He Wenping
Depuis de longues années, du fait du sous-développement de l'industrie manufacturière, les produits finis industriels et les biens de consommation d'usage courant dans la plus part de pays africains sont importés. Dans le passé, les prix des marchandises en provenance d'Europe et d'Amérique n'étaient pas à la portée des bourses des Africains ordinaires. Aujourd'hui, grâce au commerce Chine-Afrique, les articles d'usage courants chinois, bon marché et de qualité, sont abordables pour les Africains, améliorant objectivement le pouvoir d'achat des populations locales et leur niveau de vie.
« Remercier le peuple chinois »
Un officier de l'armée nigériane en formation en Chine a dit avec émotion que grâce à la Chine, son peuple ne portait plus des vêtements d'occasion européens ou américains, car les vêtements neufs chinois étaient abordables. A ses yeux, porter des vêtements neufs est une dignité retrouvée.
A la fin de l'année 2007, la société chinoise Sinohydro (China Water Resources and Hydropower Construction Group) a signé avec le gouvernement angolais les contrats de construction des stades de Lubango et de Benguela en Angola, stades prévus pour la CAN 2010 et constructions emblématiques pour l'Angola, et pour l'Afrique toute entière. En fait, au début, l'Angola avait demandé leur aide au Brésil et au Portugal, qui ont refusé en raison des délais trop courts, 18 mois. Sinohydro a accepté après une seule journée de discussion, décidant d'aider ce pays ami. Par ailleurs, comme à ce moment-là, le gouvernement angolais était confronté à des difficultés en matière de fonds et qu'aucun autre pays ne voulait participer à l'appel d'offres, la société Sinohydro a fourni les fonds nécessaires à la construction. La livraison dans les délais de ces stades de plusieurs dizaines de milliers de places a permis la tenue de la CAN 2010 en Angola.
Congo (Brazzaville) est considéré par les organisations des Nations unies pour le développement comme l'un des pays les moins avancés au monde. Le pays n'a aucune infrastructure de transport décente, la capacité de manutention du seul port, Pointe Noire, est très faible. Pour réaliser le rêve des populations locales, les employés de la société chinoise CSCEC Congo-Brazzaville et les travailleurs locaux ont construit la route nationale n°1. Cette route goudronnée longue de 600 km, large de 15 m et à quatre voies qui traverse des montagnes et forêts vierges, a été très appréciée par le gouvernement et le peuple. Le Premier ministre Mvouba a dit avec émotion : « Je remercie le peuple chinois ! ». Pourtant, au cours de la longue colonisation occidentale de l'Afrique, les colons n'ont construit que des routes rudimentaires dans des zones côtières et des zones minières, simplement pour extraire les minéraux et les ressources.
Quand l'Occident met l'accent sur le développement des « projets software », comme les ressources immatérielles, la Chine investit davantage dans des « projets hardware » dont des routes, des ponts et d'autres ouvrages qui sont visibles et tangibles et bénéficient directement aux populations locales. Jusqu'à ce jour, la Chine a aidé l'Afrique à construire plus de 2 000 km de voies ferrées, 3 000 km de routes, une centaine d'écoles, une soixantaine d'hôpitaux, et a réduit et exonéré des emprunts d'une valeur de plus de 20 milliards de yuans.
Par rapport aux aides occidentales, les aides chinoises à l'Afrique ne sont assorties d'aucune condition et sont marquées par la non-ingérence dans les affaires intérieures. Ce sont notamment des aides bilatérales plutôt que des aides multilatérales. Elles se concentrent sur la construction d'infrastructures et d'autres « projets hardware », mais pas sur des recherches, les ressources immatérielles, ou d'autres « projets software ». Bien que l'aide chinoise en Afrique gagne toujours en ampleur, le gouvernement chinois ne se donne jamais des airs de « pays donneur ». Elle considère toujours que son aide en Afrique est une sorte d'entraide parmi les pays en voie de développement et fait partie de la coopération Sud-Sud, qui constituent un mode d'entraide entre les « pauvres ».
