Depuis le début des années 1990, certains observateurs internationaux de la Chine ont, les uns après les autres, prédit un scénario dans lequel l’économie chinoise ferait l’expérience d’une récession majeure… même si celle-ci n’est jamais survenue. Aujourd’hui, ils semblent avoir trouvé de nouvelles munitions pour leur argument : la dette croissante du pays.

A la suite de la dévaluation en mai de la notation de crédit de la Chine par Moody’s, qui cite la possibilité d’une croissance continue des dettes du pays, le Fonds monétaire international (FMI) a averti ce mois-ci que la croissance du crédit de la Chine était sur une « trajectoire dangereuse ».

« L’expérience internationale suggère que la croissance du crédit de la Chine est sur une trajectoire dangereuse, avec des risques de plus en plus grands d’ajustement disruptif », indique-t-il dans un rapport. Le FMI appelle à « une action décisive » de la part de la Chine et suggère de poursuivre les réformes pour diminuer ses niveaux de dette.

Effectivement, de tels avertissements nécessitent une attention sérieuse de la part des décideurs politiques, car la Chine doit faire face au défi de réduire sa dette. Cependant, il est crucial qu’elle ne soit pas induite en erreur par de tels arguments alarmistes, réduisant en hâte ses niveaux de dettes et compromettant ainsi la stabilité économique.

Si une croissance économique stable ne peut être maintenue, cela affecterait en retour la volonté du pays à réduire ses niveaux de dette.

« La conclusion du FMI - même si elle mérite notre attention - est en inadéquation avec la situation réelle de la Chine, explique Yu Yongding, un économiste de l’Académie des sciences sociales de Chine. Nous ne devrions pas adopter ses suggestions. »

Etant donné son niveau élevé des dépôts, l’économiste affirme que la Nation est suffisamment résiliente pour faire face à ce problème. Si elle se précipite pour résoudre de manière hâtive son problème de la dette - accumulée au cours de plusieurs décennies - elle risquerait de saper sa croissance économique.

« Nous avons pris une série de mesures pour résoudre le problème de la dette et celles-ci ont été relativement efficaces », explique Yu Yongding.

Selon le ministère des Finances, le poids de la dette publique (c’est-à-dire le ratio entre dettes et PIB) en Chine était de 36,7 % en 2016, inférieur à la plupart des principales économies industrialisées et de marché émergent.

La Commission national du développement et de la réforme (CNDR) a indiqué ce mois-ci que le niveau global de la dette chinoise avait diminué à la fin 2016, comparé au niveau de la fin du troisième trimestre 2016. Elle a également indiqué qu’à la fin du mois de juin, le ratio actif-passif des principales entreprises industrielles était passé à 55,9 % contre 56,7 % un an plus tôt.

Selon Yu Yongding, une fois que la croissance économique aura ralenti, les niveaux de dette pourraient augmenter. C’est la raison pour laquelle la Chine doit gérer correctement le rythme de réduction du niveau de la dette, afin que ses efforts ne soient pas mis en œuvre trop hâtivement et qu’ils n’affectent pas la croissance économique globale.

Les décideurs politiques en matière de finance devraient également être plus tolérants envers les entreprises ayant des niveaux élevés d’endettement, lorsque leurs activités se portent bien.

Dans ce contexte de réduction des dettes, certaines entreprises ne peuvent plus avoir accès aux crédits bancaires à cause de leurs niveaux d’endettement et se retrouvent au bord de la faillite. « Si leurs activités restent globalement saines, elles pourraient cependant devoir faire face à un manque temporaire de liquidités. Les banques doivent continuer à leur accorder des prêts. Si leurs activités repartent sur la bonne voie, ces entreprises pourront sortir progressivement de ces difficultés et devenir solvables », suggère Yu Yongding.

De cette façon, ces entreprises pourraient graduellement faire diminuer leurs niveaux d’endettement grâce à l’amélioration de leurs activités, contribuant ainsi à la réduction de la dette et à la stabilité économique globale.