potentiel de la coopération économique et commerciale. La partie chinoise appelle à la reprise de la Réunion des Ministres de l'Economie de l'ASEM de sorte à injecter une nouvelle vitalité à la coopération économique Asie-Europe.
Deuxièmement, le renforcement de la coordination des politiques macroéconomiques reste actuellement une tâche importante. Tous les pays doivent faire de la croissance forte, durable et équilibrée un objectif commun, s'en tenir au but des politiques macroéconomiques de maintenir la croissance et de promouvoir l'emploi, redresser la confiance du marché et favoriser l'interaction saine entre différentes économies. Il nous faut porter une haute attention aux impacts latents de nouvelles mesures d'assouplissement quantitatif adoptées par les principales économies développées et prévenir les fortes fluctuations des prix des matières premières sur le marché international, les flux de capitaux transfrontaliers désordonnés et une plus grande pression inflationniste sur les pays en développement. Nous devons continuer à soutenir, de façon constructive, les efforts européens pour régler la question de la dette. Les pays européens concernés doivent bien gérer les rapports entre l'assainissement des finances publiques, la stabilité financière et la reprise économique, et les principales économies, quant à elles, établir rapidement des plans d'assainissement des finances publiques à moyen terme clairs et fiables et régler adéquatement les problèmes de la dette publique.
Troisièmement, la promotion de l'innovation technico-scientifique est un moyen fondamental pour vaincre la crise. Les percées technico-scientifiques majeures réalisées après chaque grande crise économique ont toujours fourni un nouveau moteur de croissance permettant de rééquilibrer l'économie mondiale. Le monde d'aujourd'hui se trouve à la veille d'une révolution technico-scientifique. Les pays asiatiques et européens doivent renforcer leur dialogue en matière de politiques d'innovation scientifique et technologique, approfondir leurs échanges et coopération technico-scientifiques et prendre le pouls de la révolution scientifique, technologique et industrielle dans le monde. Nous devons promouvoir en priorité la coopération dans les domaines de l'énergie propre, de la protection écologique, de l'espace, de la biotechnologie, de l'information, des télécommunications et du développement durable des villes, encourager les entreprises à créer ensemble des plateformes de coopération stables et de long terme comme les centres de recherches et de développement conjoints, les centres de transfert technologique et les incubateurs conjoints, et associer les fortes capacités européennes en matières de R&D au vaste potentiel du marché asiatique pour réaliser le gagnant-gagnant. Il n'existe pas de frontière dans l'innovation technico-scientifique. Il nous incombe d'éliminer les obstacles au transfert de technologies et de perfectionner le système de protection des droits de propriété intellectuelle. Les pays développés doivent apporter plus de soutiens au développement des industries émergeantes des pays en développement, au lieu de les contenir ou de les réprimer.
Quatrièmement, un système de gouvernance économique mondiale sain est une garantie institutionnelle pour la croissance économique mondiale. Ces dernières années, la réforme du système de gouvernance économique mondiale a donné des résultats remarquables, mais l'établissement d'un ordre économique international juste, équitable, inclusif et ordonné reste toujours une tâche laborieuse. Pour approfondir la réforme du système financier international, l'urgence est de bien mettre en œuvre l'accord sur les réformes des quotes-parts et de la gouvernance approuvé par le FMI en 2010, d'augmenter la représentation et le droit à la parole des économies émergeantes et des pays en développement, de faire progresser régulièrement la réforme du système monétaire international, de mettre sur pied un système de monnaie de réserve internationale fondé sur une valeur stable, une émission ordonnée et une masse monétaire régulable, de faire avancer effectivement la réforme du secteur financier et de réduire les risques systémiques du système financier international. Nous devons faire aboutir rapidement les négociations du cycle de Doha à des résultats substantiels, travailler à la construction d'un système de commerce multilatéral libre et ouvert, et promouvoir l'établissement d'un mécanisme de fixation et de régulation des prix des matières premières raisonnable et transparent pour assurer la sécurité énergétique et la sécurité alimentaire dans le monde.
La Chine est un membre de la grande famille de l'ASEM. Elle est surtout un promoteur et un bâtisseur du dialogue et de la coopération Asie-Europe. Au cours des 16 dernières années qui ont suivi la création de l'ASEM, la Chine a déjà initié et organisé une cinquantaine de manifestations importantes. Le nouveau Directeur général de la Fondation Asie-Europe (ASEF) est un Chinois. Le volume des échanges commerciaux entre la Chine et les autres membres de l'ASEM représente près de 50% du commerce extérieur chinois, et les investissements venant des membres de l'ASEM, environ 20% des investissements étrangers utilisés en Chine. Désireux d'approfondir davantage la coopération pragmatique Asie-Europe, nous souhaitons faire quatre nouvelles propositions : Premièrement, organiser un symposium pour discuter du développement ultérieur de l'ASEM dans le nouveau contexte ; Deuxièmement, établir un réseau de coopération de l'ASEM en matière d'innovation technico-scientifique dans le domaine des ressources en eau pour intensifier les échanges et la coopération sur la gestion des ressources en eau et servir le développement socio-économique des pays de l'ASEM ; Troisièmement, développer un projet forestier de démonstration de l'ASEM pour promouvoir la coopération en matière de gestion durable des ressources forestières et lutter ensemble contre le changement climatique ; Et quatrièmement, mieux faire valoir le rôle de l'ASEF. La Chine portera sa contribution annuelle à l'ASEF à 500 000 dollars américains et espère que les différentes parties pourront faire régulièrement et activement des contributions à l'ASEF.
Pendant toutes ces années, je me suis profondément engagé dans la coopération Asie-Europe. J'ai participé de façon consécutive aux cinq sommets Asie-Europe. Témoin du développement de l'ASEM, j'ai pu constater que la coopération Asie-Europe visait des objectifs de plus en plus clairs, reposait sur une base de plus en plus solide et présentait un contenu de plus en plus riche. Plein d'espoir et de confiance sur un nouveau partenariat global Asie-Europe, j'ai la conviction que la coopération entre les deux continents aura de plus vastes perspectives.
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