« Sans aucune condition »
En contraste saisissant avec la politique d'ingérence poursuivie par l'Occident après la guerre froide, selon laquelle l'aide est liée à la « démocratie », l'aide chinoise à l'Afrique est dépourvue de toute idéologie, soulignant la non-ingérence dans les affaires intérieures et le respect du choix indépendant de l'Afrique pour la voie de développement. L'aide chinoise à l'Afrique est inconditionnelle. Dans son allocution prononcée à la cérémonie d'ouverture de la 4e Conférence ministérielle du Forum sur la Coopération sino-africaine, tenue le 8 novembre 2009 à Charm el-Cheikh, en Egypte, le premier ministre Wen Jiabao a réitéré ce principe en s'engageant fermement : « La Chine n'a imposé et n'imposera aucune condition politique dans l'octroi du soutien et de l'assistance à l'Afrique. »
La Chine respecte le choix indépendant des pays africains quant à la voie de développement adaptée à leur réalité nationale, et ne cherche jamais à leur imposer ses propres valeurs et mode de développement. Depuis la fin de la période coloniale, l'Occident tente de maintenir son contrôle et son influence en Afrique à travers des mécanismes tels que le Commonwealth et le Sommet France-Afrique. Après la guerre froide, en poursuivant la politique de lier assistance à démocratie occidentale, les principales puissance occidentales, Etats-Unis en tête, contraignent les pays africains à appliquer les valeurs politiques de l'Occident en matière de démocratie, de liberté et de droits de l'homme, en utilisant alternativement la « carotte » (assistance) et le « bâton » (arrêt de l'assistance). Tous les projets d'assistance américaine, que ce soit la Loi sur la croissance et les opportunités en Afrique proposée par l'administration Clinton (AGOA, loi qui vise à pratiquer le contrôle des quotas et l'annulation des droits douaniers pour les vêtements et produits textiles américains exportés vers les pays africains), ou le Compte du défi du millénaire (Millenium Challenge Account), créé par l'administration Bush, imposent les conditions et le seuil en matière de démocratie, de liberté et de droits de l'homme et les pays qui ne se correspondent pas aux conditions américaines sont bannis.
« Il ne faut pas faire à autrui ce qu'on ne veut pas soi-même ». La diplomatie chinoise, fidèle à ce principe confucéen, est pleinement persuadée que les pays et les peuples africains, qui connaissent mieux que quiconque leurs propres conditions nationales, peuvent trouver leur propre voie de développement, sans « instructions » ni ingérence de l'étranger. Le développement africain a besoin de véritables partenaires de développement, plutôt que de « donneurs de leçon ».
La compréhension et la confiance de la Chine vis-à-vis de l'Afrique sont basées sur son point de vue positif sur le continent africain. Comme l'a observé le professeur Kenneth King, ancien directeur du Centre d'études africaines de l'University of Edinburgh, les pays donateurs occidentaux ont souvent considéré l'Afrique comme le continent le plus pauvre du monde, et le moins prometteur au regard des OMD fixés par l'ONU. Après avoir soigneusement lu le livre blanc de la Chine sur ses politiques africaines, le professeur Kenneth King a observé que le livre a mentionné plusieurs fois la coopération économique, mais il n'y avait aucune mention de « pauvreté ». Lorsque l'Occident décrit l'Afrique avec des termes négatifs tels que la « guerre civile », la « pauvreté », des « maladies », la « corruption » et le « sous-développement », la Chine voit ses relations avec l'Afrique avec des termes positifs entre autres la « coexistence pacifique », le « développement partagé », les « avantages réciproques et gagnant-gagnant », l'« amitié », la « sincérité » et le « respect mutuel ».
Dans son article publié au début de 2008 dans le journal britannique Financial Times, le Président sénégalais Wade a indiqué : « Par des investissements directs, des prêts et de divers contrats justes et équitables, la Chine a aidé des pays africains à réaliser de nombreux projets d'infrastructure (…) améliorant le niveau de vie de plusieurs millions d'Africains, et pas seulement pour une minorité d'élites ». Et d'ajouter : « Il nous faut cinq ans de discussions pour signer un contrat avec la Banque mondiale, mais seulement 3 mois avec la Chine. (…) Par rapport aux critiques occidentaux, les Chinois sont plus compétitifs et moins bureaucratiques, il leur convient de faire des affaires en Afrique ».
