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Cameroun : le Nord toujours sous le choc des graves inondations survenues dès août (REPORTAGE)

Genou sur une natte au milieu d'une pièce au sol abondamment humide et empreinte d'une atmosphère de bric et de broc, Oumarou Hamadou, musulman, fait sa prière de la mi-journée, implorant la miséricorde divine pour l'aider à surmonter le désastre causé aux populations de Garoua (Nord-Cameroun) par de récentes violentes inondations.

Les quelques rares pluies qui continuent de s'abattre sur la principale ville de la région camerounaise du Nord et ses environs n'inquiètent guère certes, mais pour les victimes des inondations d'août et de septembre ayant plongé dans le désarroi d'autres localités de la région et de l'Extrême-Nord voisin, une chape tristesse les entoure toujours.

Réfugié avec l'une de ses deux épouses chez un ami dans un autre quartier de Garoua depuis le début de cette catastrophe qui a entraîné une visite du président Paul Biya dans ces deux régions de son pays du 19 au 22 septembre, Oumarou Hamadou, 54 ans, ne retrouve son domicile de Lopéré aujourd'hui que le temps d'un bref passage de quelques heures consacré au nettoyage.

En treize ans de vie dans cette agglomération séparée par une route de la Bénoué, fleuve qui traverse le Nord-Cameroun jusqu'au Nigeria, « nous sommes, a-t-il témoigné à Xinhua, habitués avec les inondations, mais celles-ci sont exceptionnelles. Comme vous pouvez le constater, il y a un mur de ma maison qui est tombé. La plupart des inondations, l'eau rentre dans nos maisons, on déserte pour deux ou trois jours et on revient ».

Il a préféré laisser sa deuxième femme s'installer dans un site de relocalisation créé ailleurs dans la ville, dans la cour et dans un espace non occupé en face du centre de santé intégré de Takasko, par les autorités avec le concours des agences des Nations Unies pour accueillir des sinistrés initialement hébergés à l'école publique de la Bénoué, à Lopéré.

Sur une population évaluée à 50 familles, sans indication du nombre global de membres, ce site accueille 45 enfants de 0 à 5 ans et 10 femmes enceintes en faveur desquels les autorités sanitaires et administratives appuyées par le Programme alimentaire mondial (PAM) et l'Organisation mondiale de la santé ( OMS) apportent une attention spécifique.

Grâce à la mise à disposition de médicaments de soins primaires, des cas de paludisme enregistrés chez « des femmes et des hommes de plus de 60 ans » ont été rapidement maîtrisés, a rapporté la responsable du centre de santé Scholastique Temga, qui a par ailleurs annoncé une aide alimentaire aux sinistrés constituée du riz, du poisson fumé et de l'huile d'arachide.

Pour les bénéficiaires dont, en plus des aliments cités, les habitudes alimentaires reposent essentiellement en outre sur le mil rouge, le tamarin et le sorgho, la ration offerte ne suffit pas à combler leurs besoins en nourriture.

« C'est différent quand c'est une personne même qui achète ce qu'elle veut avec son argent. La nourriture manque. Voilà le petit bébé, quand sa mère a bien mangé, c'est en temps-là que lui aussi allaite bien », a remarqué Moussa Harouna, chauffeur de particuliers qui a déclaré avoir perdu son boulot à cause des exigences du recensement des victimes des inondations entreprises par les autorités.

Sur quelque 60.000 sinistrés officiellement recensés, les deux tiers se retrouvent dans le Nord et le reste provient de l'Extrême- Nord. D'après les Nations Unies, 52% d'entre eux sont des femmes et 18.000 sont des enfants. Environ 6.600, soit un taux de 11%, sont abrités dans des sites de relocalisation, au nombre de quatre dont quatre dans l'Extrême-Nord et deux dans le Nord.

Pour Ousmane Njikam, coordonateur régional de la Croix-Rouge camerounaise pour le Nord, « ce chiffre peut évoluer, parce que dès les premières estimations, l'évaluation a porté sur les personnes qui ont perdu leurs habitations. D'autres personnes qui ont été sinistrées avaient des abris adéquats. Les autorités administratives ne souhaiteraient pas que ces personnes puissent rentrer dans les zones qui ont été inondées ».

Ces derniers ont pour la plupart déménagé auprès des proches. A Garoua, en plus du site de relocalisation de Takasko composé de tentes offerts par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) dans le 2e arrondissement, deux sites de recasement sont envisagés à Gbadjoudi et Bocklè dans le 3e arrondissement, à en croire Njikam qui précise que ce sera des abris provisoires pour cinq à six mois, avec des poteaux en bois et recouverts de bâches. Dans leur furie, les eaux en crue du Nord et de l'Extrême-Nord ont privé beaucoup d'élèves d'école pendant de nombreux jours dans ces régions où les taux d'analphabétisme restent les plus élevés du Cameroun, en attendant la solution de transfert provisoire dans d'autres établissements décidée par les autorités.

Elève du cours moyen II à 14 ans avec un français approximatif comme la majorité des sinistrés rencontrés, le jeune Mohamadou Kouéranga retiré avec ses parents de Topéré pour Takasko est dans cette situation. « L'eau est rentrée dans notre maison, nos effets sont détruits. Même mes cahiers d'école se sont gâtés. On souffre ici. On est venus là où on ne connaît pas. On va à l'école (à Kolléré, ndlr) sans argent pour prendre le taxi », a-t-il affirmé.

Comme ses voisins, Hamed Ouamarou revient à Topéré dans la journée pour essayer de reconstruire sa vie brisée. Planteur, il a perdu ses champs dans les inondations et s'est reconverti dans le métier de creuseur de sable qu'il recueille dans la rivière traversant le quartier pour pouvoir gagner entre 25.000 et 30.000 francs CFA (50 et 60 USD) le tas. « Là-bas au champ, tout est gâté. On se défend comme ça pour avoir à manger pour la maison ».

Pour les riverains, ce sont les premières inondations extrêmement dévastatrices que Garoua subit depuis quarante ans. Le bilan officiel fait peu de cas de pertes humaines, mais des sources informelles annoncent une trentaine de morts pour les deux régions sinistrées.

Le PAM annonce la prise en charge de 25.000 sinistrés vulnérables, à Pouss, Maga, Guirvidig et Kaï Kaï dans l'Extrême- Nord et Lagdo, Garoua II, Garoua III et Pitoa dans le Nord. « Au total, 1.400 tonnes de vivres seront distribuées (dès dimanche, ndlr) à ces sinistrés vulnérables, et cela pendant trois mois », a indiqué le chef du sous-bureau de Garoua, Emery Kabugi.

Face à l'ampleur de la catastrophe, les pouvoirs publics camerounais avaient annoncé le déblocage d'une aide d'urgence de 1, 5 milliard de francs CFA (3 millions USD). Les Nations Unies ont de leur côté mobilisé un million USD sur plus de 6 millions recherchés. F

Agence de presse Xinhua     2012/10/07

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