Le Bureau ovale affirme « s’opposer à l’autoritarisme », alors qu’il démontre pourtant un penchant pour la démonstration arbitraire de sa propre autorité, surtout lorsque cela peut renforcer la perception que la Chine est une menace pour les Etats-Unis et qu’il peut se présenter comme le seul vrai défenseur contre ce qu’il qualifie d’« infiltration chinoise » visant à affaiblir la société américaine.

Vendredi dernier, le président américain a fait savoir qu’il comptait interdire à l’application chinoise de partage de vidéos TikTok d’opérer aux Etats-Unis, car celle-ci représenterait un risque à la sécurité nationale. « J’ai cette autorité. Je peux le faire avec un décret [ou les pouvoirs économiques d’urgence] », a-t-il déclaré aux journalistes.

La directrice générale de TikTok aux Etats-Unis, Vanessa Pappas, a rétorqué avec confiance : « Nous n’avons pas prévu de partir. » Toutefois, le fait que Microsoft ait suspendu ses négociations de rachat avec ByteDance, la société-mère de TikTok, signifie que l’entreprise pourrait être contrainte de quitter les Etats-Unis.

Cela risque fort de décevoir les 100 millions d’utilisateurs de l’application dans le pays, dont certains gagnent leur vie en produisant et en partageant des vidéos sur cette plateforme. Néanmoins, cela permettra à l’administration américaine de pouvoir se vanter d’avoir éliminé une « menace à la sécurité nationale », qui « transmet les données des utilisateurs américains au Parti communiste de Chine ». Pourtant, comme beaucoup d’autres allégations de ce genre, aucune preuve n’a jamais été apportée en ce sens.

Cette « victoire » dans la neutralisation d’une entreprise chinoise connaissant un succès phénoménal pourrait être utile dans la campagne de réélection du président américain, mais il ne serait pas le seul à en bénéficier. 

Mark Zuckerberg, le président de Facebook, pourrait également se montrer satisfait, car cette proposition d’éradiquer le plus grand concurrent de son entreprise survient tout juste après qu’il a affirmé mercredi dernier au sous-comité judiciaire du droit antitrust, commercial et administratif de la Chambre des représentants des Etats-Unis, qu’il existe des « preuves irréfutables » montrant que la Chine vole la technologie des entreprises américaines, alors même que les PDG d’Apple, de Google et d’Amazon ont affirmé le contraire.

Cette alliance des intérêts politiques et commerciaux entre l’administration américaine et Facebook ont trouvé une cause commune dans leur chasse aux sorcières conjointe contre TikTok, qui est devenue l’application la plus téléchargée aux Etats-Unis en octobre 2018. C’est la première application de Chine à avoir accompli cet exploit. 

Non seulement, ils sont en collusion pour briser l’entreprise, mais ils ont aussi agi de concert pour essayer d’organiser un changement de régime en Chine... Quelle hypocrisie ! Tous les principes et les valeurs morales sous forme de lois, de règles et de conventions, qui constituent les pierres angulaires du monde moderne, deviennent caducs lorsque les Etats-Unis accusent un retard commercial ou technologique.