Certains médias et politiciens occidentaux ont prétendu que la Chine pratiquait un « néo-colonialisme » en Afrique. En fait, ils s'inquiètent de l'amélioration des relations sino-africaines, un défi pour les intérêts de l'Occident en Afrique, et du renforcement de la coopération sino-africaine et de leur impact dans les affaires internationales qui deviennent un défi pour l'actuel ordre économique et politique mondial dominé par l'Occident. A ce propos, Geoff Lamb, l'ancien vice-président de la Banque mondiale chargé des financements en faveur des pays pauvres, a touché droit au but : « Dans le domaine commercial, la Chine a ‘envahi' dans des ‘fiefs' des fournisseurs traditionnels de l'aide, ce qui a suscité la consternation chez des officiels occidentaux. Dans une certaine mesure, l'avis des médias et politiciens occidentaux est alarmiste, ou n'est pas sincère ».
« Parce que la Chine réussit trop en Afrique »
Lors d'un séminaire sur les relations Chine-Afrique organisé à Cambridge, j'ai demandé à un savant occidental pourquoi l'Occident se complaisait tellement à « dénaturer » les relations Chine-Afrique. Il a percé à jour le secret en une seule phrase : « Parce que la Chine réussit trop en Afrique ».
En fait, la relation d'amitié et de coopération Chine-Afrique, nouée il y a plus d'un demi-siècle, a prouvé d'une manière convaincante que son développement ne visait aucun pays tiers, et que cette relation faisait partie du partenariat Sud-Sud basé sur les avantages réciproques et le gagnant-gagnant.
La Secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a prétendu lors de sa récente visite en Zambie que les pays africains devaient se méfier du « néo-colonialisme » quand ils avaient affaire à la Chine, ajoutant que dans son investissement et son octroi d'aide à l'Afrique, la Chine ne tenait pas toujours compte des intérêts des peuples africains, et que le « néo-colonialisme » se répandait sur le continent africain.
Au cours de la conférence de presse tenue le même jour, le Président zambien, Rupiah Banda, a indiqué qu'avant la proclamation de l'indépendance, la Zambie avait déjà établi des relations étroites avec la Chine. Que ce soit pendant la période de lutte pour la conquête de l'indépendance ou après l'indépendance, la Zambie et la Chine se sont toujours soutenus. Pendant la crise financière internationale, en particulier, la Zambie a bénéficié du soutien chinois. Même à ce moment, la Chine a manifesté son intérêt pour les produits zambiens. Ainsi, la Zambie a pu vite sortir de la crise financière internationale, a dit le Président zambien.
Lors de sa visite en Afrique en juin 2006, le Premier ministre Wen Jiabao a déclaré de manière explicite : « On ne saurait mettre l'étiquette de ‘néo-colonialisme' à la Chine. Depuis la Guerre de l'Opium en 1840, la Chine a souffert de l'agression colonialiste pendant environ 110 ans. La nation chinoise comprend bien la douleur apportée par le colonialisme, et est profondément consciente qu'il faut lutter contre le colonialisme. C'est une raison principale pour expliquer notre soutien de longue haleine à la libération nationale et au redressement de l'Afrique. »
Faisant un retour sur l'histoire, que ce soit le commerce d'esclaves il y a 300 ans ou la Conférence de Berlin en 1884 ayant pour but de partager l'Afrique, c'était les colonialistes occidentaux qui ont pillé l'Afrique d'une manière sanglante et barbare, faisant progressivement de l'Afrique leur fournisseur de matières premières et le marché de dumping de leurs produits, et formant en Afrique une structure économique exclusivement dépendante des maîtres occidentaux.
La presse indienne a indiqué : « Une différence essentielle entre la pratique chinoise en Afrique d'aujourd'hui et celle des anciens colons occidentaux est que la Chine n'a pas mener une occupation militaire dans les pays petits et faibles de l'Afrique, ni détruit les économies locales, ni imposé ses conditions commerciales. »
Dans un article de l'hebdomadaire économique allemand Wirtschaftswoche, il est indiqué que grâce à la Chine, « l'économie africaine a connu une croissance de plus de 5 % en 2005 et le taux d'inflation a baissé au niveau le plus bas depuis 25 ans. Dans l'histoire africaine, les capitaux introduits sous forme d'investissement économique ont dépassé pour la premère fois les capitaux absorbés sous forme d'aide. Pour la première fois dans son histoire, l'Afrique est devenue maître de son sort. Ce sont les Chinois qui ont créé une telle opportunité pour ce continent. »
(L'auteur est le directeur de l'Institut des Etudes africaines rattaché à l'Académie des Sciences sociales de Chine) |